1er Août 2018 3ème jour de la Décade du Lapin ( Lune de l'Esprit ) -
Les Terres de Kirin Tor

Chiron

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Joué par : Chiron Joué par : [ Information masquée ]
Age : Moins de 6000 ans
Lieu de naisance : Trouvé a Sombrivage. Lieu de Naissance inconnu
Signe de naissance : Tigre
Sexe : Homme
Race : Elfe
Faction : Alliance
Formation : Druide
Niveau : 60
Guilde : Oeil du Crépuscule
Artisanat 1 : Alchimiste
Artisanat 2 : Herboriste



Description : Sauvage, sombre et mystérieux, Chiron est un des premiers et plus anciens adeptes de la Voie Férale des Druides, porté par un passé sombre dont il a presque tout oublié et habité par une force qu'il apprends au fil du temps a mesurer et découvrir.

Il fut a l'origine de la fondation de l'Oeil du Crépuscule, un groupuscule d'Aventuriers et de vagabonds mûs par le souhait de la Paix et le Repos de la Terre, ayant choisi d'agir depuis les Ombres pour terrasser les véritables ennemis de la Vie : Légion, Fléau... Dragons et autes horreurs.

Aujourd'hui, Chiron a réussi a se libérer - en partie du moins - de l'Emprise que sa Nature Férale imposait à sa part Elfique, reprenant ainsi un contrôle plus grand sur les incarnations des Esprits Druidiques qui l'habitent, ainsi que sur l'autre chose plus sombre et violente tapie au fond de lui.

A force de patience, de méditation, et grâce à l'aide de nombreuses personnes, il a consacré désormais ses pouvoirs à la Restauration des Energies Naturelles , préserve désormais toute Vie soumise a son champ d'action par ce biais, et le fait avec une dévotion et un calme redoutable, quelle que soit la situation.

Il passerait beaucoup de son temps à Reflet de Lune, a disserter et lire avec Rabine Saturna, les rares fois où il s'accorde le repos, où a méditer près du Refuge des Saisons.

Il aurait combattu et vaincu avec son Clan certains des périls les plus sombres de ce monde, des profondeurs de la Terre jusque dans l'Antre de Dragons anciens, et si nul ne sait vraiment ce dont ils sont capables ou ce qu'il en est réellement, une chose est sûre : c'est qu'il sont revenus pour en parler, et porteurs de butins de guerre conséquents.

On dit cependant que parfois, des soirs de pleine Lune, il disparait complètement pour ne réapparaitre que le lendemain, tard, et souvent à l'autre bout du monde, sans souvenirs de sa nuit passée. On murmure aussi qu'il ne s'est pas encore totalement affranchi de l'influence de ses Aspects animaux, qui ont eut tant de prise sur lui qu'ils l'auraient marqués de leur empreinte à jamais, et se disputeraient le contrôle de son Esprit d'Elfe...
 
Ère du Renouveau [11]
Lune de la Force
Décade du Panda
Décade du Gorille
Décade de l'Ours
Lune d'Agilité [3]
Décade du Tigre [1]
L'auberge du Maelstrom
La soirée battait son plein a l'auberge du Maelstrom....


... les convives, souriants, dissertaient, buvaient et riaient, fêtant probablement quelque heureux événement survenu la veille. La diversité des gens présents transformait l'ambiance normallement calme et discrète de l'auberge en un tourbillon d'éclats de voix, de chopines fracassées et de rires francs. Nains, Gnomes, Elfes et Humains semblaient tous en harmonie dans cette vaste salle ou le mot d'ordre semblait être Euphorie.
Le balcon restait le seul endroit ou un brin de calme était encore perceptible. Deux ou trois tables la haut seulement étaient pleines, et ces gens là semblaient passer plus de temps a regarder la cohue en bas qu'à eux même se laisser aller a l'ivresse, même si un amusement évident se lisait sur leurs visages.

Tous ou presque portaient les Couleurs de l'Ordre de la Nouvelle Aube.

Les quelques individus qui ne les portaient pas se trouvaient groupés a une table dans un coin, et semblaient prendre part avec plaisir aux ripailleries lancées par les uns ou les autres.

La serveuse était débordée. Voilà trois jours qu'elle rentrait chez elle a vingt heures par manque de clients, et justement ce soir, alors qu'elle avait prévu d'accepter le rendez vous du fils ainé des Trias, l'ordre choisissait de fêter quelque événement joyeux. Elle savait que sa soirée était fichue, mais n'y pensais pas. Trop de choses a faire, trop de commandes a retenir, trop de chopines a débarasser...
Elle lança un regard noir a l'aubergiste qui plaisantait avec un Paladin a la stature imposante, accoudé au comptoir.
"Fichu sac a vinasse", se dit-elle.
"Même pas fichu de me donner un coup de main..." maugréa - t - elle.
"Et Sylvia qui est malade justement ce soir..."

Puis, voyant que le Nain surnommé Lokir et son comparse Humain Reldrick s'apprétaient a engloutir la dernière gorgée de leurs Pintes après un rot tonitruant, elle se dépécha d'aller chercher un nouveau tonnelet de bière pour leur amener avant qu'ils ne la hêlent.

"Voilà comment travaille une vraie serveuse", dit elle pour se rassurer.

Elle apporta le tonnelet et le posa sur la table alors que le Nain commencait a ouvrir son immense bouche cerclée de mousse fraîche pour lui passer commande. Surpris par la vue du tonnelet plein, il ne put que laisser échapper un nouveau rôt, au grand plaisir de son comparse qui éclata d'un rire incontrôlable en lui resservant un boc.

la serveuse esquissa un sourire, rapporta le tonnelet vide derrière le comptoir, puis fit un rapide tour de salle pour s'assurer que tout allait bien.

Satisfaite du déroulement des choses, elle décida de s'accorder deux minutes pour prendre l'air, purger ses poumons de l'atmosphère enfumée qui régnait à l'intérieur, et reposer ses oreilles qui sifflaient déjà a la quiétude bienveillante du Parc de Stormwind.

La fraîcheur du dehors giffla son visage et lui rendit immédiatement ses esprits. Le chant omniprésent des grillons emplissait l'air. Enlevant ses sandales, elle posa ses pieds nus dans l'herbe verte du Parc. Délicieuse sensation.

Levant la tête vers le ciel, elle esquissa un nouveau sourire, puis pris une profonde inspiration...


Et se figea.



Un étrange odeur venait de parvenir a ses narines.

Elle huma l'air a nouveau.

Oui, l'odeur était bien présente, une odeur agréable, mélange de sapin humide, d'humus, et d'épices.

Qu'est ce que cela pouvait bien être?

Elle tourna sur elle même pour tenter de repérer la source de l'odeur, mais n'y parvint pas.

Une voix rauque la fit tressaillir, comme un frisson lui parcourant soudain la colonne quand elle réalisa qu'elle était observée..

"C'est moi que vous cherchez de la sorte, Humaine?"

Les mots venaient d'un endroit sombre, jouxtant la porte de la cave de l'auberge, la où un tallus d'épineux prenait naissance entre la pierre du seuil de l'auberge et l'herbe du Parc.

Réfrénant un sursaut, elle porta la main a son cou, cherchant le Pendentif de la Dame sensé la protéger des démons, et recula d'un pas.

Une lueur dorée, irréelle, brillait, là, dans le tallus. Son coeur commenca a battre a tout rompre. Elle recula d'un pas. Un mince filet de fumée s'élevait du tallus.

"Oui, c'est moi que vous cherchez", repris la voix.
"N'ayez pas peur."

La serveuse hésita une seconde a se ruer dans l'auberge en appellant a l'aide, puis se ressaisit. Elle était dans la Glorieuse Cité de Stormwind, rien de grave ne pouvait lui arriver.

"Excusez moi, je ne voulais pas vous effrayer, Humaine", dit encore la voix.

Puis le tallus bougea, et la serveuse ne put cette fois réfréner un sursaut. La lueur dorée devint plus forte, jusqu'à prendre forme de deux points fixes et lumineux qui étaient dirigés vers elle. Elle discernait désormais une forme humanoïde, assise par terre et adossée au mur de l'auberge. Un chapeau a bords larges masquait ses traits, mais la lueur était maintenant si intense qu'elle put voir clairement la moustache fine et longue, de couleur blanche, qui bordait la bouche de l'individu. Dans un mouvement gracieux, il porta quelque chose a ses lèvres.

Une crépitante lueur rouge naquit dans la pénombre, puis se tarri comme la forme recrachait un voluptueux nuage de fumée vers les étoiles.

"Vous.. Vous ne devriez pas fumer ainsi à côté des plantes, vous.. Vous risquez de provoquer un incendie" balbutia t elle.

Un rictus se forma sur le visage de l'inconnu, dévoilant des traits durs et inquiétants. La personne qui se trouvait là, a moitié enchevétrée dans une masse d'arbustes épineux, avait plus les traits d'une Bête que d'un homme.

Lentement, la forme se releva.

La serveuse ne put s'empecher de remarquer l'étrange mouvement des arbustes comme ils se recroquevillaient pour laisser s'extraire la forme haute et élancée de leur sein.

"Ne vous inquitétez pas pour elles", repris l'étranger en aspirant une nouvelle bouffée.
"Ce sont mes amies"
Son rictus était véritablement inquiétant.

Il écrasa son mégot entre ses doigts en soufflant un nuage opaque vers l'auberge.

Enfin sorti de la pénombre, elle put voir que c'était un Elfe de la Nuit, mais un comme elle n'avait jamais vu. Tous les Elfes qu'elle avait croisé jusqu'alors étaient beaux et avaient des traits délicats.

Celui ci semblait sortir tout droit des Enfers. Ses traits étaient sauvages, habités par quelque expression de rage et de fureur, et ses yeux luisaient d'un éclat qui ne pouvait qu'être emprunté a un Démon. L'Elfe était vétu de peaux de bêtes, et de cuir grossier. Son chapeau brun, rabaissé sur son visage, laisser dépasser ses longues oreilles. Le manche d'une énorme Masse était visible par dessus son épaule, et la longue cape qui pendait dans son dos semblait faite de végétaux entremêlés.

"Excusez moi encore, Humaine, je prenais juste le frais avant de rentrer gouter a vos bières.. Une sacrée fête semble se dérouler là dedans, n'est ce pas?"
"Oui, je.. J'étais sortie prendre l'air, je dois y retourner.."
"Je vous accompagne, alors, je dois voir quelqu'un dedans."

La serveuse passa nerveusement ses pieds fins dans les sandales qu'elle avait laissées un peu plus tôt, juste a côté de l'entrée de l'auberge.

Elle senti un frôlement contre sa cuisse et se retourna vivement.

L'Elfe n'était plus là.

Elle se dépécha de rentrer, heureuse de retrouver l'ambiance somme toute rassurante de l'Auberge, qui, ce soir, portait particulièrement bien son nom.

Puis, oubliant l'étrange rencontre qu'elle venait de faire, elle se dépécha de reprendre les commandes pour satisfaire ses clients. Ce soir, même le haut Conseiller de l'Ordre et la Magistère étaient présents, il ne fallait pas les décevoir.

Ainsi une heure passa... En un coup de vent.

Montant au balcon pour resservir a la Magistère un délicieux thé de Stranglethorn, elle ne put retenir un hoquet de surprise quand elle se pencha pour servir le breuvage et qu'elle vit l'Elfe Etrange assis, dans un coin sombre, près de la fenêtre du balcon de l'auberge. Il semblait observer avec beaucoup d'attention les moindres faits et gestes des convives dans la salle du bas.

"Qu'y a t il, mon amie?" lui dit la Magistère.
Détournant les yeux de l'Elfe, elle répondit vivement a la Magicienne.
"Rien, je.. J'ai oublié de servir un client"
"Ah?"
"Oui, excusez moi"

La serveuse s'approcha de l'Elfe, sous le regard curieux de la Magistère.

"Ne vous dérangez pas pour moi," lui dit il comme elle approchait.
"je me contente de regarder"

"Oui! justement, écoutez, je ne sais pas comment vous êtes entrés, mais si vous ne consommez rien je vais devoir vous fiche dehors."
Elle ne pouvait contenir son énervement. Comment était il entré sans qu'elle le voie?

"Donnez moi un Thé alors, comme celui que vous avez servi a l'instant a l'autre table."

Elle fronca un sourcil.

L'attention de la Magistère commencait a s'intensifier. Qui était cet inconnu, pourquoi discutait t il a voix basse avec la serveuse... Quand et comment était il monté s'installer au balcon? Elle se tourna vers le Haut Conseiller pour lui faire signe de la suivre alros qu'elle se levait pour se diriger vers la table de l'Elfe.

Ce dernier parlait encore avec la serveuse, mais apercu par dessus l'épaule de cette dernière les deux Humains s'approcher.

"je dois vous laisser, Humaine. merci de votre compagnie. Ce fut un plaisir que d'observer cette foule"
"Comment, mais.."

Un bref éclat lumineux aveugla la serveuse. Alarmés, les deux Dirigeants de l'Ordre se ruèrent vers la table, seuls conscients de l'étrange scène qui se jouait alors.

Mais il n'y avait plus rien. juste la fenêtre, ouverte sur la ruelle.

Malgré leur habilité naturelle a voir ce qui est caché, ils eurent beau regarder, il n y avait rien. Si quelque chose était là, c'était désormais loin.

La Magistère était inquiète, mais ... La Fête continuait et la serveuse l'assura que tout allait bien.

Alors elle se rassit et oublia l'incident.



C'est en fermant la fenêtre, tard dans la Nuit, quand tous étaient saouls ou partis, que la serveuse remarqua avec étonnement la touffe de poils sombres aux reflets violets qui étaient accrochée au chambranle de la fenêtre..

"Etrange personnage", se dit elle.

Puis elle ferma l'auberge, et alla trouver le sommeil.

Un sommeil agité, néanmoins... Il était évident que cet Elfe était là pour une bonne raison.. Il cherchait quelqu'un, ou quelquechose du genre.. Sa présence n'était pas un hasard, elle en était sûre. Cela devait être lié a L'Ordre de la Nouvelle Aube.

Elle ne savait pas pourquoi, mais elle était sûre de le revoir incessament sous peu..
 
Décade du Singe [1]
Une Nouvelle Aube
En cette fin d'après midi lumineuse, Stormwind était en proie a un fourmillement et a une animation typiques d'une grande ville humaine. Les éclats de voix venant du Quartier des Commerçants se répercutaient sur les pavés de la ville et rompaient avec la quiétude habituelle du Parc.

La faune locale au Parc luxuriant était issue de l'amour des Elfes pour la Nature. On retrouvait là, mêlés, Oiseaux de Feralas, divers rongeurs des Forêts d'Azeroth, et une multitude d'insectes des quatres coins du continent.

Tout ce beau petit monde vaquait paisiblement à ses occupations sans se soucier de l'agitation des gens de la ville. Il faut dire que quand on a tout un chariot de graines a ramener à la fourmillière, on a pas trop le temps de s'arrêter regarder les longues jambes qui passent.

C'est donc une petite fourmi paisible, habitant la fourmillière de l'Aulme du fond a droite, qui fut la première victime de ce qu'il se passa ce soir là.

Elle s'acharnait depuis une minute a passer la rainure principale du chemin de pavés, qui lui posait d'énormes difficultés étant donné la taille de la graine de Stranglethorn qu'elle essayait de transporter vers ses soeurs. Elle s'était rapé la carapace tant et si bien que plus rien ne comptait que sa tâche et l'urgence de la mener a bien.


C'est pour cela qu'elle ne remarqua rien lorsque soudain, la Graine se mis a trembler dans la rainure, et sorti avec la fourmi accrochée a elle en un petit bond auquel succèda une série de tremblements chaotiques qui faisaient rouler la Graine en tous sens. Obsédée par son désir de tenter d'arrêter cette graine folle, la fourmi ne remarqua pas que le ciel s'était brusquement assombri.

Ce n'est qu'au tout dernier moment que ses sens de fourmi l'avertirent que quelquechose tournait mal. Elle eut a peine le temps de dresser ses antennes pour humer l'air, qu'un énorme claquement retentit, tout devint sombre, puis la lumière revint. La Fourmi était sonnée. Elle n eut que le temps de voir sa Graine rouler au loin que tout recommenca. Elle courru se cacher dans une autre rainure, et attendit que la tempete se calme pour retrouver sa graine broyée en milles morceaux. Sale journée pour une fourmi...




La procession de la Nouvelle Aube venait d'arriver aux portes de l'Auberge du Maelstrom.
Lokir avait cru avoir marché sur quelque graine trainant sur le chemin mais sous ses Bottillons de Maille impossible de savoir..

Aenelia regardait tous ses amis avec fierté. C'était un groupe impressionnant, hétéroclite et visuellement impossible a ignorer.

Ils revenaient de la Cathédrale de la Lumière, où l'admission de Lokir au sein de leur Ordre venait d'avoir lieu. Une soirée de fête commencait alors, ce soir, tous mangeraient liquide, comme disent les Nains.


Les derniers de la file arrivaient peu a peu près de la fontaine des Druides.

Lokir sentait une odeur dans l'air, comme du poil de chat mouillé, mais ... Il se dit que cela devait être les restes de sa soirée avec Linda BarbeDrue.

Tous rentrèrent dans l'Auberge a la suite d'Aenelia et Darek.


Sur le bord du bassin, à l'Ombre d'un arbre, Chiron attendait. Sa forme de Félin lui offrait des possibilités immenses, notamment celle de rester invisible au vu et su de tous.. Il laissait sa queue tremper dans l'eau du bassin en regardant la procession de la Nouvelle Aube se diriger vers l'Auberge. Il sentit un petit pincement et fit valser un poisson en l'air. D'un mouvement habile de la patte il le cloua au bord du bassin et se lécha les babines. Il ne fallait pas qu'il traîne, mais il pouvait prendre un encas, tout de même.


Il était la pour une bonne raison.

Il se rappella les raisons de sa présence en dévorant son repas.

L'Appel de la Nature.
Il avait rencontré une Femelle.
Il avait trouvé celle par qui, il le savait, devait commencer sa Meute.

Chiron était conscient que depuis qu'il était né, son humanité s'évaporait chaque jour un peu plus, le rapprochant sans cesse plus de l'Animal. Parfois il avait du mal a réagir en tant qu'Elfe, tellement la Voie de la Griffe avait pris emprise sur lui. De tous les Druides, très peu décidaient de laisser l'Essence de Père Ours et Mère Panthère couler librement en eux. Très peu décidaient de briser les dernières barrières de leur Humanité pour devenir un Adepte Féral. Le prix a payer était important pour ces Druides là : leurs transformations devenant tellement instinctives et comfortables qu'ils en oubliaient parfois leur forme d'Elfe. Certains même finissaient par considérer leur forme Animale comme leur forme "Naturelle", éprouvant alors d'extrèmes difficultés a conserver leur apparence Elfique quand ils étaient confrontés à des situations stressantes.

