-Druide... Enfin, je vais devenir un véritable druide.
Quelle fierté lorsqu'il avait enfilé pour la première fois la robe des novices...
Agon avait été accepté parmi l'ordre tauren des druides et avait commencé sa formation auprès du maître druide de Bloodhoof. Il avait appris peu de choses, mais cela lui semblait déjà énorme, promesse de riches connaissances à venir. Les tours de passe-passe de son fermier de père lui semblaient bien ridicules en comparaison de ce que son maître allait lui enseigner. En bon élève, il allait s'appliquer et tâcher de devenir un bon élément.
Le lion et les moucherons
Un fier guerrier, vêtu d'une magnifique armure, chevauchant sa belle monture,
Aperçoit, à la Croisée de chemins, une dizaine de gueux.
C'est la gloire qui l'attend en ce valeureux défi,
Et notre lion, noble et féroce, s'élance au milieu des moucherons.
Une chiquenaude, dix cadavres s'amoncellent,
Un petit coup de dent, des corps recroquevillés dans une mare de sang,
Un simple souffle, tous s'envolent.
La bataille s'éternise...
-Mais, ce minuscule insecte, je l'ai déjà tué cent fois!
Et notre héros s'en repart
Pour conter ses exploits.
Le fait de se savoir invisible ne suffisait pas à rassurer le jeune druide alors qu'il évoluait au milieu d'un groupe d'arachnides géantes qui pouvait l'endormir d'une simple morsure si elles venaient à sentir sa présence. Mais la plante n'était plus qu'à quelques mètres, et Agon savait qu'elle lui permettrait de créer les potions dont il avait tant besoin. Il fallait s'approcher en silence et attendre le moment propice avant de cueillir délicatement le végétal. Un sourire satisfait se dessina sur le visage du tauren lorsqu'il glissa précautioneusement le butin dans sa sacoche...
Un son strident...
Deux crochets noirs fouettent l'air, mais ne rencontrent que le vide...
Le combat s'engage en une danse de mort silencieuse...
Les muscles se tendent...
Et le bâton s'abat sur l'hideuse créature...
Agon examina la blessure qui s'étendait le long de son bras gauche. Le poison était là, l'apprenti alchimiste en reconnaissait les premiers effets. Par chance il disposait dans sa musette d'un anti-poison qu'il avait concocté deux jours auparavant. Un triste pensée courait cependant dans son esprit: la recette de ce remède nécessitait une soleillette, plante bien plus dangereuse à récolter. Il lui faudrait donc de l'aide pour renouveler ses réserves...
MogLe vent du monde
Souffle si fort
A qui songe
Le défier
AmertumeJ'ai rencontré ce jour là un jeune tauren qui s'est proposé pour devenir mon intendant...
-Je peux vous être très utile maître Agon, m'a-t-il affirmé. Je sais que les aventuriers comme vous ne sont pas toujours très doués pour le commerce. Moi, j'habite à Orgrimmar, je connais l'hotel des ventes comme ma poche et toutes les combines pour trouver ce dont on peut avoir besoin. Faites moi confiance...
Il est resté accroché à mes sabots de la banque à la vallée de l'honneur sans cesser de me vanter ses qualités de commerçant débrouillard. Finalement, peut être plus pour m'en débarasser que par réelle nécessité, je lui ai promis que je ferais appel à lui en cas de besoin. Le jeune tauren avait alors exulté de joie. Apparemment, je devais être le premier à accepter sa proposition.
Je dois bien avouer que depuis, Mog m'a rendu de fiers services.
-Tu ne peux pas me demander ça Rigor, et tu le sais très bien. La honte s'abattrait sur moi, ainsi que sur ta propre famille!
Le sergent s'était levé et avait frappé des deux poings sur la table.
-Une vie pour une vie. Tu ne peux plus me le refuser. Agon ne survivra pas, cela ne fait aucun doute. Je me battrai pour deux, pour qu'il puisse vivre.
Le guerrier avait fermé les yeux, puis baissé la tête en signe de résignation.
-Tu as quelques minutes pour te préparer et dire adieu à ta famille. Nous t'attendrons sur la route.
J'avais alors à peine 14 ans. Mon père nous avait serrés dans ses bras, puis avait pris la direction du nord pour rejoindre la Grande Alliance.
Si son geste m'avait sauvé la vie, il ne m'avait pas épargné la honte. Cette honte, je l'avais lue dans le regard des taurennes du clan qui étaient restées. Elle grandit encore davantage lorsque je sus qu'une immense bataille se préparait pour sauver notre monde, mais que je n'y participerais pas. Cette honte qui m'étreint encore lorsque les souvenirs rejaillissent...
Quelques mois plus tard, mon père était revenu.
Il y eut ce jour là
Comme un air de fête
Quelque chose d'indéfinissable
Une lumière plus lucide
Embaumant tous les coeurs
Une joie sans raison
Emanant des parfums
Les baies sauvages
Goûtaient si fort
Un rire inextinguible
Naquit dans sa poitrine
La conclusion qui s'imposa à l'esprit du jeune druide le frappa de stupeur...
Oui, les évènements survenus ces temps derniers venaient corroborer cette thèse: la légion manipulait insidieusement ceux-là même qui venaient pour la combattre, instillant en leur âme le goût du pouvoir et de la puissance, les transformant peu à peu en pantins au service du mal.
Jamais, depuis qu'il avait entamé son propre combat contre le mal ultime dans les Maleterres, Agon n'avait été aussi souvent confronté à de puissants guerriers de l'Alliance. Mais surtout, c'était les méthodes peu honorables utilisées par ceux-ci qui l'avaient laissé perplexe...
De plus, des nouvelles du village de la Croisée des Chemins rapportaient qu'un groupe important de soldats redoutables ayant déjà affronté la légion ardente ne cessait de harceler les habitants de la région. C'était cependant la présence de druides très puissants qui avait fini par convaincre le tauren. Un druide ne peut se mettre au service la destruction sans se voir refuser le pouvoir accordé par la Nature, c'était la base même de l'enseignement druidique.
Il fallait au plus vite retourner à Thunder Bluff pour faire part de cette inquiétude à Hamuul Runetotem. En tant qu'archidruide, il saurait certainement quelles mesures devaient être prises.
Agon adressa une prière à la déesse Terre afin qu'elle le protège de cette infamie, puis il prit la direction de la capitale.