Il existait des histoires terribles au sujet des Druides Adeptes de la Voie de la Sauvagerie, des histoires terriblement tristes aussi, comme celle de la Druidesse qui, abandonnée lâchement par son compagnon de toujours, ressenti une Rage telle qu'elle perdit le contrôle d'elle même, se transforma sous l'effet de son chagrin sans s'en rendre compte et tua son ancien amour d'un coup de patte avant de fuir dans la Forêt d'Ashenvale ou elle vivrait depuis sous sa forme d'Ourse sans parvenir a retrouver sa Nature Elfique en elle. Certains Conteurs disent qu'elle rejoindra Cenarius dans le Rêve d'Emeraude lorsque Malfurion rappellera les Druides au Sommeil..



Mais Chiron était encore différent, il le savait...

Il avait bien failli ne jamais savoir qu'il était Elfe. Nul ne sait d'où il vient. Certains émirent l'Hypothèse qu'il était le fils d'un couple de Chasseurs de Sombrivage, vivant là avant que la corruption ne s'y immisce, et qui furent tués par des Furbolgs devenus malades.
Cela n'explique néanmoins pas comment Chiron aurait survécu.

Toujours est il qu'il fut élevé par les Ours de Sombrivage. Il téta au sein de sa mère Gothma, collé au poil chaud de son frère dans la Grotte où , d'aussi loin que sa mémoire se souvienne, il avait toujours été.

Il se savait différent de son frère, de par son absence de pelage bien sûr, qui l'obligeait a dépendre de lui pour se protéger du froid, mais aussi de par l'attitude que Mère avait avec lui.
Elle ne cherchait pas a lui apprendre quoi que ce soit. Elle l'emmenait avec lui et éduquait son frère tandis que lui devait rester là et observer. Elle lui appris bien sûr a chasser et pécher, mais elle lui faisait clairement comprendre qu'il n'avait ce droit que lorsqu'elle était là avec lui. Il apprenait très vite, rien qu'en observant.

C'est à son 6ème Printemps, lorsque son frère était tellement énorme qu'il ne tenait plus dans la Grotte, que Gothma le fit partir. Chiron eut très peur ce jour là, peur pour les deux êtres qui étaient toute son existence et qui se trouvaient alors face a face en tant qu'ennemis.

Mais Gothma n'était pas une Mère pour rien. Elle régla l'incident d'un grognement et d'un coup de patte, puis pris Chiron sur son Dos et partit dans la Forêt, le petit Elfe fermement accroché a ses poils.

Elle le mena jusqu'à Auberdine, dans un long voyage pour éviter les Furbolgs, les Ours des Chardons, et autres dangers de la Forêt. L'émerveillement de Chiron était indescriptible devant les batiments et gens elfiques. Gothma s'arrêta alors devant une Maison sertie d'un Balcon tourné vers la Mer. Se dressant sur ses pattes arrières de toute sa hauteur, elle rugit en direction du Balcon. Plusieurs Elfes avaient accourus, certains inquiets de voir cet Ours en ville, d'autres térrifiés d'avoir remarqué l'Enfant accroché a son pelage. Tous reculèrent lorsqu'elle poussa ce grondement.

Un court moment passa, puis un Elfe se pencha du Balcon. Ses yeux s'écarquillèrent et il disparu alors pour réapparaitre quelques secondes plus tard à l'entrée de la Maison.

D'un geste de la main il fit signe aux badauds de s'écarter, et s'approcha avec un grand sourire de l'énorme Ourse qui se trouvait devant lui. Cette dernière huma l'air quand il s'approcha, montrant un croc, mais l'Elfe tendit la main vers elle et la posa sur son museau, ce qui calma immédiatement l'animal.

"Et bien ma Belle Gothma, que voilà donc un joli présent que tu nous portes là!" dit alors l'Elfe.

Il s'approcha alors de l'enfant enfoui dans les poils du dos de Mère, espérant rester invisible a ces gens. Ce dernier était bien sûr térrifié. Lorsque l'Elfe le saisit pour le soulever, il se débatti dans tous les sens, cherchant a le griffer comme il avait vu sa mère le faire parfois. Gothma gronda sourdement, et l'Elfe lacha sa prise en reculant d'un pas, interloqué. Il s'agenouilla près de la Tête de Gothma et plongea son regard dans les ténébreux yeux de l'Ourse. Cette dernière soutint le regard un moment, puis d'un mouvement de tête, amena l'Elfe a se relever. Elle posa alors son crâne contre le ventre de l'Elfe et appuya un instant, coincant alors celui qui deviendrait le tuteur de son Ourson contre le mur de sa maison. Elle grogna alors une dernière fois, et se pencha pour enjoindre au petit Elfe – Ours de descendre. Il lui obéi mais resta collé a elle. Ce n'est que lorsqu'elle lui grogna dessus qu'il compris qu'elle allait le laisser.


Elle le poussa vers l'Elfe et lui fit comprendre qu'il était sa nouvelle Mère.

Puis elle le laissa se coller a elle, les yeux pleins de larmes, incapable d'extérioriser la douleur de son coeur avec des mots qu'il ne possédait même pas encore.

Et elle partit.


"C'est ainsi que j'ai terminé, ou plutôt commencé, mon éducation chez les Elfes."se dit Chiron

"D'Auberdine je fus amené a Teldrassil et confié à un tuteur qui m'enseigna les bases de ma Culture et de l'Histoire de mon peuple. Solitaire et sans amis,coléreux et impulsif, incapable de m'intégrer, voilà ce que j'étais. Trop différent. Seule la Poésie Elfique me fit admettre et accepter mes origines réelles. Mais l'incapacité a retrouver la trace de l'Histoire de mes parents m'empéchait d'être comme tous les autres..
C'est naturellement que je me suis tourné vers le Cercle de Cenarius lorsque je fut en Age de choisir une voie. C'était une manière pour moi de rendre Hommage a Gothma. C'était ce a quoi j'étais destiné. C'était le meilleur moyen d'utiliser mon instinct. La Nature ne m'avait pas seulement donné la vie elle m'avait éduqué et protégé là où les miens avaient failli."




Chiron secoua la tête. Il avait terminé son repas ainsi que sa toilette. Cette forme était tellement plus agréable que sa forme d'Elfe. Souple, rapide, discret, puissant...

Il poussa un soupir.

Tant d'années d'errance.. Tant de combats.. Il avait passé sa jeunesse a arpenter Azeroth, délaissant très tôt les Terres Elfiques pour remplir son devoir de Druide au service de l'Alliance, combattant auprès des Nains, des Hommes et des Gnomes chaque fois que cela était néceissaire, utilisant chaque fois qu'il le fallait le Pouvoir de la Griffe, qui trouvait sa source aux tréfonds de son Coeur.


Mais ce dernier avait cessé de battre quelques semaines auparavant. Un bref instant, certes, mais il s'était arrêté, net, quand il l'avait vue.

Il ne se souvenait pas des circonstances exactes de leur rencontre, car elle était le signe que Cenarius le regardait par delà le Rêve d'Emeraude. Il se rappellai juste d'une longue chasse improvisée, qui commenca lorsqu'il décida de joindre cette Panthère gracieuse et racée dans son combat contre les Créatures des Hautes Terres D'Arathi. Leur rencontre, fortuite, le transforma comme jamais. Cette journée là reste gravée dans son sang. Ils semblaient les Maîtres d'Arathi. Ils courraient, jouant en même temps qu'ils chassaient, et laissaient libre cours a une sorte de Bestialité qu'ils ne pouvaient réprimer.

Il se savait marqué, empreint de la grâce de cette Druide dont il n'avait pas encore vu le visage.

Lorsque leur chasse se termina, ils se retrouvèrent, près du Cap du Refuge, et prirent leur forme d'Elfe pour la première fois. Ce qui se passa alors reste un mystère.

Talin, c'était son nom, était encore plus belle et gracieuse dans sa forme naturelle, chose que jamais Chiron n'aurait pu concevoir. Il pensait que tout ce qu'il ressentait était naturel, animal... Normal.

Lorsqu'il la vit, le visage voilé d'un masque, il compris alors ce que sa forme d'Elfe avait en plus de ses formes animales, et ce que ces dernières ne pourrait jamais avoir malgré leurs avantages inhérents. La capacité d'aimer. Il se sentait teriblement proche d'elle, semblable malgré leurs différences.

Il fut frappé alors d'une obsession : voir le visage de cette Dame D'Argent, comme si sa vie en dépendait, comme si il devait voir le visage d'Elune elle même. Il fut frappé par un tourment qu'il n'avait jamais connu, la Honte.. Il avait tellement laissé libre cours à la Voie de la Griffe que son visage en portait les éternelles marques, il était l'expression même de la Rage et de la Colère. Ce jour, il regrettait de ne pas être un autre..

Il ne sait si sa maladresse ou autre chose la toucha, mais elle consenti a lui dévoiler son visage a condition qu'il montre le sien, qu'il dissimulait d'un chapeau depuis plus longtemps qu'il ne pouvait s'en souvenir.

La tristesse noble jointe a la grâce de ses traits fins, les marques que la vie avait laissée sur son visage ne la rendait que plus belle encore. Les Marques Elfiques qui ornaient son visage étaient une Ode à la douceur et a la Rage à la fois.

Chiron s'oublia alors. Rassemblant tout ce qu'il savait de la Poésie Elfique, il laissa son coeur tenter d'exprimer maladroitement les tremblements qu'il ressentait. Il ne pouvait plus reculer devant rien, désormais. Il avait trouvé celle avec qui il voulait fonder sa Meute.


Talin reçu tout ce qu'il dit alors avec une Humilité et une gentillesse extrème, l'écoutant patiemment..


Elle lui expliqua alors, troublée et indécise, que son coeur était déjà pris par un Homme.

Un Homme dont l'Honneur n'avait d'égals que le Courage et la Force.

Le Haut Conseiller de l'Ordre de la Nouvelle Aube, Darek le Svéar.


Rien qu'en entendant ce nom Chiron fut abbattu. Sa douleur était terrible. Mais son amour encore plus grand. Il décida alors que la seule manière d'oublier sa colère et sa jalousie était d'oublier les sentiments qu'il nourrissait pour elle, même si il ne pouvait se résoudre à cesser de la voir. Elle avait marqué chaque parcelle de sa chair et de son âme d'un sceau indélébile, qu'il ne voulait d'ailleurs en aucun cas voir disparaître.

L'échine courbée, il accepta alors de ne pouvoir possèder Talin, et s'en fit une raison.

Il jura devant les Druides Endormis de Malfurion de la protéger et de la garder envers et contre tout, même si il devait mourir pour lui permettre d'en aimer un autre.



Et il l'accompagna, a chaque fois qu'il le pouvait, à chaque fois qu'il la sentait en danger. Il surgissait en bondissant sur les ennemis de la Belle, et courrait lécher ses blessures une fois l'ennemi térassé.


Il ne sait exactement comment les choses évoluèrent. Peut être qu'elle fini par s'habituer a cette Ombre protectrice dans son sillage, peut être qu'elle fut séduite par son comportement ou sa gentillesse, seul Cenarius et Talin le savent..

Mais les choses changèrent. Il s'en rendit compte, il ne sais plus quand, mais il avait senti que Talin le regardait différement. Ils partageaient tant de choses tous deux.. Ils courraient ensemble, chassaient, se reposaient.. Se séparaient pour se retrouver par le biais du Hasard au détour de la cime d'une Montagne, avant de se ruer dans la vallée en contrebas pour attraper quelque proie appétissante qu'ils avaient tous deux traquée..



Ce soir là, il était ici pour la voir, encore. Il ne s'en lassait jamais. Il prenait encore une fois des risques... Toute sa Guilde était présente. Il avait vu des Druides parmis les gens présents dans la Procession. Il devait être prudent, surtout vis à vis de Darek. Il ne pouvait compromettre sa position, et encore moins amener le Chaos dans la vie de son Aimée.

S'ébrouant, il remarqua que tout le monde était rentré dans l'auberge et que déjà les premiers éclats de voix fusaient.

Il s'étira une fois en baillant, puis sauta souplement du bord du bassin et se dirigea vers l'entrée de l'Auberge en se fondant dans les Ombres.


Il huma l'air du dehors une dernière fois. Puis, se tapissant près du sol , il avanca a pas feutrés à l'intérieur du Batiment. Il évita deux personnes, puis monta les escaliers avec précipitation pour aller a l'étage où il y avait moins de monde. Il remarqua Reldrick assit a une table en charmante compagnie. Lokir était dans la salle du bas.
Discrètement, il grimpa sur le garde fou du balcon, et se pencha pour observer.

Talin était là.

Superbe, comme toujours. Elle portait la Robe qu'il lui avait fait tailler par une puissante Prêtresse émue par son histoire, Cynan. Le Noir allait a merveille a Talin, cela lui donnait une gravité enchanteresse. Chiron se délectait de la voir parler, disserter, même si elle semblait parfois songeuse et détachée de tout le monde..

Puis le regard acéré de Chiron oscilla entre les convives. Il vit alors que Darek était assis juste à côté d'elle. Il ne pu réprimer un grondement sourd. Heureusement que le bruit environnant était trop important pour que quelqu'un l'aie remarqué.

Il descendit de la barrière de bois.

Mille conversations fusaient de partout. Il tenta d'en suivre quelques unes, mais avec peu de succès. La Bonne Humeur des convives commencait a déteindre sur lui.

Engourdi de rester immobile, Chiron décida de sortir un peu. Il descendit les escaliers furtivement, ce qui l'amena juste derrière la table de Lokir, dont il s'approcha doucement. Il fut un bref instant tenté de lui mordre le derrière, pour le punir des taquineries incessantes que ce dernier lui faisait subir au sujet de Talin, mais se ravisa rapidement. Pas de risques inutiles.

Mais Lokir était de ces Nains à l'odorat affuté.

"Tiens? Ca sent le Chat Mouillé encore..."
Il fronca un sourcil, puis d'un coup son visage s'éclaira.
"Bon sang de bon sang, par ma Barbe..." maugréa t il.

Chiron recula promptement, prêt a bondir au dehors.. Mais quelqu'un rentra alors dans l'auberge, lui coupant la retraite.

Lokir s'était levé et s'approchait de la table de Darek. Chiron grimpa a l'étage pour tenter de trouver une issue, mais la fenêtre était fermée et Reldrick était encore a la table.

Lokir chuchota quelque chose a l'oreille de Darek.

Chiron savait qu'il lui restait peu de chances de se défiler, cette fois ci.


"Chiron, montre toi!" Dit a haute voix Lokir. Quelques conversations se suspendirent, mais l'effervescence n'en fut pas troublée.

Chiron hésita, il calculait la distance qui le séparait de la porte. Il pouvait y arriver.

"Montre toi, voyons! Je n'aime pas sentir une présence roder autour de moi."
C'était la voix grave et puissante de Darek.

Chiron sut alors que le moment était venu de se montrer, le temps de la discrétion et de la fuite était terminé. Faisant appel a ses pouvoirs, il repris sa forme d'Elfe, apparaissant au vu et su de tous, et héla Lokir.

"Et bien me voilà, Lokir, semeur de discorde, puisque c'est ce a quoi tu tiens tant."
En disant cela, il regardait fixement Darek, qui lentement, se leva.
Talin semblait paralysée.

Darek arrêta Lokir au moment ou ce dernier s'apprêtait à dire quelquechose. Il se dirigea vers le bas des escaliers. Chiron descendit, avec précaution, les escaliers et se trouva face à l'Humain. Il s'inclina, par respect pour l'Homme au delà du rival. Darek lui rendit son salut.

Ils se jaugèrent ainsi pendant un long moment. Chacun ne savait que dire. Chiron avait compris que Darek savait tout, ou presque. Sûrement l'artisanat de Lokir, se dit il.

La conversation qui s'ensuivit alors, seuls les murs s'en souviennent. L'Elfe et l'Humain avaient trouvé verve a la hauteur de celle de chacun. Ils commencèrent a avancer leurs positions, a questionner ou narrer, excuser ou justifier, dans une discussion fièvreuse qui s'élevait en un tourbillon de paroles savamment placées..

L'un parlait d'Esprit et l'autre de Corps, l'un de grandes batailles et l'autre de petites, l'un d'idéal et l'autre d'idéaux... Ils semblaient tellement différents et la conversation s'embrasait a tel point, que bientôt seuls deux conversations se déroulaient concomittement a la leur, debouts face a face, ils parlaient, et parlaient, et tous pensaient que cela ne pouvait se terminer que par une Bataille.

Mais c'était mal les connaître, cette bataille se déroulait dès lors qu'ils avaient commencé a parler.

Chacun vouait a Talin un amour pur et direct.

Lorsque la tempête de leurs sens commenca a se calmer, ils étaient encore en train de combattre verbalement, mais semblaient tous deux fatigués.. Comme si ils n'avaient pas la force de vouloir toucher l'autre. Comme si chacun d'eux savait qu'il ne pouvait pas prendre le pas sur l'autre, comme si aucun des deux ne pouvait légitimement se prétendre plus méritant de Talin que l'autre. Beaucoup de choses avaient été dites, mais aucune ne leur apportait une solution ou indication. Talin semblait térrassée par les événements, elle ne savait plus que faire, n'osait pas les approcher mais sans pouvoir s'éloigner non plus.. Tous étaient dépassés par la tournure des événements. Darek et Chiron avait maintenant le dos courbé de fatigue.


Chiron abandonna alors l'idée de "triompher" de Darek. Une telle pensée aurait alors été totalement sans sens. Il avait compris Darek, et tout ce qu'il avait essayé de lui reprocher, à juste titre, ne lui paraissait plus important.

Darek semblait avoir fait de même. Ce dernier expliqua a Chiron sa déception de trouver là un Elfe tel que lui, qu'il aurait préféré rencontrer un rustre ou un sot. Mais que les choses lui échappaient de la sorte. Il ne savait que faire. Chiron non plus.

Et Talin encore moins.


Il s'assirent alors, tous trois, en dehors de l'auberge, face au rebord ou Chiron avait péché plus tôt dans la soirée.

Ils restèrent là un temps, se reposant comme ils auraient pu le faire en sortant d'une Bataille terrible.

Darek brisa le silence d'une voix enrouée mais assurée :
"Il est terrible de constater que au delà de nos différences, l'Amour que nous vouons a Talin et nos personnalités ne peuvent que nous amener a être amis, Chiron.. "
Chiron aquiesca.

Il ne savait que dire de plus..

Les cloches de Stormwind sonnèrent alors deux heures. Chiron senti qu'il titubait de fatigue.

Il se releva, alors, accompagné de Darek et Talin. Tous trois s'observèrent.

Chiron esquissa un sourire en regardant la Lune.

"Oui... Bien étrange situation.. Elune nous joue des tours, il semblerait .. les choses ne sont jamais aussi simples que la Dame des Mystères veut bien nous le faire croire.."

"Nous nous reverrons tantôt, Chiron."

"Je le sais, Darek. C'est inévitable."

Talin leur avait déjà dit a quel point elle les aimait tout deux, et cela ne facilitait en rien les choses, car elle ne pourrait survivre a la perte de l'un ou de l'autre.

Chiron pris une inspiration et décida d'affronter ce qu'il considérait jusqu'alors comme une malédiction avec un regard nouveau.

Ils se séparèrent alors.

Rien n'était résolu, mais ce soir là de grandes idées avaient volées vers le ciel, et trois Coeurs Fiers et Nobles avaient palpité de pair en se jaugeant les uns les autres.
Chiron n'aurait plus jamais la même attitude face a Darek, c'était un fait. Mais les choses n'étaient en rien plus simples. peut être même au contraire...


Ce soir là, il courru jusqu'à Reflet de Lune, et passa la Nuit a questionner les Etoiles depuis la Montagne surplombant le Lac Elune'Era, pensant a la Dame qui lui avait insufflé un nouveau souffle..

Talin..
 
Décade du Faucon [1]
Lune de l'Esprit [8]
Décade de la Chouette [4]
La Nuit du Chat - Claira
Elle n'aime pas cette ville, Ironforge. Trop de bruits, trop de mouvements, une atmosphère confinée où l'on oublie bien vite les menaces extérieures pour louer un seul dieu, l'or.

Seule la présence des gnomes continue à réjouir son cœur : ces petits exilés lui semblent bien plus proches d'elle et de ses compagnons qu'aucun humain alentour. D'ailleurs, elle ne résiste jamais à envoyer des baisers à leurs petites femmes, si parfaites et charmantes, à la fois enfantines et féroces. Elle contemple avec attendrissement l'une de ces guerrières miniatures, lorsqu'elle l'aperçoit, lui.

Sans vergogne, il vient s'installer sur les genoux de la jeune gnome et manque de la faire basculer vers l'avant. Ses muscles roulent sous sa fourrure luisante ; il s'étire, sans aucun regard pour la foule qui l'entoure.

Reprenant son commerce, Claira l'oublie un instant. Certains de ces elfes sont si arrogants, si hautains, se dit elle avec un sourire ; le bruit du monde n'existe pas pour eux.
Quelques moments plus tard, son attention est de nouveau attirée par la scène : la petite femme gnome nourrit l'elfe mi-chat de sa main, et lui se laisse faire en grondant de plaisir.

Elle ne l'a pas encore vu sous sa forme elfique, mais sait déjà que c'est un homme : sûr de lui, séducteur, et vaguement profiteur. Câlin, tandis que ça l'arrange, il joue de son pouvoir et du charme de son apparence féline. La gnome, d'abord furieuse, est à présent parfaitement douce, et cajole le tueur aux yeux jaunes.
En passant devant eux, Claira ne peut se retenir d'une remarque moqueuse. Pour qui se prend il, cet elfe, cet homme ? Il n'est certainement pas le gros chat débonnaire auquel il veut faire croire, en ce moment du moins.

Comme elle se trompe ! Quelle erreur a t elle fait en s'arrêtant alors! Usant de ses pouvoirs, de ses sorcelleries, le druide la suivra une partie de la nuit, en pensées, en murmures. L'ombre du grand félin s'est posée sur elle comme une marque au fer rouge.
Claira achève de se remémorer ses souvenirs d'enfance où, jeune femme, elle choisit l'ombre de la forêt plutôt que la lumière des villes. Voleuse, c'est juste un autre mot pour dire celle qui reste en retrait; Héritière, c'est juste un autre titre pour dire celle qui attend son heure.

[i]La vraie Lumière n'est pas celle des dogmes, la vraie bataille s'est toujours menée dans l'ombre. Il n'y a pas de royaumes qui méritent allégeance ; il n'y a pas encore d'homme qui mérite ma foi.

Mais le druide félin mérite mon amitié, pleine et entière, et peut-être ma tendresse.

C.
Les Héritiers[/i]
 
La Nuit du Chat - Chiron
L'air était frais, l'approche de l'été donnait au quartier des mages de Stormwind une allure de Parc Elfique.

Chiron ne remarquait même pas la luxuriante végétation courant le long des murs, ni l'affèrement de la faune locale dans ses activités quotidiennes. C'est tout juste si il jetait un oeil aux bipèdes qui passsaient ou parlaient, profitant de cette ambiance calme, reposante.. D'un oeil extérieur, il avait l'air en chasse.

Chiron n'aimait pas beaucoup les Mages.. Si ce n'était son meilleur ami Grisemine, Adepte des Arcanes, il se méfierait réellement de leurs pouvoirs étranges et dangereux parfois, même si cela n'avait rien à voir avec le type de Magie manipulée par les Démonistes. Mais il se devait d'avouer, que, de manière générale, les Mages étaient des gens de Goût. Il n'y avait qu'à voir ce qu'ils avaient fait de la brique et du ciment constituant les fondations de leur quartier : quelques années après l'édification des Batîsses et de la Grande Tour, la Nature avait pris emprise sur le sol, les murs, et le ciel. Ces Adeptes du Savoir, malgré leur soif de pouvoir, gagnaient donc pour cette raison le respect de Chiron, et sa sympathie.

Il avancait d'un pas rapide, foulant l'herbe verte de ses pattes légères, le museau près du sol.


Il pistait.

Il s'arrêta soudainement après avoir fait quelques mètres au sein des allées verdoyantes.
Son museau se redressa, et il huma l'air frais de la Nuit tombante avec application. Elle n'était pas loin. Elle était passée par ici moins de dix minutes auparavent. L'odeur de l'Humaine avait des arômes de Forêt que Chiron trouvait délicieux, mais ce n'était pas pour cela qu'il la cherchait. Du moins pas uniquement.

Il sentit une démangaison sur son flanc. Jetant un rapide coup d'oeil autour de lui à la recherche de quelqu'un suceptible de le débarasser de cette sensation irritante, il se ravisa et utilisa le tronc d'un arbre proche pour soulager ce titillement agaçant. Satisfait, il entrepris de se lisser méthodiquement le poil afin de masquer les épis que sa friction avait fait surgir dans son pelage soyeux aux reflets violets. Chiron n'avait que faire de son apparence, mais sous sa forme de Félin l'instinct de propreté était trop grand pour qu'il daigne tenter de le réfréner.

Un petit bruissement naquit derrière lui. Il arrêta un bref instant de se lécher la patte, puis dans un demi tour fulgurant, abati cette dernière sur le sol, au pied de l'arbre. L'écureuil capturé entre ses griffes puissantes tremblait tellement que Chiron s'en amusa. D'un petit revers de patte, il envoya l'écureuil en hauteur. Ce dernier tenta vainement de s'accrocher a une branche passant a sa portée, mais retomba vers la gueule grande ouverte de Chiron, dont la langue rose dardait entre ses deux énormes Canines.

"Dévolé, mon petit, mais la perfpective de voir fette humaine m'ouvre l'appétit.. L'Efprit de Fenarius te le rendra" dit il entre ses deux dents de sabre avant que l'écureuil ne soit happé par ses puissantes machoires.

"Affez perdu de temps, Chiron. Ne perds pas fa trafe."

Après une toilette expresse, l'animal se tassa sur lui même. D'un bond puissant, il se propulsa sur un balcon surélevé d'où il avait une meilleure vue des allées en contrebas. Il huma l'air a nouveau, et entama un trot rapide le long de la bordure du deuxième étage du batiment. Se faufilant de balcon en balcon, il arriva bientôt au dessus de l'enseigne du Solitaire Bleu, taverne affectionnée des Mages en quête de détente.

L'Odeur de l'Humaine qui l'amenait ici ce soir restait présente.. Outre son odorat de prédateur, Chiron savait très bien que s'il s'en souvenait aussi bien, c'était lié a l'impression qu'elle avait fait sur l'Elfe qu'il était. Une Humaine qui sentait le Cuir et l'Humus.. Lors de leur première rencontre il avait tout de suite perçu qu'elle se sentait aussi mal à l'aise que lui dans la grande Ville des Nains. C'était une louve, pas une citadine. leur rencontre a Southshore n'avait fait que renforcer son idée. Une soirée, brève mais délicieuse, qu'ils avaient passé ensemble, pour tenter de ... se découvrir.

Cette Voleuse l'intriguait. Il sentait sa curiosité piquée au vif par cette jeune femme aux airs durs, bardée de cuir travaillé finement, et flanquée de deux épées acérées au tranchant redoutable. Il se sentait flatté, bien sûr, par le comportement de cette dame a son égard.. Elle aimait les chats, c'était un fait, et Chiron en était une sorte.. Elle était très douce, très gentille avec lui. Il jouait de cela, et il savait qu'elle le savait. Il se savait agile, rapide, puissant, lorsqu'il prenait la Forme de Mère Panthère. Il savait qu'à chaque mouvement ses muscles taillés par la chasse jouaient sous son pelage d'Ebène luisant aux reflets violets. Mais il ne pensait vraiment pas que cela puisse le faire remarquer, surtout dans un endroit comme Ironforge ou les gens respirent non pas de l'air mais... de l'Hypocrisie.
Elle, l'avait aperçu.
Flatté tout d'abord, il avait joué de séduction pour s'en octroyer des caresses, mais il s'était rendu compte que.. Ce petit jeu commencait à le troubler.

Elle agissait comme si elle le connaissait depuis toujours. Il fini très rapidement par perdre totalement confiance en sa supériorité.. La soirée qu'ils passèrent a Southshore, ce fut Chiron qui se languissait des caresses de la Belle, même si il réussi a ne pas le montrer..
Claira était jeune, mais pleine de sagesse. Elle ne se laissait pas mener, Chiron avait compris a quel point sa force d'Ame était forte. Une individualiste, peut être.. Oui, mais avec un drôle de coeur.. Et du talent pour faire valoir sa manière de voir les choses.
Elle obtint de Chiron qu'il lui montre sa forme d'Elfe. Tout d'abord complètement affolé a cet idée, Chiron essaya de chercher quelquechose de rationnel dans sa réaction, mais sans succès. Il.. savait que quelque part au fond de lui subsistait son appréhension du regard des autres. Les Marques de son visage ne pouvaient être pour lui que repoussantes. Il s'était secoué intérieurement, se disant qu'il s'égarait en pensant ainsi, que.. Il n'y avait pas de séduction entre eux, que... il pensa a Talin. Oui, il se faisait des idées sur l'Humaine. Elle faisait battre son coeur de ses mots de miel et de sa douceur candide mélée a son impitoyable air de tueuse bardée de cuir, mais c'était car Chiron était un Alpha, un Chef de Meute, un Animal, un Mâle.. Il avait donc fini par éliminer les appréhensions infondées qu'il avait de se montrer à elle, sous sa forme... Naturelle.

Ce fut comme si la Voleuse le regardait avec des yeux encore plus malicieux que lorsqu'il faisait le Chat. Chiron sentait à portée de sa main l'envie surgir en lui. C'était la première fois qu'il s'attardait a observer la beauté d'une Humaine, c'était la première fois également qu'une humaine s'intéressait a lui pour autre chose que l'aide qu'il pouvait lui fournir. Exception faite de son amie Erasalina, qui avait toujours considéré Chiron comme un frère au delà de sa position de Chef de guilde.

Il pensa a Talin de toutes ses forces, pour ne pas trahir son Coeur, pour ne pas faire de bêtises qu'il regretterait après..

Claira senti, bien sûr, le mal aise de Chiron. Et lorsqu'elle le fixa de ses grands yeux en lui demandant ce qu'il avait.. Il eut beau faire appel a toute l'expérience d'un peuple millénaire pour cacher ses sentiments et mentir a autrui ( il pensait aux siens, si hautains et fiers envers les Humains ), ces deux taches bleues entourées de sourcils froncés lui interdisaient de détourner le regard pour implorer Elune.

Il dévoilà son Histoire, son amour pour Talin, sa ..rivalité avec Darek..

Elle lui raconta a son tour, rapidement, qu'elle était son histoire à elle.. Femme de Paladin, mais comme emprisonnée depuis quelques temps, a la recherche de liberté, d'elle même, de ses véritables motivations. Une Femme qui n'était plus une jeune fille, et qui prenait le risque de remettre en question son passé pour pouvoir vivre plus libre. Un amoureuse de l'ombre, qui aurait servi la Lumière de trop longtemps..

Elle était d'une beauté immense. Physique, oui, certes, même si Chiron commencait tout juste a se surprendre a se délecter de la vue de ses formes plantureuses, plus généreuses que celles des Elfes, mais d'une grâce toute différente. L'Humaine était sérieuse, plus mûre, et cela lui donnait une gravité enchanteresse. Les Elfes que Chiron connaissait, et Talin n'y coupait pas vraiment non plus(même si elle sortait du lot), étaient plus.. Immatures, légères, pour ne pas dire frivoles.

"Les Elfes se savent belles et jouent de cela", se dit Chiron.
"Elle, est belle. C'est tout. Elle n'en a que faire, elle n'en est pas meilleure ou moins bonne. Elle s'en soucie a peine. Elle sait que certains la regarderont, l'aimeront pour ce qu'elle est, et d'autres pas.. Ce n'est pas comme mes Soeurs qui considèrent que tout Mâle leur appartient."


(Suite a venir)
 
Nuits de Southshore - Claira
La nuit précédente, à Southshore...

Elle l'a hélé de loin, et il s'est laissé faire ; il est venu pour elle dans les collines d'Hillsbrad, un territoire neutre où ils pourront se rencontrer à nouveau à l'abri de la foule.
Elle arrive à cheval, et l'aperçoit de loin, droit et haut comme un elfe, solitaire, immobile. A son approche, elle le voit se raidir imperceptiblement, et s'évanouir en un éclair, reprenant la forme qu'il affectionne avec elle.le chat-panthère, chasseur cruel et tendre compagnon.

Elle hésite un moment, par peur de le rejoindre, mais le lien qui l'appelle est plus fort que sa crainte. Déjà le druide est là qui se frotte à ses jambes, qui cherche sa main tiède, qui la pousse doucement. Envolées les réserves et les hésitations, l'appel est plus fort, elle sent son propre sang cogner à ses oreilles. Cette créature étrange, mi-homme mi-bête, est comme un prolongement d'elle même, une part plus ancienne peut être, plus sombre, plus féroce.

Ils ne peuvent rester en place ; un seul regard suffit pour qu'ils se mettent en route, cheminant côte à côte. Ils se parlent à peine, meurent d'envie de se frôler mais. Elle sait fort peu de choses sur cet elfe, et moins de choses encore sur ses désirs à elle. Elle a senti déjà, quelques nuit en avant, ses instincts s'éveiller en entendant sa voix puis comme un frémissement en elle alors qu'ils marchent, ensemble, en direction des côtes.

Au loin ils voient la mer, et derrière eux la Lune leur dit sa bienveillance ; son silence est sur eux comme une douce caresse, comme tous ces mots perdus qu'ils laissent filer entre eux, dans un souffle, dans un regard. Il joue au guerrier sage, fier et protecteur ; elle se sent impatiente et retient ses mouvements. Elle se sent forte, le sang vif, l'œil en alerte ; mais comme empoisonnée aussi, les bras lourds, la pensée qui se trouble

Elle le regarde hésiter, longuement, se remettre en question ; elle voit comme une supplique tout au fond de ses yeux, une obsession qui prend la forme d'une elfe aux traits presque parfaits. Elle devine que cette ombre sera longtemps entre eux, comme un reproche, comme une menace. Elle parle de sa Lumière, qui a déjà faibli et maintenant commence à passer dans son sang, plus que dans son esprit. La Lumière qui s'éteint en elle, à mesure qu'elle croît dans les royaumes du sud, et dans son cœur à lui, le paladin auquel elle appartient encore

Elle n'évoquera pas tout de suite son lignage, sa destinée, toutes les revanches à prendre auxquelles elle ne peut renoncer, les batailles à venir, et la certitude de l'exil encore plus déchirant lorsqu'il est partagé. Le temps leur est compté, comme à chaque rencontre ; c'est toujours comme un rêve dont il faut s'arracher, revenir à la vie, bruyante, et paisible, et sûre, dont la saveur s'amoindrit maintenant qu'elle le connaît Chiron, Chiron, déjà je dois partir, laissez moi vous quitter, donnez moi une seule chance de me passer de vous
 
Bon baisers de Stormwind
A l'issue de cette soirée là, il ne savait plus très bien, ni qui il était, ni ce qu'il devait faire, ni qu'elles étaient les intentions de la Voleuse, si tant est qu'elle en aie de précises.



C'est pour tenter de répondre a ces questions qu'il la cherchait ainsi. Il n'était plus très loin du but. D'un bond souple, il s'élanca dans les airs, au dessus de la terrase de l'auberge, et se réceptionna gracieusement sur le chemin menant au sommet de la Tour des Mages. Les trois nains dégustant leur bière à la terrasse ne remarquèrent même pas la forme qui passa brièvement devant la Lune naissante.

Chiron huma l'air a nouveau.

Elle était très proche. Un bref courant d'air amena a ses narines l'odeur de son parfum. Se retournant vers le vent, il scruta les ténèbres des feux ardents de ses yeux. La Bête s'assit, et leva la tête vers le Ciel. Un oisillon passa devant la Lune, et vint se poser sur sa truffe humide. Chiron plongea son regard dans les yeux de l'animal.

"va, petite fose, porte mon murmure a fette humaine, dis lui de me revoindre, ve l'attends."

L'oisillon resta fixe une brève seconde après que la voix rauque de Chiron se soit éteinte, puis fit dans un petit bond demi tour, et pris son envol par des battements d'ailes répétés.

Satisfait, Chiron entrepris de se trouver un coin paisible ou attendre. A peine eut il fait quelques mètres que le vent lui porta la douce odeur de Claira. Elle apparut alors, vétue de fines étoffes que Chiron reconnu immédiatement comme un Hanbok Traditionnel Blanc, vêtement privilégié de certains Druides d'Azeroth. Il en avait lui même un pour certaines cérémonies. La surprise fut telle pour le pauvre Elfe qu'il failli planter ses crocs dans sa propre chair.

"Qu'elle est cette sorcellerie?" se dit Chiron. "A quoi joue t elle? Mais qui est elle?"

Il grogna. Elle n'avait pas fini de le surprendre, il fallait qu'il se le dise.

Elle l'avait aperçu. Elle se dirigeait vers lui. Il sentit un bref instant une envie subite de partir en courant, puis se ressaisit. Tant qu'il gardait sa forme de Félin, peu de choses pouvaient se passer. Il savoura sa confiance en lui, et se leva félinement à l'approche de la Dame Ombrageuse Vétue de Blanc. Cette dernière, presque cérémonieusement, s'agenouilla à l'approche de Chiron. Il s'approcha, puis s'assit près d'elle, et après une inspiration, plongea son regard aux tréfonds du sien.

Des mots furent dit. Deux âmes, étrangement similaires mais encore inconnues l'une à l'autre, se dévoilèrent, avec d'extrèmes précautions. Chacun avait passé sa journée avec l'Ombre de l'autre rôdant dans son esprit, a pas feutrés.

Un étrange jeu voyait le jour en cette nuit délicieuse.

Mais Claira voyait clairement dans celui de Chiron. Elle savait qu'elle l'avait intrigué, même si elle l'était elle aussi ("et heureusement !" se dit Chiron."Sinon je serais dans une situation encore plus déstabilisante.. Au moins sommes nous presque a armes égales.." Ajouta t il pour lui même).


Cette Humaine n'avait rien a envier en féminité (du moins à la vision de la féminité de Chiron) a toutes les Elfes que Chiron avait croisé. Seule Talin sortait encore du lot.
Elle savait bien des choses, ou les sentait, sur Chiron. Et même si elle affichait sa maîtrise de ses charmes, elle faisait bien ressentir qu'elle connaissait leur pouvoir, et décidait d'elle même quand les utiliser.

Chiron s'était déjà trop attardé auprès d'elle pour se soustraire à son emprise. Il voulait la voir un peu, et lui parler également, mais il était désormais là pour elle, et ne voyait pas de raisons de repartir. Ce n'est que quand Claira lui demanda d'arrêter de se réfugier dans sa forme de Félin que Chiron sentit le danger, d'avoir été perçé aussi aisément. Mais il était trop tard pour se défiler.

Chiron ne put qu'obtempérer lorsqu'elle voulu le voir sous sa forme d'Elfe. Il détestait cela, il se sentait malhabile, laid, et disgracieux, mais... Il lui était complètement impossible de ne pas s'éxecuter, Claira l'aurait trop mal pris, et c'est vrai qu'il fuyait de la sorte.

Plongeant en lui même, il noya à grand peine Mère Panthère au fond de son Coeur.

Il ouvrit les yeux une fois que l'air de Stormwind lui parvint, moins chargé d'odeurs.

Elle était toute petite, face à lui, semblait si fragile d'un coup, n'était-ce les deux lames que Chiron savait mortelles à ses côtés.

Chiron était désormais perdu, pour de bon, que ce soit dans les yeux de la belle ou dans le ciel étoilé..

Il essayait de regarder Claira comme une petite soeur, mais... Il se rendit compte avec effroi que son envie de la dévorer n'avait fait que croître en se changeant en Elfe.

"QUE FAIS TU CHIRON?" hurla t'il en son fort intérieur.

Mais seul l'écho de son cri lui revint des abîmes de son être. Il était face à son âme.

Il voulu se raccrocher à l'image de Talin, et y parvint presque.

Mais il perdit pied, lorsque la demoiselle s'avanca au creux de ses bras puissants, et se blotti contre lui pour se garder de la fraîcheur nocturne, lui susurrant à l'oreille mille mots de miels.
Lorsque ses lèvres se posèrent sur les siennes....

Un sursaut le secoua, comme un courant électrique lui déchira la colonne vertébrale.

Claira l'avait remarqué, et c'est le moment qu'elle choisi pour se faire plus distante, comme si tout a coup elle prenait conscience que les choses s'accéléraient dangereusement. Une distance, certes, mais encore trop faible pour que Chiron se sente à l'abri de ss propres instincts.


Chiron était enragé intérieurement, il voulait hurler a la Lune, serrer la chair de la Voleuse contre la sienne.. L'Animal revenait, très vite. Mais la Dame était lucide, et la nuit fort avancée. Cette soirée là se termina ainsi.. Un flottement d'étoffe sur l'herbe verdoyante lorsqu'elle parti.. L'éclat de ses lames, jurant avec la pureté de l'étoffe masquant à grand peine ses formes callypiges...

Une promesse de se revoir, avec l'espoir d'en apprendre plus de son histoire..

Lorsque Chiron revint, tard dans la nuit, près de l'arbre où ils avaient disserté, un mot était glissé dans une cache en son creux. Il était scellé d'un simple cachet de cire, sans armoirie. Il portait l'odeur de son parfum.

Lorsqu'il eut lu ce mot, il laissa sa tête aller en arrière contre l'arbre auquel il était adossé.

Il ne savait plus que penser.. Que voulait elle exactement? Le savait elle seulement?

Le frisson du mystère ne déplaisait pas a Chiron, surtout lorsqu'il venait d'une si plaisante source.. mais il fallait qu'il fasse attention. Les enjeux de leur rencontre semblaient dépasser la personne de Chiron. Du moins c'est ce qu'il comprenait à la lecture de ce mot écrit de la main de la Dame. Il l'enveloppa dans un mouchoir de lin, le plia soigneusement, et le rangea près de son coeur, dans une cache de sa chemise.

Dormir, alors.. Pour veiller a nouveau.

Les yeux de Chiron se fermèrent ainsi, assit en tailleur dans une branche de l'arbre, et il se plongea dans une longue méditation.. Il savait qu'il serait trop difficile de trouver le sommeil.
 
Décade de la Baleine [3]
Le Jour, la Nuit - Claira
Le jour.

Elle est beaucoup plus grave depuis qu'elle le connaît. Ses journées sont trop longues, elle les passe à rôder aux alentours des villes, ne sachant plus où se trouve sa véritable place. Elle ne se bat plus, plus vraiment, plus franchement, malgré l'envie constante qui la pousse à hurler en son for intérieur, à s'épuiser elle même, à sentir le sang frais sur ses lèvres, à marcher longuement et courir. Elle fait la mercenaire, se propose en aveugle, est de quelques batailles, au hasard – sans envies, sans passion, toute pleine d'une nostalgie délicieuse et amère qui l'enivre. Elle perd la mémoire, sauf pour son souvenir

Elle lui a annoncé qu'elle ne le verra pas, ni ce soir-ci ni même le lendemain, mais l'appel est trop fort, et déjà elle hésite, se défile, cherche un prétexte pour

Elle pense à son mari, à son clan, et à toutes les erreurs qu'elle a commises déjà ; elle leur doit le respect sinon la soumission. Elle devine déjà qu'ils ne comprendront pas – elle même ne sait pas bien quelles forces la dirigent. La jeune fille claire et franche, lumineuse et taquine, n'est que l'ombre d'elle même. L'impatience a fait place à de l'indécision, la confiance aux doutes, aux remords. Toutes ses jeunes convictions s'ébranlent une à une. Entre les hommes, et l'elfe, son cœur hésite, balance ; elle sait bien que ce choix sera bien plus profond, bien plus durable, que celui d'un éventuel compagnon. C'est vers sa nature profonde qu'elle s'oriente aujourd'hui, elle qui n'a jamais su vraiment se décider


La nuit.

Elle est légère et euphorique, tout est facile et simple, la ville est presque belle sous ce ciel plein d'étoiles

Elle a reçu un message. Il l'attendra encore, comme toutes les nuits, et ce soir à nouveau dans la ville où ils se sont croisés pour la première fois.

Elle se change rapidement, retrouve son entrain, sa joie. Elle a les idées claires, le front haut, des envies plein les mains. Elle part vers son commerce, tourbillonne, échange quelques mots avec ceux qui la croisent. Comme à leur habitude, ses vrais amis sont là, rassurants, fidèles, pleins d'histoires à conter, des récits de leurs quêtes, des blagues et des nouvelles de ceux qui sont partis dans autres royaumes. Elle ne se hâte pas, savoure chaque moment où s'accélèrent encore les battements de son cœur. Elle s'attarde à l'auberge, va flâner dans les rues, salue, s'incline, et repart en avant. Il est là elle le sent, mais il faut qu'il attende ; encore un peu, encore juste un instant. Et puis voilà au loin la caverne des voleurs, leur lieu de rendez vous, le seul endroit paisible et doux de cette ville. Et puis, et puis elle l'aperçoit
 
Pierres et Foyer
*longtemps plus tard*



Le flux magique innervant le corps et l'esprit de Chiron fluctue si vite qu'il lui est impossible de discerner quoique ce soit de par ses sens naturels. Il n'essaie même pas d'ouvrir les yeux. Il attend, patiemment, l'ouverture du portail de sortie, il a conscience d'être en train de voyager dans l'astral. Il serre fortement la pierre de rappel dans sa main crispée.. Si elle lui échappe des doigts avant qu'il ne soit sorti du tunnel, il n'en ressortira plus jamais.

Le ballotement chaotique auquel il est désormais habitué se stabilise légèrement, signe que la destination est proche, et fini par se muer en une chute en avant à l'accélération constante... Il perçoit son sang qui s'écoule encore, et se perd goutte à goutte dans les limbes.. Tenir, juste un petit peu plus..

Chiron serre les dents et se prépare au choc du retour.


Dans l'auberge de Southshore, l'ambiance est fidèle à elle même : un mélange de détente forçée et d'anxiété. On discerne portés par le vent les lointains combats faisant rage plus au Nord, mais nul n'y prête vraiment attention, trop occupés que sont les gens a savourer un brin de repos.. Avant de repartir combattre..
La Horde était très pressante depuis quelques temps, sans doute à cause de la recrudescence d'attaques de l'alliance sur des cibles choisies au hasard, éternelle boucle dont Chiron n'arrive toujours pas a voir une possibilité de sortie ne passant pas par l'élimination d'un des deux camps.

Le calme factice régnant dans l'auberge fut immédiatement rompu lorsque le trait de Lune traversa le carreau de la vitre pour frapper le sol de l'auberge, s'agrandissant rapidement en un cercle d'argent à la bordure verdoyante. Les quelques convives s'écartèrent rapidement, pour faire la place au nouvel arrivant. La serveuse saisit rapidement son carnet de commande et, époussetant son tablier, se dirigea vers le point de matérialisation supposé du nouveau venu pour lui prendre commande avec un sourire.



L'accélération de Chiron se ralentit subitement, signe qu'il est tout près. Une légère sensation de flottement...

Et la douleur, terrible.

"Arrrrrrrrrrh ! Par le Courroux de Cenarius, qu'ils soient maudits..." est la seule chose qu'il peut dire avant de tomber, genoux a terre d'abord, puis face contre le sol, malgré son effort pour se réceptionner sur ses mains rouges de sang.

La serveuse lâche son carnet avec un cri, et regarde la haute silhouette méconnaissable d'un Elfe s'effondrer au sol en se vidant de son sang par un nombre intolérable de blessures.

"oh mon dieu !" dit elle, en reculant, soudainement prise de peur.

Chiron tente tant bien que mal de se redresser, mais il sent que quelquechose est planté dans le bas de son dos et lui coupe la mobilité des jambes. Il grimace avec rage, crachant le sang qui lui emplit la bouche, et ordonne a son corps de lui obéir, de se redresser. Il doit se soigner, il doit..

Le vertige. Le vertige frappe Chiron en plein visage, et puis cela l'empêche immédiatement d'essayer stupidement de se relever. Il ne peux pas voir l'état dans lequel il est, il n'imagine pas le nombre de blessures qui parsèment son corps.

En fait, il ne sait même pas comment il est arrivé ici. Il se souvient juste des derniers instants du combat.. De la fureur du Démon de la terre, de ses compagnons qui tombent sous les coups surpuissants de l'entité connue comme la princesse Theradras, il se souvient essayer de leur crier de fuir, mais les projections d'épines du monstre les perçaient de mille part, les faisant tomber à terre sitôt qu'ils essayaient de se relever.

Il se rappelle dans un dernier sursaut de lucidité invoquer l'Esprit de Cenarius pour faire Renaître la Prêtresse qui l'accompagnait, dans l'espoir qu'elle puisse leur donner une seconde chance de vaincre le Démon.
Il revoit le visage boursouflé, ignoble caricature de ce qui aurait put être une femme, se tourner vers lui avec un rictus, la bouche écumante du sang de ses compagnons, comme il essayait de concentrer l'Energie Naturelle pour l'insuffler au corps sans vie de la servante de la Lumière. En deux enjambées sautillantes, l'immense masse de graisse adipeuse le surplombait de toute sa hauteur, brandissant son énorme sceptre clouté, et fit siffler l'arme en direction de Chiron. Il titubait déjà, perçé de milles épines acérées, cherchant a se concentrer sur le sortilège de renaissance, mais lorsque la masse le percuta à la poitrine, il ne put que sentir son corps flotter dans l'air comme un voile flou lui recouvrait les yeux.
Il s'écrasa contre de la roche, et chût ensuite longuement avant de percuter le sol,brisant les quelques os intacts qu'il lui restait. Il sentait le sang couler dans sa gorge, comme il déglutissait et s'étouffait avec peine. Il n'avait pu sauver ses compagnons, et il allait désormais les rejoindre dans l'au delà. Déjà aveugle, il entendi vaguement et senti aux tremblements du sol la créature se rapprocher de lui, sensible surement aux derniers battements de coeur qui animaient ce qu'il considérait déjà comme son cadavre.

Il voulu redresser son visage pour voir son bourreau l'achever, mais son regard n'était qu'un océan sombre et impénétrable.
Il se souvient juste, alors qu'il s'abandonnait à un néant dont la seule lumière prenait la forme de deux grands yeux verts le regardant tendrement, d'envoyer un dernier appel de rage au fond de son coeur, pour tenter de la revoir une dernière fois, elle, qui l'avait fait tenir jusque là.

Son râle perdu, comme un murmure gargouillant et haché, précéda immédiatement sa perte de conscience.
"Clai.. ra.. "





La réponse surgit des profondes noirceurs dans lesquelles il était plongé depuis.. Il ne savait pas combien de temps.

"Chiron? Chiron, tu m'entends?"

La voix de Claira. Qu'est ce que ?..

Ouvrir les yeux, vite.
Du blanc, partout, éblouissant. Il grogne vaguement, l'air hébété, puis referme les yeux.

Il croit sentir un contact sur sa joue, une main... Douce.. C'est bien elle.

"Cl..aira? C'est toi ma belle?" Il sourit aveuglèment, une douce chaleur se répandant dans son corps. "Je ne suis pas mort, là?"

Et une violente douleur au ventre lui arrache soudain un cri.

"ARRRH...!"

Le rire cristallin de Claira éclate en écho a son cri. Il ne peux s'empêcher de sourire, malgré la sensation de brûlure remontant ses entrailles.

"Mais non, tu n'es pas mort, mon hommelfe ! Regarde tu as encore mal.."

La voix taquine de Claira.. Il l'adore. Elle lui suffit a trouver la force d'effacer la grimace de douleur de son visage.

"C'est toi qui tritures mes blessures?"
"Oh ! Comment oses tu? Je te veille, et toi..."

Il essaye encore d'ouvrir les yeux, et cette fois l'aveuglement moindre lui permet de distinguer le visage angélique de l'humaine assise au bord de son lit. Il discerne vaguement les tons de sa robe. Nul doute qu'elle est superbe encore une fois.

Il arrive a soulever sa main, tremblant encore un peu, et à toucher les lèvres de sa fleur de feu.

"Aie! " crie t il comme elle lui mord les doigts en riant.


"Claira ! Mais c'est pas vrai !"

La femme aux cheveux blancs qui vient d'entrer n'est pas inconnue a Chiron.. C'est Dame Fréawine, grande amie de Claira, et Servante de la Lumière.

"Tu ne trouves pas que j'ai mis suffisamment de temps a refermer toutes ses plaies pour que tu t'amuses a lui en ouvrir de nouvelles? Attends au moins qu'il soit remis sur pieds, tu pourras toujours t'amuser à le mettre a mal a ce moment là, mais pour ma part.. je ne vais pas rester une semaine ici!"

Les poings sur les hanches, le regard sérieux et les sourcils froncés, Fréawine regarde furieusement Claira qui prend un air timide en caressant doucement le front de Chiron.

"Mais.. Mais... Il est tellement mignon quand il est blessé.."

"Ecoute ma jolie, toi ton métier c'est de faire des trous dans les gens, moi de les refermer ! Alors laisse moi finir et tu pourras t'y mettre!"

Chiron n'essaie même pas de prendre part a la conversation.. Ces deux là se connaissent tellement bien qu'il est plus dangereux de s'immiscer dans une de leurs conversations que de les laisser s'entretuer.


Il les écoute vaguement parler, et se rendort heureux... Encore un peu de repos..
 
Décade du Lapin [1]
Vieux Scooty
Un vent frais et le chant à l'intensité croissante des oiseaux du Loch Modan font sortir Chiron du sommeil. Père Soleil, dardant sa couronne de flammes à l'horizon, baigne doucement son corps d'une chaleur bienveillante, le couvrant d'une chappe de lumière.

Il s'étire doucement, tendant ses muscles durçis par une vie de voyages et de combats.

Brièvement, le souvenir de la Nuit lui revient à l'esprit, une nuit de caresses, de langeur et d'ardeur, de baisers passionnés et de morsures ennivrantes. Une nuit auprès de sa belle, sous l'Oeil malicieux d'Elune, près de la Caverne du Vieux Scooty, l'Ours Noir dont Chiron est grand ami. Une nuit de repos après une journée d'errance, une nuit douce et méritée après le combat et le danger. Toujours la même soif d'elle qui l'ennivre.. Toujours le même appel tous les soirs, comme un murmure.. Elle connait désormais les compagnons de Chiron, petits animaux ou insectes. Elle sait qu'il lui suffit de leur souffler un mot pour qu'ils le portent a Chiron, et qu'il vienne la rejoindre, l'enlacer, l'embrasser...


Elle est étendue, tout juste vêtue, sur la mousse verte recouvrant la roche dure et froide, ses petites mains de combattante posées contre son torse large, sa tête nichée au creux de son épaule, et sa respiration discrète, régulière, fait de son souffle une autre caresse dont Chiron se délecte.

Il regarde Père Soleil monter, lentement, dans l'Azur, déversant un torrent de lumière sur la roche surplombant le Loch où ils décidèrent la veille de s'endormir.

Elle geint doucement, lorsque les rayons brûlants se posent sur son visage angélique, arborant une moue qui illumine le visage de l'Elfe d'un sourire radieux. Elle se tourne un peu, se bloti plus au creux de son bras, à l'abri de cette lumière qui veux la faire sortir d'un univers d'où elle ne peux que partir a regrets. Ses lèvres entrouvertes se posent contre la peau de Chiron, l'effleurement délicieux à l'humidité savoureuse lui donne un frisson.

"Serais-je en train de me ramolir?" se dit il.
"Voilà que je me délecte de ses douceurs alors que je ne me sentais vivre que dans l'ardeur du combat..."

Il laisse passer quelques minutes encore, ainsi, puis avec une infinie délicatesse, il soulève la tête de sa belle, et s'extrait de son étreinte.

Une fois séparé, il affiche un vague air de regret, contemplant la jeune femme étendue, à l'air si douce et fragile. Il se relève, s'étirant encore une fois, et fait jouer ses muscles en s'approchant du bord du rocher sur lequel ils se trouvent, le soleil dans le visage.

La Nature, dans toute sa splendeur. L'astre solaire brillant sur la surface du Loch, l'herbe, le vent...

Il lève ses bras au ciel, le corps tendu, la tête relevée, et envoie une prière aux forces de la Nature et de la Vie, les remercie encore, de la force qu'elles lui donnent, d'avoir mis Claira sur son chemin... D'être là pour l'acceuillir chaque matin.

"Que ce monde est beau" pense t il.

Il se retourne, heureux, vers elle.

"Et qu'elle est belle...."

Il s'approche de son corps étendu, aux muscles fins, et le couvre de sa cape pour la protéger de la rosée matinale.

Puis il saute en bas du rocher, et se dirige vers l'entrée de la grotte.

Il émet un bref sifflement et attend que la masse sombre du Vieil Ours se profile dans la pénombre.

Chiron connaît bien le vieux scooty, mais il reste prudent tout de même. Il incline la tête légèrement dans sa direction, puis joint ses deux mains et les amène a son front. Fermant les yeux, il plonge en lui même chercher le pouvoir d'apaisement, et quand il sent la force se concentrer entre ses doigts, il les sépare doucement, canalisant l'énergie verte de la Nature en direction du vieil ours qui s'approche en grommelant. Une fois libéré, le pouvoir arrête brièvement l'animal, qui semble un bref instant hébété, puis qui vient en trottant jusque Chiron pour lui glaner une caresse.

Chiron s'éxecute avec le sourire, puis indique le rocher en surplomb à ce vieux camarade.

"Fais en sorte que personne ne s'approche de la haut, mon Frère. Je reviens."

L'ours acquiesce d'un grognement, et s'assied au pied du rocher, pour se dorer un peu au soleil levant en attendant le retour de l'Hommelfe.

Ce dernier, torse nu, fouille les abords de la couche de son aimée, à la recherche de baies et racines pour combler la faim que leur nuit n'aura pas manquée de faire naître. Il capture également quelques rongeurs pour le Vieil Ours, ainsi qu'une ruche débordante de Miel, qu'il ramène, souriant, enveloppé d'un ballet d'abeilles en colère de ne pouvoir stopper cet energumène dont la peau résiste à leurs dards. Il partage alors la ruche en deux, en donne une moitié au vieux Scooty, avec les quelques rongeurs que le vieil animal appréciera particulièrement. Puis il remonte s'asseoir auprès de Claira, de sa jolie Humaine, qui semble encore endormie, et pose délicatement son butin à côté d'elle, à l'ombre pour préserver sa fraîcheur.

D'une main légère, il caresse la chevelure de son aimée, la couvrant d'un regard qu'il veut le plus doux du monde.. Elle qui a sut trouver de la beauté en lui, là où il ne pensai pas que quelqu'un puisse en trouver.

Il amène ensuite sa main à son visage, et passe ses doigts le long des marques qui le parcourent, il sent sous ses doigts les rides, les affres de sa bestialité exprimée ainsi.. Le fruit corrompu de sa dévotion à sa nature primale... Le prix a payer pour sa force surhumaine, pour sa maîtrise parfaite de ses transformations.. Un bref instant, il ressent la honte de sa laideur l'envahir, de la peur que son visage inspire, du doute qui s'insère dans les gens lorsqu'ils voient l'inquiétante rage, presque malsaine, qui habite ses traits, lui qui ne vit que pour servir la Nature et ses Enfants.

La mélancolie le gagne doucement, son regard s'attarde encore sur sa belle endormie, celle qui lui susurre son amour sans se soucier de ses traits.

Il veux vivre encore, avec elle.. Il veux combattre, voyager.. l'aimer..

Il sent l'appréhension le gagner un peu, comme une peur de tout perdre.. Il repense à Talin, qui il n'y a pas si longtemps lui annonca qu'elle avait choisi Darek. Comme cela, sans explications, sans au revoir, sans.. Compassion. La douleur avait été grande, mais Claira soit louée, elle n'était plus. Il avait compris qu'il pouvait se reposer sur elle. Elle, fière, droite, attentive.. Elle a l'âme d'une louve, même si elle n'en a pas l'apparence.


Un bref instant, ses doigts passent sur le bandeau sombre qui couvre ses yeux.
Ce bandeau, fait d'étoffe runique enchantée, qu'il porte depuis si longtemps, et qu'il ne doit jamais enlever. Héritage étrange, promesse faite a son ancien maître de ne point l'ôter, devant aucun être pensant. Comme un pansement apposé sur une blessure de son âme, infectée, et dangereuse pour autrui. Il ne sait toujours pas exactement pourquoi il le porte..

Il était tellement jeune lorsque son maître lui banda les yeux, lui prouvant qu'il pouvait voir au delà de cette barrière opaque, et que quelque chose en lui était différent de ce fait. Chiron se doute bien, du moins suppose t'il, que cela est lié à la partie de son histoire qu'il lui manque, celle qui arrive avant la Caverne, avant les premiers souvenirs qu'il a de ce monde. Il sait que la Rage démesurée qui l'habite y est liée également, car c'est avec la croissance de cette dernière que se fit sentir le besoin pour son Maître de voiler ce regard, lorsque Chiron eût passé quelques printemps parmis son peuple en apprentissage.

Une Rage qu'il sait maîtrisée en partie, maintenant. Mais qu'il sait aussi impulsive, prédatrice, tapie dans l'ombre de son inconscient et prête a ressurgir, a reprendre le pas. Il le sait car il a senti, et vu, la lueur de son regard s'intensifier maintes fois, lorsque son désespoir ou sa peur, voire sa colère, ont surgit en lui.. S'intensifier jusqu'à briller d'une lueur inquiétante au travers du voile de tissu Runique Enchanté.

Comme quelques jours avant... Lors des derniers mots qu'il échangea avec Talin, lorsque le vertige fut tel qu'il oscilla un instant au bord du gouffre de son esprit, avant de se raccrocher à la main tendue, douce, mais ferme, de Claira.

La Main qu'il ne veux plus lâcher désormais.

La Main qu'il tient entre ses doigts longs et fins, et qu'il caresse amoureusement.

Elle dort, encore.. Chiron reprend le chemin de son esprit, presque à regret, afin de continuer le tri de ses pensées.


Il la trouve jeune, fraîche, vive. C'est aussi ce qui lui plaît chez elle. Mais qui l'inquiète un peu aussi. Elle lui fait une confiance aveugle, totale. Elle le suivrait jusque dans les gouffres infernaux si il la laissait faire. Impétueuse, oui. Elle se repose sur lui, mais il a peur de faillir un jour, d'être submergé par l'ennemi, et de la voir tomber, comme une fleur fânée ensanglantée.

Il voudrait lui enseigner ce qu'il sait du combat, l'accompagner à travers le Monde pour qu'elle forge son expérience avec plus d'aisance, accompagné d'un Chat parlant, d'un félin aimant, d'une Ombre protectrice et séductrice. Mais il la sait gaie, et insouciante, et il ne sait si elle voudra se battre ainsi, pour devenir plus forte, afin qu'il aie moins peur pour elle.. Afin de l'emmener partout avec lui, là où elle ne peut le suivre sans risquer sa vie à chaque inspiration. C'est une valeureuse combattante, une trancheuse de gorge redoutable, mais..

Il lui reste tant de combats a mener, afin de réaliser son potentiel, afin d'être peut être confrontée à cet Héritage qu'elle porte en elle, afin de veiller sur Chiron comme il veille sur elle, aussi..

Il regarde l'horizon, où Mère Elune disparut quelques heures plus tôt, et lui demande en son fort intérieur de ne pas faire de la jeunesse de Claira un obstacle à leur idylle naissante, de ne pas faire de leur différence d'âge et de force une raison de les éloigner.

Il rêve de Claira, combattant avec lui, dans un but commun, avec une envie bestiale de sang et de victoire, et il s'arrête, songeur..

C'est déjà ce qu'il vit, que lui faut il donc de plus?

Il lisse sa moustache, une manie qui lui revient chaque fois qu'il est plongé dans une intense réflexion.

Il repense, inquiet soudainement, aux nombreuses personnes qui comptent sur lui pour mille tâches qu'il ne peuvent accomplir d'eux mêmes, ou seuls. Il ne doit pas les oublier non plus, il est un Loup, Meneur Alpha qui plus est. Ses frères de meute, comme le reste du monde, du moins, ceux dont les intentions sont en accord avec celles de Chiron, comptent sur lui aussi.

Mais sa fidélité va à Claira avant tout, en ce moment. Il ne peut l'ôter de son esprit aussi facilement. Il a un peu peur d'être jugé, même si il garde le front haut et sait que ceux qui jugent la pureté de son coeur en manquent bien souvent.


Il grogne vaguement, se mordant la lèvre de nourrir des pensées sombres encore une fois.

Le cynisme qui d 'ordinaire l'emplit et le régale a un goût souvent amer, maintenant qu'il connait Claira.. Il s'en faudrait de peu qu'elle n'arrive à l'amadouer pour de bon !

Survivra t'il à la perte de sa sauvagerie, de son indépendance, si un jour cela devait arriver.. Y survivrait t il quand bien même ce serait pour elle?


Il ne le sait, mais n'en a cure pour l'instant. Ses doutes n'ont probablement pas lieu d'être, et même si ces pensées hantent parfois son coeur, il a fait son choix.

Et c'est un choix ferme.

Aussi vrai qu'il se sent vivre pleinement hors des villes, sous le ciel d'Azeroth, il a décidé de chèrir une Humaine, Claira, et de vivre cela sans se poser de questions. Il sait que toutes ses craintes disparaissent toujours lorsqu'il est dans ses bras, et que..

"Mmmmmm mon aimé? Tu es réveillé?"

Elle se retourne vers lui, ouvrant un oeil prudent face à la clarté environnante, et trouve son regard, tendre et profond, pour peu que deux lueurs brillant au travers d'une étoffe runique puisse l'être, posé sur elle.

Le sourire qui éclaire le visage de Chiron lui dit alors mieux que tous les mots du monde, a quel point il l'aime.

Le Vieux Scooty salue d'un grondement l'étreinte qui s'ensuit, et les flots de baisers fiévreux qui occupent alors les deux bipèdes, et s'en va maugréant vaquer à ses affaires..En espérant au fond qu'à son retour les deux importuns sans poils seront partis.


(Mais seule la suite lui apprendra.)
 
Ère du Conflit [9]
Lune de la Force [4]
Décade du Panda [3]
Celle qui marche dans les Ombres - Claira
Elle se réveille brusquement, le cœur battant, la tête lourde. Elle a encore en bouche un goût désagréable, une angoisse sourde mêlée d'une vague colèreLes événements de la nuit précédente lui reviennent en mémoire, avec une acuité douloureuse, et commence alors en elle le lent ballet des regrets et des hésitations.

Elle se rappelle son impatience fébrile, son ennui, la difficulté qu'elle avait à simplement tenir en place ; elle se rappelle son léger agacement, à lui, en dépit de ses gestes tendres, ses nouvelles réserves, ses questions, sa distance malgré leur lien de chair. Elle se rappelle ses questions.. Et de sa réaction à elle, incontrôlée, trop vive.

Elle est d'abord partie dans les plaines, avec l'intention ferme de chasser jusqu'à l'épuisement. Mais de détours en rencontres, elle est vite redevenue féroce, capricieuse, agressive et hautaine avec un groupe de jeunes gens qui la suivirent un peu. Elle n'arrivait pas à l'effacer de ses pensées, le creux de son absence lui ôtait toute volonté, et lui qui murmurait toujours à son oreille, envoyant ça et là ses petits messagers.

Le malaise de ces derniers jours s'appesantit. Certes sa vie est plutôt douce, facile, mais les éclats de grâce se sont plus rares, plus fugaces. Sa solitude choisie commence à lui peser ; « où est le choix d'ailleurs, se met elle à penser, alors que je m'entrave moi même, avec mes propres liens ? Alors que j'ouvre les bras à une servitude chérie, oui, mais peut être nocive ? » L'amour la rend soucieuse, inconstante, et même insatisfaite, parfois.

Elle qui proclamait, il n'y a pas si longtemps, qu'elle ne se lierait pas, ou plus, ou bien différemment Mais cette urgence, cette envie absolue, cet amour comme un gouffre commencent à l'effrayer. Elle se sent reculer à mesure qu'elle se voit, déjà, prise au piège.

Elle se lève d'un bond. Encore cette ville, Ironforge, toujours cette ville, qui les attire comme un aimant et les repousse en même temps, un lieu de passage et de transition où s'exacerbent les tensions, où les insultes fusent Cet endroit, elle y a passé trop de temps. Sous prétexte de le voir, lui, Chiron, elle a oublié ses envies, les a laissées s'enfuir, s'étioler, redevenir pâles. Elle a toujours été terne, pense-t-elle, à l'ombre d'un seul homme... Avant de s'ébrouer, et de reprendre son souffle : il n'a jamais, jamais, été pesant pour elle, ce druide qu'elle ose, à présent, nommer son compagnon.

Ses frères de cœur lui manquent ; certains des Héritiers se tiennent encore debout, dans l'ombre, et l'appellent doucement. Leurs routes se sont finalement séparées, mais leur marque reste sur le front de Claira, comme un emblème ou comme une trace de sang. Les HéritiersElle se souvient encore des mots de la Gardienne, qui racontait leur histoire

« Apres plusieurs années de loyaux services, Aegwyn et les gardiens de l'Ordre de Tirisfal en vinrent à réaliser qu'il leur faudrait un jour combattre Sargeras. Le conseil fut alors déchiré en deux, entre ceux qui souhaitaient former d'autres héros pour créer une armée plus puissante, et ceux qui souhaitaient donner tous leurs pouvoirs à Aegwyn.

De violents débats eurent lieux, chacun étant convaincu de prêcher la bonne parole. Finalement, la majorité choisit de donner les pleins pouvoirs à Aegwyn. Convaincu que l'Ordre était sur le point de commettre une énorme erreur, le groupe minoritaire s'exclu lui-même de l'Ordre et décida de former une armée parallèle, qui combattrait les démons. Ils en seraient les soldats

Pendant plusieurs années ils s'exilèrent au loin, dans le nord glacé de Northrend. Leur entraînement achevé, ils revinrent trouver le monde des Hommes. Ils y apprirent que Sargeras avait été défait, mais que son esprit habitait et contrôlait maintenant le fils d'Aegwyn, Medivh, à qui avaient été confiés tous les pouvoirs de l'Ordre de Tirisfal. Les exilés choisirent alors de se nommer eux mêmes «L'armée de l'Ombre» ; ils commencèrent une guerre secrète et souterraine, à la fois contre les démons et contre l'Ordre de Tirisfal, afin d'affaiblir Medivh et de pouvoir le combattre.

L'armée de l'ombre finit par être découverte : elle fut condamnée par le Royaume de Stormwind, puis par toute l'Alliance, pour ses agissements jugés hérétiques. Ses membres furent traqués et décimés sans ménagement. L'armée de l'ombre finit par disparaître presque complètement »

Mais ceux d'entre eux qui demeurent, leurs descendants, leurs Héritiers, conservent à l'esprit qu'ils furent les vrais héros de la guerre contre le Fléau. Ceux d'entre eux qui restent se sont finalement regroupés, pour un temps, au sein d'une alliance fragile, autour d'une même solitude, d'une même envie de revanche, d'un même rejet des allégeances aveugles.

Claira sait bien que son temps est venu. Elle sent son impatience et sa fougue rugir dans son sang. Elle a depuis longtemps deviné que la nouvelle armée, réunie autour de ses enfants, ne pourra pas tenir dans un monde divisé par les guerres de clans, et par les nouveaux dieux : cupidité, honneur, dévotion fanatique.

Elle a choisi son camp, celui de l'observation – à distance. Elle a choisi de défendre, sans pitié, et fait déjà partie de l'armée de l'Alliance ; mais elle se refuse à punir, à chasser sur leurs terres ceux dont on doit encore se rappeler.
Elle sait que son amour pourrait l'accompagner, qu'ils partagent les mêmes idéaux et les mêmes croyances, mais il est chef de clan, et doit d'abord veiller sur ceux qui l'ont élu.

Elle peut rester dans l'ombre alors, à ses côtés ; s'entraîner et se battre, s'améliorer sans cesse pour pouvoir protéger son hommelfe et les siens ; être fidèle, jusqu'au sang, à son ancien serment de défendre les terres ; être fidèle, à compter de ce jour, à sa nouvelle mission : aimer cet elfe, du mieux possible, sans s'oublier elle même, sans se perdre de vue.
 
Aux portes de Stormwind
Stormwind.

Nouvelle capitale du Peuple Humain, refuge des derniers survivants de l'humanité lorsque la belle Lordaeron tomba, symbole de la puissance et de la justesse des Hommes. Ville phare, fleuron de l'architecture des Hommes et ode à l'Alliance des Peuples Libres.

Chiron aime bien cette ville. Peut être parce que malgré la Pierre et le Fer, et la brume étouffante recouvrant le Quartier Nain, elle reste un symbole de beauté, et de paix.

« Tant qu'on ne croise pas trop de Paladins en rût» se dit il en souriant.

Il est appuyé contre la paroi du mur jouxtant la niche des griffons, et mordille un brin de feuillargent en regardant d'un air mélancolique la superbe allée des Statues de Stormwind. Son regard s'arrête un peu sur celle de Tyrande, la grande Prêtresse d'Elune, Gardienne de son Peuple depuis des Millénaires.


Le Griffon de Claira choisi ce moment pour surgir dans l'espace exigu du bord du rempart, soulevant un nuage de poussière de ses battements d'ailes puissants, ponctuant son arrivée d'un piaillement à destination de son Maître qui s'approche alors, saisissant la bride pour laisser l'Humaine descendre.

Claira saute prestement de sa selle, et s'approche de Chiron, un sourire aux lèvres. Elle est vétue de son armure de cuir, signe qu'elle n'a pas eut le temps de se changer, ou qu'elle ne l'a pas voulu. Chiron n'y fait même pas attention, ses yeux sont rivés sur les deux émeraudes brillantes qui le regardent d'un air malicieux.

« Bonjour, vous. » Dit elle en souriant.

Comme toujours, l'éclat pétillant de ses yeux cherche quelquechose, comme un signe Et ne le trouve pas, se heurtant à la barrière opaque du voile de Chiron, et à l'inquiétante lueur brillant derrière.

Chiron choisi ce moment pour se fendre d'une courbette à la mode Humaine, otant son chapeau dans un mouvement ample et le faisant balayer le sol aux pieds de la belle.

« Madame, mes hommages ».

Ils se regardent, se jaugent un bref instant.. Puis le sourire qui illumine leurs visages en même temps les fait éclater de rire.

« Mon Chiron.. » dit elle en s'avancant, haussant légèrement ses sourcils en une moue délicate.

« Ma Fleur de Feu ! » tonne t il alors en la saisissant a bras le corps, et en la levant vers le ciel pour se repaître de l'éclat de son sourire, insensible aux regards qui se tournent alors vers, eux, suspicieux ou étonnés.

Un Elfe et une Humaine..

Depuis des semaines qu'ils se cotoient, ils ont pu voir à quel point la non-conformité peut être source de discrimination.
Ils se sentaient tellement bien, puissants, invincibles ; ils affichèrent leur amour mutuel devant les autres, n'hésitant pas à se dire toute la tendresse qu'ils s'inspiraient, ou parfois la dévorante envie de l'autre qui montait, et .. ils reçurent par le chemin de la jalousie l'intolérance et la critique. Entre les Elfes qui s'indignaient que Chiron ne se soit épris d'une Humaine, qu'il gachait sa vie de la sorte, et les Humains belliqueux qui ne virent là dedans qu'une pierre de plus à apporter à l'édifice de leur rage contre les Enfants des Etoiles, Chiron eut moultes fois l'occasion de paniquer, brièvement, quand au droit des Peuples Libres à mériter la Paix et l'Amour.

Il se souvient encore, avec amertume, d'une Assassine dénommée Diiamonseth. Une Elfe de peu de foi, cruelle, hypocrite. Comme toutes les Elfes imbues d'elle-même, mais elle était du genre à papilloner comme une gentille petite fille pour se faire remarquer des Héros d'Ironforge, alors que sa cruauté et sa méchanceté sont sans égales. Chiron eut un jour à affronter cette Démone dans l'Arène, lors d'un Tournoi. Elle utilisa la subversion pour distraire Chiron et disparaître de sa vue avant le début du combat, s'assurant ainsi une victoire aisée. Cette même cruelle, qui se permit des familiarités intolérables par la suite, osa un jour demander à Chiron s'il était malade d'aimer une Humaine. Il ne comprenait pas l'attitude de cette Femmelfe, tantôt moqueuse et hautaine, tantôt intéressée et avenante.


Chiron se dit que cet exemple n'en était qu'un parmi tant d'autres, mais lui faisait comprendre à quel point sa relation avec Claira suscitait Envie et Jalousie. Lui qui croyait que les gens ne se souciaient que de leur petit monde, il avait oublié que c'était exception faite des méchancetés gratuites qu'ils pouvaient se permettre.



Il se souvient aussi, quelques temps plus tôt, d'une promenade qu'ils firent dans la Forêt d'Elwyn, profitant de la fraîcheur du printemps pour savourer la majesté des Arbres et de la faune. Chiron avait découvert à quel point Claira était spéciale, elle chérissait la Nature, ainsi que milles choses que Chiron pensait réservées à quelques rares Elfes de la Nuit, cela ne la rendait que plus précieuse à ses yeux.
Ce jour là, ils marchèrent, côte à côte, enlacés, le long du chemin allant à Goldshire. Sur la route, ils croisèrent un Paladin, vétu d'une armure étincelante et fardé d'une immense arme que Chiron ne connaissait pas, accoutré comme s'il était prêt à ce qu'une attaque aie lieu à tout moment . Il noyait de paroles une jeune femme, vétue d'une simple robe blanche, au sujet de la pureté, de la nécessité de protéger Northshire envers et contre tous, et de répandre la Lumière..

Lorsque Chiron et Claira passèrent près d'eux, ils ne purent s'empêcher de plaindre la petite qui écoutait attentivement, et l'Homme, qui se prétendait servant de la Lumière, leur asséna une cinglante réflexion, arborant son nom comme un étendard de Guerre.

« Halte là, vous deux ! Je suis Blasius, Haut Commandant de l'Ordre de Northshire et Défenseur du Bien ! Je ne veux pas voir d'Elfe dans les parages, ces terres sont sous ma protection, retournez donc arpenter VOS forêts. »

La phrase frappa Chiron comme une masse. La Colère était déjà dans tout son être. Il s'était retourné, lentement, et avait répondu en contrôlant sa voix à grand peine :

« Sache, Humain, que j'ai fait de toute terre mon royaume ! Je suis un servant de la Nature et tant qu'il y aura des Forêts je les arpenterais pour être sur que les fous dans ton genre leur accorde le respect qu'ils leur doivent. »

L'Homme avait alors planté son arme dans le sol, comme un défi.

Chiron l'avait relevé, malgré les protestations de Claira, malgré ses tentatives de raisonner ce fanatique abruti.


L'issue du Combat ne faisait pas de doute. La Puissance de l'Homme, qui était un Paladin, était bien supérieure à celle de Chiron, qui se battit vaillamment pour lui tenir tête, mais succomba lorsque l'Humain fit appel à la puissance de son Dieu pour refermer toutes ses plaies. Lorsqu'il vit le Paladin soigné miraculeusement de toutes ses blessures, il posa un genou à terre, résigné, et attendit le coup de grâce. Ce fut Claira qui s'interposa pour stopper le Paladin, assoiffé de sang, avant qu'il n'achève le pauvre Elfe endolori.

Il cessa alors son assaut, se gaussant de sa victoire et en profitant pour cracher tout le venin qu'il avait dans sa gorge, chassant les deux « intrus » en gonflant la poitrine, fier de l'exemple qu'il montrait à la jeune aspirante de son ordre. Chiron avait hésité à demander revanche, sachant pertinemment que ces Paladins ne pouvaient faire appel à la Puissance de leur Dieu à volonté, il savait qu'il sortirai vainqueur d'un deuxième affrontement. Claira lui susurra son amour à l'oreille pour l'aider à surmonter sa rage, et le faire partir loin de l'endroit.

Encore une preuve de jalousie, le Paladin n'avait pu s'empêcher de se moquer de Claira, comme elle pansait les plaies de son hommelfe. Un sôt, ignorant, le genre de poids qui pèse sur la conscience du monde.. Et répand plus aisément l'hostilité et la rage que la paix et l'amour.


Son esprit revient à la réalité comme il ressent le corps de sa chère compagne contre le sien.

Il ne se lasse guère d'elle, toujours fraîche, vive, comme un ode à la bise qui souffle et au printemps qui fleurit ; il ne cesse de repenser à sa nature d'humaine et ne cesse de se surprendre à la trouver délicieusement féérique, presque.. Elfique. Alors qu'il a l'impression que nombres de ses frères se comportent comme certains Nains, avides ou avares, moneyant, se pavanant ou commerçant sur la place d'Ironforge les jours d'Enchères.

Il ne s'en lasse point, il se sent toujours sauvage et furieux, doux et aimant.

Il se sent fort.

« Tu me suis, Chichi ? » dit elle.

Il s'apprête à grogner pour lui répéter sa désaprobation amusée des sobriquets de ce genre, mais son souffle est immédiatement coupé par le bond que l'agile roublarde fait alors au dessus du rempart, décrivant un arc-de-cercle dont la trajectoire termine entre deux rochers du bord des douves.

C'est en un éclair qu'il réagit alors, il sait ne rien pouvoir faire, qu'elle ne devrait pas faire ce genre de choses, il a beau désapprouver totalement encore ce genre d'élans, il ne peux s'empêcher de sourire comme il s'élance au dessus du rempart à son tour - déjà sous la forme de Mère Panthère - et saisissant d'une poigne mentale le Talisman du Lion de Mer, présent initiatique des Druides, en lui insufflant sa volonté d'être son avatar à son entrée dans les flots.


Il la cherche, fendant les flots de son corps musculeux, tournant dans la pénombre des eaux boueuses, et elle surgit, de nulle part, s'accroche à son cou. Il la devine hilare, il sourit et la tracte comme un fétu de paille vers la rive, vers les portes de la Ville, vers la forêt d'Elwyn. Il sait qu'elle a envie comme lui de parler encore, de se voir, de se toucher et se sentir.

Ils s'asseyent, à même l'herbe, juste au dehors des murailles, près d'un arbre. Chiron prépare un feu, comme ils discutent paisaiblement.


C'est presque comme un bourdonnement qui leur parvient alors aux oreilles, changeant rapidement en quelque martèlement sourd et rythmé.

Il sent immédiatement la Nature autour de lui inquiète, oiseaux muets, rongeurs terrifiés, même les arbres retiennent leur souffle comme quelque sinistre créature s'approche. Il sait alors que quelque chose de terrible va se passer.

Il se tourne pour prévenir Claira, mais celle ci est debout, la tête légèrement relevée, focalisée elle aussi sur ses sens. Elle lui fait signe de garder le silence. Il la regarde, fier de voir sa réaction immédiate, surpris qu'elle réagisse comme lui, d'un même élan, comme ils se fondent dans les ombres d'un bosquet proche. Ils apercoivent des gens, l'air affolé, courir en direction des murailles.

Claira s'avance, passe de fourré en fourré, et longe la route en s'enfonçant dans les bois.

Chiron appelle alors à lui un oiseau apeuré niché plus loin, l'apaise, et l'envoie porter un message à Grisemine.

« Va trouver le Mage Gnome portant le symbole de l'œil, mon petit, dis lui de quérir la Meute et de me rejoindre, il va se passer quelque chose de grave dans peu de temps.»

L'Oiseau s'enfuit alors dans les airs, revigoré d'une mission l'amenant loin d'ici.

Chiron s'élance à la suite de Claira, se laisse tomber en avant en adoptant l'aspect du Félin comme il accélère sa course en foulées rapides et la voit, immobile, un air interdit, adossée à un arbre. L'expression de son visage pousse Chiron a se plaquer immédiatement au sol. Il avance discrètement jusqu'à elle, et voit ce qui fait couler une larme sur son visage.

Le village de Goldshire, dont ils discernent au travers des branches la cheminée de la forge, est en flammes.

La Horde est en train de marcher sur Stormwind.

Il la regarde, muet, et elle lui rend le même regard. Ils sont frères et s'en rendent coompte peut être pour la première fois avec autant d'évidence. Sans paroles, sans concertation, ils se dirigent vers la village d'où les roulements de tambours leur parviennent, décidés à faire tout leur possible pour frapper leur arrière garde au moment opportun.

La voix de Grisemine résonne alors dans son esprit :
« Ola, Chiron ! Y'a du grabuge ! Branle bas de combat, les Mages Humains signalent que Goldshire est en flammes. »
« Je viens d'envoyer quelqu'un te prévenir, mon ami, je suis sur place »
« Par le Grand Artisan ! J'arrive immédiatement, toute l'alliance est appellée ! »
« Faites vite, c'est tout. »



Lorsque la vague des quatre ethnies ennemies arrive aux portes de la Ville, les quelques braves qui se tiennnent devant le pont bordé des Statues symbolisant la puissance de l'Alliance savent que la bataille va être terrible.

La charge qui s'ensuit noie alors Chiron, Claira et les autres dans un maëlstrom furieux de rage déchainée.
 
Dans les steppes.. - Claira
Claira s'étire et fait jouer ses muscles, s'avance de quelques pas pour contempler, à ses pieds, l'immense désert de sable où elle vit ces temps ci.

Plusieurs lunes se sont écoulées depuis sa promesse à Chiron. Il lui a présenté son clan, ses frères, ses loups, et dans la chasse ou au coin d'un feu, elle a appris à les aimer comme siens.

Elle se redresse encore, et tire ses lames de sa ceinture pour les observer au soleil. Chaque jour qui a passé loin du bruit de la ville a renforcé, encore, son goût pour l'aventure, les chevauchées solitaires, les traques silencieuses. Elle a fait la rencontre de plusieurs alliés, en cette quête de sang frais et de violence sourde; ses compagnons nouveaux partagent ses campagnes, ses longues promenades aux quatre coins d'Azeroth, mais lui font également apprécier, à nouveau, une solitude choisie, préférée, chérie.

D'un geste vif, elle chasse de son esprit les pensées qui l'occupent Elle s'est jetée dans la Meute un peu comme un chien fou, fébrile et impatiente. Elle n'a pas résisté à provoquer, parfois, les réactions de ceux qui l'impressionnent, la jaugent d'un regard exigeant. C'est une assemblée de solitaires, attentifs, en retrait, mais impitoyables et rapides aussi dès le moindre faux pas. Et elle est arrivée avec, dans ses mains nues, son serment à leur chef, son dévouement et sa foi, avec sa fierté ombrageuse et son rire moqueur, ses qualités de Femme et ses défauts d'Humaine Elle s'est présentée devant eux avec encore en mémoire le clan des Héritiers, les liens profonds et sombres entre certains d'entre eux, et elle a du rappeler tout son amour pour Chiron pour ne pas fuir, à toutes jambes, à grand galop, une alliance nouvelle qui la contraindrait trop.

Plusieurs lunes se sont écoulées depuis sa promesse à Chiron, et tout ce temps qu'elle lui a donné d'elle, toute cette énergie, l'épuisent – même s'ils font son bonheur. Claira est très Humaine, trop humaine, pense t-elle, et nombreux sont ceux de sa race qui doutent ou remettent en question son alliance avec le Shan Chiron. Nombreux sont les guerriers, ou compagnons d'un soir, qui pensent la séduire sans efforts, sans manières, n'accordant qu'un coup d'œil à l'elfe druide discret, félin, qui se fond comme une ombre dans son sillage à elle. Ils ont vu également, l'un et l'autre, le mépris des autres Elfes, leur froideur hautaine, leur désapprobation devant le couple que forment Chiron et sa rôdeuse.

Avec une légère grimace, Claira se remémore la rencontre de Leilith, la Maîtresse des Ombres du clan qu'elle a rejoint ; une elfe dure, belle comme la lune, froide comme ses rayons mêmes, et tout à fait hostile, d'abord, à cette Humaine qui adoucit leur chef et le rend moins sauvage. Claira esquisse un bref sourire, se rappelant ses efforts pour l'amadouer, ses nombreux impairs et faux pas, les coups de griffe de l'elfe devenue, peut être, sans doute, sa sœur et son amie. Leilith, Leilith, dangereuse et cruelle, gardienne de la Meute tout autant qu'assassin, ennemie impitoyable et tenace, et dont l'amitié compte tellement, désormais, aux yeux de Claira

Fidèle à sa parole, elle a rejoint le clan de son hommelfe, qui l'a donc acceptée. Elle ne se sent pas tout à fait, pas vraiment, pas encore, comme chez elle avec eux, mais elle se donne le temps de les apprivoiser, et de reprendre son souffle.

Elle penche un peu la tête, offrant ainsi son visage aux premiers rayons du soleil.
Ici, à Tanaris, sa vie est sans questions, sans vagues. Elle trouvera toujours un mercenaire, un chevalier, pour l'escorter en chasse. Elle sait la forêt toute proche, au delà des collines, au milieu du cratère, et sent déjà en elle l'appel du sang, l'excitation de la traque et du feu, l'odeur du cheval et du cuir qui ne la quitte pas. Elle détourne les yeux vers le guerrier qui dort, encore, la main sur son épée, au campement de fortune qu'ils ont dressé la veille. C'est un ami fidèle, un allié, un de ces rares hommes au cœur noble et presque désintéressé qu'elle ait pu rencontrer en ces temps de guerres d'honneur, de revanches et de duels. Lenax, l'Humain qui la désire sans pouvoir la toucher, et qui pour un temps a choisi de rester avec elle, et de la protéger. Elle le protège aussi, sans qu'il le sache, à sa manière, voyant tourner le vent et sentant avant tous les bruits portés au loin, les rumeurs, les odeurs de feu et d'acier lourd. Elle veille sur lui en scrutant l'horizon, lui accordant quelques minutes encore avant le réveil, la course, et son désir à lui qui est son pire ennemi.

Comme les Humains sont faibles, pense t elle, noyés dans leurs contradictions, leurs drames, leurs luttes incessantes. Comme les Humains sont forts, avec toute leur foi, leurs espoirs lumineux, leur enthousiasme fou. Avec leurs mains qui s'ouvrent, parfois, et leur cœur qui est fait pour aimer, et chérir, et défendre.

Claira devine qu'elle devra le quitter, ce guerrier à la fois si fort et si fragile, qui ouvre déjà sur elle un regard plein d'espoir. Elle rejoindra peut être ses anciens compagnons, elle préfère pour l'instant se tenir à l'écart du bruit et de l'agitation, des groupes d'aventuriers, et des rassemblements. Comme Lenax s'éveille, elle siffle son cheval pour aller, rapidement, rejoindre le village voisin.

Dans cette cité de terre se croisent, dans une paix relative, dans un calme apparent, un peuple d'aventuriers, elfes et orcs, mercenaires humains et taurens. Tranquillement, Claira gagne l'auberge, salue d'un signe de tête les voyageurs qu'elle croise souvent ici, sourit à quelques uns.

Son regard s'illumine à la vue du courrier qui l'attend. Une lettre de Chiron, délicate attention, murmure à son cœur des merveilles secrètes Et une brève note lui souffle une envie de voyages, un avant goût d'aventure, et un nouveau projet vers lequel se tourner : un elfe rôdeur comme elle, drôle et mystérieux, un peu sauvage aussi, lui propose de le rejoindre dans les terres du nord pour remplir une mission périlleuse, tentante. Elle n'hésite qu'un instant, retourne hors des murailles, et se trouve happée, à nouveau, par ce vaste paysage brûlé par la chaleur.

Lenax arrive sans se presser, tranquille et sûr de lui, et lui lance en souriant le reste de ses sacs, qu'elle lui avait laissés. Il la devine déjà presque sur le départ, les yeux tournés au loin, silencieuse et tendue. Il se moque, doucement, de son regard perdu, des phrases qu'elle n'achève pas toujours, de ses mains qui s'agitent. Elle lui sourit encore, elle sait qu'il la comprend, lui qui est solitaire par choix – sans clan et sans patrie, attaché au désert parce qu'il est un pays sans paroles inutiles.

D'un regard, ils se remercient et s'inclinent; ils ne se sentent à l'aise ni l'un ni l'autre pour se faire leurs adieux, et savent qu'ils se reverront, peut être, si Claira le décide.

D'un geste souple, elle enjambe le gryphon, et consulte sa carte pour choisir sa route. En pensée, elle a déjà rejoint celui qu'elle nomme en se moquant son elfe joli cœur, Maijstral, voleur, compagnon curieux et secret. Le vent siffle sur son visage, par à-coups, à mesure qu'elle s'éloigne du sol. Cette journée s'annonce longue et pleine de promesses, et l'excitation la reprend, à lui faire battre les flancs de la bête, presque, ou tout du moins souhaiter que le temps s'accélère et qu'elle arrive enfin.
 
Décade du Gorille [1]
Feralas
Feralas est une des dernières grandes forêts d'Azeroth, vestige de la gloire passée de Mère Nature. Ses arbres millénaires dont les branchages donnent l'impression de toucher le ciel rappellent à tous les voyageurs de cette contrée combien ils sont peu de choses.

La Nature ici est encore très sauvage, brute, donne l'impression d'avoir survécu à toutes les guerres sans même retenir son souffle, sans s'arrêter d'être pleine, absolue, majestueuse.

Il n'y a pas de mots pour décrire le bien être que Chiron éprouve en ces lieux.

Il lui suffit de respirer pour savoir quelle est sa place ici. Il est parmis les siens, fidèle servant de la Nature, et la forêt le lui rend bien. Tout l'environnement semble en harmonie avec son âme, les animaux sauvages le connaissent et le respectent. Ils savent qu'il a combattu pour repousser les Ogres des Plateaux Venteux, qu'il a traqué les Hurleurs des Vallées, afin de capturer - de manière très humble, rituelle - leur esprit ancien, vestige d'un pouvoir étrange et partie intégrante de l'equilibre de la Terre.

Il a affronté les Nagas, ces êtres effrayants, reptiliens et cruels. Ces êtres qui sont le reflet de ce que la soif de pouvoir peut provoquer comme conséquences. Il les déteste particulièrement, parmis toutes les créatures malignes qui peuplent les continents - car ils sont le symbole de la déchéance de son peuple, une des pièces expliquant le puzzle de la perte de l'immortalité des Enfants des Etoiles. Il ne sait que trop que peu de gens - même parmis ses frères - connaissent l'histoire des Nagas. Trop peu savent qu'autrefois, il étaient des Elfes Nobles, savants, qui finirent par être corrompus par le savoir qu'ils poursuivaient sans jamais être rassasiés. Il sait tout cela, et éprouve même de la pitié pour les Hommes Lézards, mais cela ne fait que le remplir de mélancolie lorsqu'il fait son devoir de Druide - et d'Elfe - en les affrontant partout où il les rencontre. Parfois, lassé des combats, il se laisse rêver et tente de leur pardonner, en laisse un fuir, dans l'espoir qu'il soit touché par autre chose que de la haine et de la rage. Comme si cela pouvait changer leur situation, relever leur malédiction, leur rendre leur apparence et leur coeur d'Elfe.

En Feralas, les Nagas sont relativement peu nombreux, contrairement à certaines régions dont ils infestent les moindres recoins. Certains errent près des ruines du sud de Feathermoon, lorsque la marée monte et qu'ils peuvent sortir de leurs grottes sous marines pour aller traquer, à la recherche de sang frais.


Il se sent chez lui dans cette forêt.

C'est une région paisible, éloignée de tout, dont certains recoins sont particulièrement dangereux, mais où si peu de gens viennent troubler la tranquilité des lieux que l'atmosphère reste sereine et rassurante. Du moins pour un Homme sauvage.

Ou un Druide - un de ceux qui sait parler aux animaux et aux plantes, lire les mots que la Forêt grave dans la Terre. Et entendre les murmures du vent dans les feuillages lui raconter ce qui se trame sous la voûte courbée des arbres, et jouer avec les êtres sylvains, et conter ses voyages aux oiseaux et aux rongeurs qui se serrent autour de lui lorsqu'il est seul, près de son feu, noyé dans la pénombre majestueuse des nuits printanières.

Il aime a venir se ressourcer ici, cela lui rappelle sa condition d'Enfant des Etoiles, de protecteur de la Beauté et de la Vie. Cet endroit symbolise tout ce pour quoi il se bat. L'Equilibre naturel, simple, dans toute sa puissance et sa splendeur - celui qui se passe de tout commentaire, celui qui était là avant les Hommes et sera là, peut être, après leur chute.

Celui que les Titans décidèrent de faire réguler le souffle d'Azeroth.

Chiron a voyagé, comme beaucoup, mais il se plaît à croire qu'il est un des rares véritables pionniers, de ceux qui s'aventurent dans des régions ou chaque pas est une menace de mort, afin de tracer des chemins vers de nouveaux lieux, de nouveaux paysages, de nouveaux secrets, et partager son savoir avec quiconque le nécessite, du simple voyageur désirant éviter une mort certaine jusqu'aux nobles aventuriers investis d'une mission et nécessiteux de précieuses indications.


Il plonge les yeux dans les braises rougoyantes - qui lui rappellent la lueur de ce qu'il essaie d'appeller son regard, les rares fois où il eut le malheur de se contempler dans un miroir. C'est comme une fine neige qui s'envolerait au lieu de tomber, légère et virevoltante.
Quelques compagnons animaux sont avec lui, ceux qui aiment la nuit surtout, il devine la présence de certains d'entre eux, partage la chaleur du feu avec certains autres, sourit aux voix des derniers qui se répondent dans la pénombre.


Laconique, il se rappelle ses combats, ses souffrances, ses petits plaisirs aussi - de Guide, de Druide ; lorsque certains placent leur vie entre ses mains pour qu'il les mène dans certains des dongeons les plus lugubres d'Azeroth. Il fait partie de ces aventuriers, émerveillés par les richesses, qui rassemblent une poignée de braves pour partir dans des expéditions longues et épuisantes - se bat pour ordonner les choses et tenter de faire de la plus maigre des chances une possibilité de succès. Il sait qu'il le doit grandement à son fidèle allié, confident et ami, Grisemine, qui a partagé ses joies comme ses peines, oreille amicale, ouverte sur un esprit simple et joyeux - le pragmatisme toujours positivement réconfortant du petit peuple. un Mage redoutable aussi, dont il connaît très bien le point de vue sur le pouvoir magique et dont il ne s'inquiète plus - si ce n'est qu'un jour il risque de réussir à trouver un moyen magique de séduire, ce que Chiron essaie de lui ôter de l'esprit depuis longtemps.

Il enfonce un bout de bois calciné à la base du brasier qui lui sert de porte sur le royaume de son esprit, il lui est plus facile de se sonder lorsque rien ne vient le déranger - loin de tout, les yeux dans les flammes dansantes.

Il sourit, repensant à ses combats avec Grisemine, le premier d'entre eux surtout, lorsqu'il traversa la Grande Mer alors qu'il n'était qu'un apprenti Druide, ne connaissant pas encore sa première métamorphose - voyage enchanteur et dangereux, où il compris que l'essence de son être résidait sur la route qu'il faisait, seul avec son âme et les dangers alentours.

Le temps avait passé depuis, il avait grandi, en sagesse et en puissance aussi.

Mais la soif de l'aventure l'habitait toujours, le plaisir de partager son savoir aussi.

Il pense à L'Oeil du Crépuscule, sa meute, qui est là, silencieuse, en attente, observant et jugeant - avec tolérance - le monde qui l'entoure. Une entité patiente et curieuse, une Ombre en devenir qui gagne en substance alors que le temps avance, sans savoir quelle forme elle décidera d'adopter.

Oui il les ménera dans les lieux de pouvoirs qu'il a visité, il les mettra en garde contre la soif de puissance, puis il les laissera se gorger de trésors, goûter le frisson de la Magie et du Savoir - avant de leur rappeller que tout cela n'est qu'illusion et doit servir un idéal supérieur.

Claira, dont il ne peut s'empêcher la comparaison avec la Fleur de Feu - surtout seul face au bois qui brûle - délicate et flamboyante, piquante et acerbe, douce et avide, généreuse et rieuse. Claira, qui est devenue une autre partie de lui même - plus peut être qu'une compagne, il ne le sait pas encore - en rejoignant l'Oeil. Il se demande presque qui a rejoint qui, tellement les choses furent naturelles. Elle lui avait laissé son journal, un jour, dans une cache connue d'eux seuls, et il l'avait lu et relu, comprenant à grand peine à quels points leurs besoins étaient proches, croyant parfois lire dans sa prose l'expression de son âme, de certaines de ses craintes, et de nombre de ses envies.
Claira, ce soir encore si lointaine, de l'autre côté des Montagnes, loin à l'Est vers une Jungle ancestrale en bordure d'un désert arride et dangereux qu'il connait et aime tant - Tanaris.

Claira, dont le goût des lèvres ne le quitte pas, dont le rire reste gravé dans son esprit et accompagne le chant des oiseaux le matin, lorsque la rosée le tire du sommeil.

Lointaine... Si lointaine.

Et en même temps si proche - du moins présente.

Il se languit terriblement, mais jamais ne se laisse abattre. Il garde son souvenir comme un étendard - un Paladin nouerait probablement son mouchoir à sa lance - et continue son périple depuis des jours, seul avec lui même et ses tourments. Il ne connait pas vraiment sa destination - peut être d'ailleurs n'en a t'il pas de réelle - mais chaque journée passée à méditer le rapproche encore de son Essence, et lui offre l'espoir de bientôt pouvoir revenir parmis les Hommes. Tant de choses à penser, tant de questionnements encore.

Ce soir comme chaque soir depuis une semaine, il ne dormira pas.

Il se laissera couler - lentement et les yeux dans les flammes - dans la Transe Hibernatoire des Druides, premier palier à franchir afin de s'harmoniser avec le Flux du Rêve d'Emeraude. Puis il se laissera absorber par le Flux changeant - maelstrom d'énergie magique régi par Ysera la Reveuse, l'un des Grands Dragons laissés par les Titans sur Azeroth. Ysera la Protectrice des Elfes, celle qui permet aux Druides de traverser les âges pour être présents lorsque le Peuple des Etoiles à besoin d'eux.

Celle qui berce le sommeil des Druides - décide de leurs rêves, comme de leurs cauchemards - et qui maintient le lien avec la conscience de la Terre, legs que Malfurion fit aux Elfes après la trahison d'Azshara et leur interdiction d'avoir encore recours à la magie.

Celle qui peut être peut lui apporter une réponse qu'Elune lui masque encore.

Il grince des dents à cette pensée. Toujours, toujours la même chose. Des questions, des mystères - aucune réponse. Il s'en veut de ressasser sans cesse les mêmes plaintes.

Il se demande si il ne se trompe pas tout simplement de manière de chercher, mais les signes semblent clairs : quelqu'un décide des éléments qui croisent le Chemin de Chiron. Et il le fait avec grande joie et amusement.


Il vit désormais avec trois voix en lui, et ce depuis des semaines, à tel point qu'il a commencé à en prendre l'habitude. Il perçoit à quel point sa situation est malsaine - lui qui ne peux que décider lequel de Chat ou d'Ours contrôlera ce qu'il commence à voir comme une enveloppe utilisable par l'un ou l'autre selon leur bon vouloir. C'est tout juste si il se sent parfois lui même - du moins le lui même de ses souvenirs, de son passé, de quand Chat et Ours étaient là pour l'aider quand il en avait besoin. Désormais il vit avec la certitude qu'il doit parfois laisser sa "place" à l'un ou l'autre pour leur permettre de s'exprimer, espérant ainsi qu'ils ne le consumeront pas.

Il apréhende le jour où l'Elfe sera complètement occulté par l'une ou l'autre de ses Formes.

Attisant à nouveau son feu, il sourit aux étoiles, subitement lucide face à lui même.

"Tu en fais beaucoup, tout de même, Chiron. "
"Tu te poses trop de questions, tu ne laisses même pas le temps aux réponses de venir à toi."

Il secoue la tête pour chasser les mauvaises pensées de son esprit, essayant de recouvrer le sourire en pensant à ce qui est vraiment important : qu'il respire encore, qu'il puisse encore se battre pour les siens, et aimer ceux qui ont une place dans son coeur.

Il se convainc, tout à coup, qu'il se torture avec des faux problèmes et que tout ça n'est que spéculations, impressions éparses. Ainsi, il arrive à gagner un semblant de paix mentale, juste ce qu'il lui faut pour entamer la lente descente dans les profondeurs du Rêve, qu'il accompagne de sa respiration profonde et régulière.

Il se fait remarquer - la vie en solitude poussant souvent les gens à se parler à eux mêmes, Chiron n'y échappe guère - qu'il occulte des pensées qui le perturbent pour atteindre le calme requis pour tenter de comprendre ces mêmes pensées. Il se demande décidemment si il ne s'y prends pas mal, comme à chaque fois.

Qu'importe.

Il plonge alors dans l'univers onirique régi par des lois qu'aucun bipède ne peut appréhender - et dont la cosmologie est régie par un Dragon vieux comme le monde - au delà du chaos primal qui est la première chose qui aborde le voyageur, le Rêveur à l'entrée dans le Sommeil.
 
Décade de l'Ours
Lune d'Agilité [4]
Décade du Tigre
Décade du Singe [1]
Maijstral - Claira
Le ciel est bas, terriblement bas, et l'odeur suffocante.
Des collines de Hillsbrad elle a galopé tout le jour, progressant vers le nord, à la rencontre de ces terres maudites, comme brûlées, qu'elle découvre pour la première fois. Elle a vu se lever devant elle un soleil rouge de sang et de pourriture, assombri par une brume tenace qui masque les collines et obscurcit l'esprit.

C'est désormais escortée d'un bon guide, son Maître des Arcanes, qu'elle traverse ce territoire empoisonné, rencontrant à chaque pas la mort et les servants du Fléau. Et pendant qu'en silence ils cheminent, elle découvre un pays ravagé, violent, terrible, qui fait un écho douloureux au plus profond d'elle même.

A l'image de ces terres, son cœur s'est assombri. Depuis plusieurs lunes déjà, elle est éloignée de Chiron ; ils sont le plus souvent à deux extrémités du monde, mesurant leur attachement, éprouvant la force de ce qui les lie l'un à l'autre. Ils ont fait l'expérience des distances, de l'envie, des jalousies parfois, de la tristesse, souvent, et de la nostalgie. Par leurs obligations ils ont été séparés, par leurs natures solitaires, et par ce lien de chair, fragile et très puissant, qui les unit autant qu'il les fait se heurter.

Elle devine Chiron partagé entre sa préoccupation croissante et ses incertitudes, entre son cœur blessé par l'amour d'une autre elfe, avant elle, son désir de chair alimenté par Chat, son plaisir à séduire et sa peur de lui dire, à elle sa compagne, à Claira, qu'il veut d'elle pour toujours.

Elle s'ouvre de ses doutes à son Maître, Grisemine, dont l'oreille est fidèle et toujours réconfortante. Sur ce chemin difficile qu'ils ont choisi d'emprunter, les misères de leurs cœurs leurs semblent plus futiles, moins sérieuses. Ils découvrant des villages entiers, dévastés, en ruines, vides de toute forme de vie autre que cette pourriture qui rampe et s'accroche au bas de leurs vêtements.

Et Claira se rend compte, avec une certaine stupeur, que ceux qu'elle considéraient comme ses ennemis peuvent combattre également le Fléau : orcs, trolls, taurens, et même quelques uns de ces morts qui ont été éveillés partagent les mêmes routes et les mêmes dangers.
Après une journée entière dans la poussière et la brume, Grisemine la confie aux mains de l'Aube d'Argent, qui la protègera le temps que la rejoignent le voleur et le druide, Maijstral et Chiron.
A cette évocation, son visage s'éclaire, et son cœur se trouble. A mesure que Maijstral s'apprivoise, il se rapproche d'elle, il se dépouille peu à peu de ses réserves, de ses disparitions brusques, de ses silences narquois. Il se fraye un chemin dans l'esprit de Claira, doucement, en rôdeur. Ils forment une drôle d'équipe, tous les deux, liés par le respect, l'amitié, l'attirance, en égales proportions. Aujourd'hui, comme souvent, il répond à l'appel de Claira qui a besoin de sa force, de son assurance, et de sa grande maîtrise des secrets de leur art. Aujourd'hui, encore, il respecte sa parole donnée à Chiron, sa demande de protéger Claira, rien de plus, rien de trop.

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Celle-ci s'éloigne un peu du camp, et voit son attention attirée par une scène étrange. Un combattant réprouvé, aux habits de voleur, semble s'amuser comme un fou, danse et saute autour d'un feu de camp. Devant cette figure étrange, grimaçante et réjouie, Claira se prend à rire et à l'encourager, oubliant le danger, les haines, les histoires de leur monde. Ils s'observent un moment, se sourient, et s'assoient finalement autour du petit feu. Ils parleront longtemps, en sourires, en grimace, en brefs éclats de rire, et elle devine le mort désireux de lui plaire, nostalgique, peut être, de sa vie passée et de son ancienne chair

L'arrivée des deux elfes, Chiron et Maijstral, mettra fin à cette trêve : Chiron pose la main sur Claira et la revendique comme sienne, et mesure du regard le réprouvé qui semble, à son goût, s'approcher de trop près. Tous deux s'observent, indécis, partagés entre un timide avant goût de paix, et leurs désirs, leur envie de montrer à l'autre son territoire. Malgré les protestations de Claira, et le sourire moqueur de son ami voleur, le mort vivant appelle finalement Chiron à le suivre pour éprouver ses forces et le battre en duel. L'humaine s'élance vers eux et les retient à peine, arrivant tout juste à convaincre le réprouvé qui l'observe en souriant, secoue la tête, soupire, et murmure son nom Arséne.

Claira se souviendra de lui, de sa drôlerie, de sa classe, de son sens de l'honneur qui la surprennent toujours de la part d'unennemi ? Le cœur troublé par cette impulsion pacifique, amicale, elle se tourne vers les elfes qui la couvent du regard. Chiron s'assure qu'elle est entre de bonnes mains ; il sait qu'il la laisse trop souvent seule, mais c'est ainsi qu'ils ont choisi de vivre, l'un à côté de l'autre, respectant les missions et engagements de chacun. Il semble pourtant redouter, sans jamais l'avoir dit, ou à peine évoqué, la présence de Maijstral.
Maijstral trop beau, trop séduisant, Maijstral trop sûr de lui et de sa force tranquille, qui toujours suit Claira, comme son ombre, apparaissant et disparaissant au gré de ses envies, insaisissable, mystérieux, séducteur.

Claira embrasse une dernière fois Chiron, tente d'effacer d'un baiser sur son front les contrariétés qui l'assombrissent un peu, et le regarde s'éloigner, à nouveau, vers d'autres qu'elle, vers les dangers et la gloire. Depuis plusieurs jours déjà, elle sent peser sur sa nuque le regard de Maijstral, qui s'est chargé d'une douceur dangereuse et troublante. Elle cherche sa compagnie, lui qui connaît si bien le monde, lui si drôle et si sombre, qui ne s'attache à personne. Mais sa présence lui pèse, parfois, elle se sent gauche et lourde, maladroite, trop brusque, intimidée souvent, rougissante aussi.

A peine Chiron parti, Maijstral se rapproche, plaisante, se détend tout à coup et chasse cette lueur moqueuse de son regard, tendre à nouveau, et doux, et enjôleur. Un long moment, encore, ils rôdent dans les champs, les villes désolées, découvrent le Fléau, éliminent la peste partout où ils le peuvent, le plus souvent en silence, côte à côte. Les deux voleurs s'accordent à merveille, progressent discrètement, sans être vus, frappent soudainement sans un cri inutile, et se sourient sans cesse à mesure que leurs corps se rapprochent au combat.

Maijstral chevaleresque, brillant, s'efface toujours devant l'Humaine, la protège, la défend, mais peu à peu commence à remarquer l'absence de Chiron, la souligner, laisser entendre sa désapprobation Quel fou, selon lui, laisserait Claira tout seule, ou aux mains d'un rôdeur ? Il fait grandir le doute dans l'esprit de Claira, l'entretient, et dans le même temps sourit, toujours, et s'incline devant elle. Elle le quitte ce soir là avec l'esprit troublé, une vague colère contre son druide aimé qui l'abandonne ainsi.

Le Fléau, la pourriture, le climat étouffant, oppressant, de ces mauvaises terres la poussent à retourner, sur un coup de tête presque, vers son exil chéri, Tanaris. Elle lance un baiser à Maijstral qui la regarde, immobile, et ouvre grand les bras pour accueillir l'énergie qui la ramènera là bas, où elle a été si heureuse à chaque fois. Elle revient à elle au milieu de l'auberge ; ici les voyageurs ne s'étonnent de rien, certains l'accueillent d'un mot, d'un hochement de tête, mais tous sont habitués à voir coexister les membres des deux factions, qui arrivent et repartent sans adieux, sans motifs.

Claira passe la porte, et s'étire aux tout derniers rayons du soleil qui tombe à l'horizon. Son corps lui pèse, roué de coups, fatigué, usé par cette journée aux Maleterres. Elle a envie d'un bon feu, d'une présence amie, de Elle aperçoit alors une figure familière. Halaa, la Belle Morte, qu'elle a suivi à distance à deux reprises déjà. Halaa qui n'a jamais aperçu son visage : malgré ses défauts et son impatience, Claira sait, parfois, se fondre dans l'ombre pour mieux filer sa proie. Halaa qui l'intrigue, car si belle pour une réprouvée, et si douce d'apparence : jamais elle ne l'a vue engager le combat contre un humain, ou elfe, qui ne l'aurait cherché, et toujours comme à regrets.

Encouragée par la rencontre d'Arséne, Claira se décide alors ; en quelques rapides enjambées, elle rattrape la Morte, lui sourit, et s'incline jusqu'à toucher terre. Puis sur un petit signe de main, elle prend congé et s'écarte, retourne à ses affaires : elle veut se montrer disponible sans imposer sa présence à Halaa stupéfaite.

Quelques pas encore, et dans son dos elle entend un croassement, un froissement d'étoffes. « Halaaaa », c'est son nom, elle le sait, elle l'a entendu déjà prononcer devant elle par une elfe curieuse. Claira sourit alors, en retour, et se présente. D'un geste Halaa allume un petit feu, et penche un peu la tête, l'invitant du regard à s'asseoir avec elle. Elles conversent un moment, appréciant seulement le curieux son des langues inconnues, les intonations douces, paisibles, les blagues et les mimiques qui peuvent les faire, à peine, se comprendre. La nuit enfin tombée, Halaa fait un signe étrange à Claira, lui dit de rester là, et disparaît sans bruit dans une pluie d'étincelles.

Quelques instants plus tard la voix d'une toute jeune femme lui parvient aux oreilles, sans doute portée par le vent. « Elle dit que vous êtes bonne et douce, et bien étrange, aussi, pour une Humaine Elle dit qu'elle vous reverra, pour la paix, ou la chasse ; elle est souvent là bas ». Sans lui laisser le temps de répondre ou même de bien comprendre, la présence s'évanouit, et Claira reste seule, un moment, auprès du feu qui lentement s'éteint.

Seule, non, pas tout à fait A l'instant émerge de l'ombre, assis juste en face d'elle, un sourire étrange aux lèvres, Maijstral le séducteur.
Maijstral qui ce soir est en chasse et ne quitte pas sa proie des yeux.
 
Décade du Faucon [3]
Les Larmes d'Ashenvale
Un silence, pesant, oppressant, irréel dans un lieu comme la Forêt d'Ashenvale.

Un silence né de la mort, de la destruction.

Un silence issu de la fuite de la Nature face à l'avancée de la Guerre.

Un silence brisé par les sanglots d'un Elfe, seul, adossé à ce qu'il reste du tronc d'un arbre millénaire.

Seul, face à des hectares de Forêt déboisée, déchirée, anéhantie.

Il regarde au loin, à travers les larmes qui inondent son visage, et il voit les cadavres à perte de vue. Les cadavres de centaines d'arbres plus vieux que quiconque sur Azeroth, dont la majesté n'avait d'égale que celles d'autres arbres plus vieux encore.

Et parsemés au milieu de ce cimetierre dont les souches arrachées font simulacre de tombes, les machines qui servirent à réaliser cette infamie. La puissance de l'industrie Orque dans toute sa splendeur : des tonnes de bois et de métal assemblées dans le but de produire plus de bois et de métal.

Seul face à la douleur, il pleure.

Il pleure l'agonie de la Forêt, l'exode des animaux, l'avancée des terres arides sur un sol que la voute des arbres ne protège plus du soleil.

A perte de vue, de titanesques constructions - tours de gardes, scieries ou catapultes - se dressent parmis les restes de ce que Chiron considérait comme un Havre enchanteur, l'avant poste de Chant des Forêts, la fierté des Elfes issue de leur amour de la Nature.

Chiron essaie depuis des heures de calmer la rage terrible, la colère qui le paralyse sur place, face à un spectacle auquel il donnerait cher pour pouvoir tourner le dos. Mais il est trop abbattu pour se mouvoir. Trop déçu pour pouvoir oublier. Trop perdu pour se retrouver.

Cela fait des mois qu'il a décidé de ne pas traquer la Horde. De se consacrer à une surveillance prudente, Oeil averti d'une Meute discrète, sans prendre part aux combats qu'il jugeait injuste, ne se servant de ses dons que dans le but de faire reculer des assaillants trop véhéments. Il avait pris le parti de la sagesse - du moins le croyais t il - en décidant de juger la Horde comme ses semblables, au vu de leurs actes et pas de leur passé.

Il avait parmis l'alliance certains ennemis qui valaient bien ceux qu'il trouvait parfois dans la Horde - des gens qui étaient l'incarnation de ce contre quoi il se bat depuis toujours, l'extrémisme aveugle, la fuite en avant au péril de la lucidité.

La Guerre et le fracas des armes.

Il nourrit depuis si longtemps un espoir de paix et d'amour, que ce but lointain est presque devenu pour lui un idéal intangible, un référent moral auquel il se fie lorsque son expérience ne peux décider pour lui, en essayant de ne pas trop penser a toutes ses tentatives ratées pour l'atteindre.

Il a abandonné depuis longtemps l'illusion de pouvoir faire changer les choses, lui qui arpente l'obscurité mitigée du Crépuscule avec les siens. Il sait que seuls ceux qui marchent au grand jour on un pouvoir sur les hommes. Ou ceux qui arpentent la nuit et les manipulent. Peu de place en ce monde pour les entités mitoyennes.

Il se rappelle avoir du fuir Auberdine, menacé de lynchage par quelques fous furieux qui n'avaient pas apprécié qu'il tente de dissuader leur contre attaque sur la Croisée des Chemins.

Essayer d'expliquer que la sagesse était difficile et coûteuse a atteindre, qu'il leur fallait oublier le sentiment de vengeance, et chercher a se libérer de la spirale de la violence - que leur riposte en entrainerait une autre et cela sans fin. Que tous au final souffriraient de la haine de celui qu'ils appellent l'ennemi. Et que la Terre pâtirait encore de la folie de ses enfants.

Il a toujours eut foi, car il considère depuis toujours les créatures vivantes comme ses égaux, qu'elles pensent ou marchent a quattre pattes. Il a cru qu'il y aurait toujours des gens pour défendre la seule chose louable au delà des concepts tordus, de la politique et des grandes idées dont s'innerve l'humanité pour se donner l'impression d'exister : la Vie.

Mais, face aux débris d'un écosystème qui se meurt, Chiron n'a que peu d'espoir.

Il avait pris part à de nombreux débats durant ses voyages, avait parlé avec d'autres voyageurs, des hommes de science également. Les Orques étaient un peuple Guerrier qui possède une forte notion d'Honneur et un principe spirituel Chamanique très proche du respect de la Terre. Des adversaires de taille, impitoyables, mais nourris d'un code précis qui les différenciait - aux yeux du Druide - de certains de ses ennemis. Il avait même fini par les respecter, acceptant de ne pas comprendre toutes les subtilités d'un Peuple qui n'exulte que dans la Bataille.

Aujourd'hui pour la première fois, il regarde le travail Orque avec un oeil différent.

Un Oeil embué des larmes de la douleur, de la rage, du désespoir.

Ces fous de Guerre massacrent la Vie, celle que Chiron révère depuis toujours, et ce dans le but de pouvoir faire la Guerre plus avant.

C'en est fini de la trêve dans le coeur de Chiron. Comment un peuple qui prétend nourrir le respect à la Terre peut il délibérement l'exploiter ainsi, la laissant exsangue?

Comment les Taurens - qu'il considère comme ses Frères en esprit - peuvent ils jurer allégeance à telle cause ! Quel prix sont ils prêts a payer pour honorer leur lien à Thrall ! Qu'à donc de si particulier, cet Orc, ce Chef là, pour réussir a faire oublier aux Taurens leur amour de la Nature et les garder à ses côtés malgré ce qu'il fait subir à Mère Terre !


Son regard se tourne a nouveau sur l'étendue désolée qui s'offre à lui. Il se relève, tremblant.

Il a oublié qu'il n'est pas seul sur Azeroth. Il a oublié ceux qui l'aiment, ceux qu'il aime.

Il s'appuie dos au tronc arraché - mâché par les machines.

Un sanglot de rage lui arrache un hoquet alors même qu'il croit avoir pris le contrôle de lui même. S'étouffant à moitié il pose un genou au sol, enfonce ses mains dans la terre meuble et serre, serre jusqu'à sentir les cailloux lui perforer la chair.

La douleur l'aide à se recentrer un court moment. Il se relève à nouveau, et lève son front, haut vers le ciel. Le cri qui monte des entrailles de son être, nourrit de rage, fracasse le calme irréel de l'endroit.

Un cri rauque, éperdu, qui ne semble pas devoir finir, haché de sanglots qui lui donnent plus de puissance encore. Quand a bout de souffle son cri s'éteint, il regarde encore les machines orques, et voit non pas une forêt déboisée mais un champ de bataille où tous ses amis, sa famille et ceux qui sont ses frères seraient morts - leurs cadavres laissés à la proie du soleil, souillés par leurs meurtriers.

Il Hurle cette fois ci, déchirant l'air de ses mains, libérant bestialement la source du pouvoir Druidique en lui, appellant Guépard pour fuir cet endroit maudit. Et retrouver le responsable.


Thrall.

Chiron a oublié toute lucidité. Il se moque éperdumment de toutes les choses qui pourraient l'empêcher alors d'atteindre ce but ridicule : parler au Chef des Orques, au leader incontesté de la Horde et lui faire cesser ce génocide sylvestre. Il ne peux le tolérer. Il ne peux plus se battre pour la paix en sachant ce que ces Orcs font pour la Guerre. Il ne leur en veut pas à eux, qui sont comme tous, des pions, plus ou moins manipulés - tel que lui même.

Mais leur chef à des comptes à lui rendre. Dusse t-il y mourir, il ira jusqu'à Thrall et lui plantera ses griffes dans le cou, le regardera suffoquer comme le sang emplira sa gorge et lui soufflera à l'oreille que sa vie est le prix à payer pour ce qu'il a fait à la Forêt. Lui ou ceux qui servent sous ses ordres.

Chiron file, telle une flèche, au travers des arbres pourfendus, il s'abandonne totalement à une course éfrénée dans laquelle il peut laisser couler sa colère. Le paysage défile devant ses yeux mais il ne le voit pas.

Il ne remarque pas qu'il rentre en Azshara, qu'il traverse des kilomètres de terre qu'il avale sous ses pattes rapides, passant tout près de Géants qui n'ont pas le temps de se retourner qu'il est déjà loin. Lorsqu'à la pointe sud des falaises il se propulse dans un vide béant au dessus d'une Mer secouée par les remous, son esprit n'est déjà plus aux commandes.

Il est une bête en furie qui change de forme pour percer son environnement, Lion de Mer à son entrée dans les flots. Il nage mût par la rage, fendant la moiteur de la mer sans effort, ignorant les courants marins.

Le temps ne passe déjà plus - seul compte son but.

Orgrimmar.

Il bondit hors des flots et atterit souplement - déjà sous forme de Panthère - sur le sable de Durotar. A l'Ouest il aperçoit le grand dirigeable Gobelin qui s'approche de la tour extérieure de la ville.

Tout proche, il est tout proche. Pas encore le moment d'être prudent.

Il se rue à travers la latérite rouge sang du sol, en direction des immenses portes de la ville des Orques. Ce n'est qu'en vue des gardes qu'il ralenti pour se fondre dans la pénombre. La nuit arrive. Le Crépuscule est son environnement favori, son terrain de chasse préféré.

Les deux solides orcs brandissant leurs Haches à l'entrée ne remarquent pas, ni ne sentent la furtive panthère qui se glisse près d'eux, en silence, et pénètre la ville qu'ils sont là pour garder. Le couloir bercé de la lueur des brasiers rend sa progression plus difficile, et l'odeur forte du peuple Orc qui hante l'endroit perturbe ses sens aiguisés. Il débouche hors du couloir en pleine place d'Orgrimmar. L'endroit est loin d'être aussi désert que la flroe locale le suggère.

Il aperçoit de nombreux membres de la Horde, Taurens ou Réprouvés, Orc et Trolls, marmonant dans une langue inconnue avec force de gestes, ou courant d'une bâtisse à l'autre, des sacs chargés de butin à la main.

La tension monte, son instinct prévient Chiron qu'il n'est vraiment pas question de se faire remarquer. Il renifle autour de lui et scrute attentivement, quand un bruit derrière lui le fait bondir. Le bruit répété d'une armure de plates arrivant au pas de course. Il jailli hors de son recoin par réflexe, se mettant à l'abri d'un renfoncement rocheux plus loin.

Le Guerrier Orc qui passe juste à l'endroit où il se trouvait une seconde auparavant lui fait esquisser un sourire féroce. Ils serait tellement gouteux de le punir maintenant pour ce que son peuple à fait en Ashenvale, tellement plaisant de faire un exemple. Chiron jubile de sa position de prédateur. Un loup dans le poulailler, à ciel ouvert, où le prédateur est plus fort encore qu'il ne pourrait l'être ailleurs.

Mais il a déjà une proie. Ce crétin d'Orc, ce Chef menteur qui rallie un Peuple pacifique et amoureux de la Terre à des actes intolérables. La Guerre est finie depuis longtemps ! Quel besoin de continuer à produire de telles machines? Pour se défendre peut être?

"Il aurait mieux fait de ramener ses catapultes à Orgrimmar." Se dit Chiron

Chiron laisse le Guerrier s'éloigner vers ses frères, satisfait de sa patience toute féline. Il attend un instant où l'attention de la Horde toute proche est occuppée et où les patrouilles de Gardes se croisent pour trotter en direction d'une pente de sable qui rejoint l'entrée d'une caverne en surplomb.

Il se retourne pour fixer en lui la topologie de l'endroit, en prévision de son échappée - une fois son but atteint.

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Un garde passe tout près de lui mais lorsqu'il se retourne étonné, Chiron est déjà à couvert de la pénombre de l'intérieur. Il avance dans la fraîcheur humide de la caverne, regardant en contrebas l'agitation toute relative de quelques jeunes chasseurs de la horde contemplant un Héros Orc respirant l'expérience et la force qui fait sa patrouille.

"Le genre d'individu à éviter"

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Il continue son chemin et débouche hors de la caverne quelques minutes plus tard. Son but est proche il le sait. L'instinct ne le trompe presque jamais. Il fait totalement confiance à Chat pour arriver à son but, tellement qu'il se complait à le laisser mener la marche et se surprend à regarder en spectateur son double Félin se faufiler de cactus en cactus jusq'au pied de la Grande Tour sertie dans la carrière couleur sang.

Les Lourdes bannières frappées du sceau du Clan Orc de Thrall, et les quatre gardes vétus d'armures lourdes à l'entrée confirment à Chiron qu'il est face à son but.

"Trop facile. C'est déplorable. Il va payer le prix de son atrocité."

Chat s'avance alors, doucement mais sûrement, la salive moussant aux commissures de ses babines.


"Son sang remboursera la dette qu'il doit à Mère. Je dévorerai son coeur et trainerait ses tripes le long du chemin du retour, pour que tous les habitants de ce lieu puissent voir ce qu'il en coûte de mépriser ce que que gardent les Druides."

Chiron, en lui même, ressent un léger doute en s'entendant penser. Comme l'impression que quelque chose ... échappe à son contrôle. Sa rage est naturelle mais... Il tente de se souvenir pourquoi il voulait venir jusqu'à Thrall.. Il lui semble qu'il ne voulait pas le tuer.. Enfin pas exactement..

Mais il est là pour cela. Chat le sait. Et balaye d'un feulement sauvage les doutes qui l'empêchent de se concentrer sur sa progression vers l'entrée de la tour.

Tuer. Tuer Thrall. Manger son coeur et lapper son sang. La forêt sera sauvée. C'est tout ce qui compte.


L'Elfe, loin au fond de lui, semble subitement affollé. L'incertitude de s'entendre penser ainsi agite sa conscience enterrée. Il sait que rien ne se résoud par le combat. Il veux voir Thrall pour le raisonner, pour lui demander de cesser..

De cesser quoi au juste? Comment cet Orc peut il raisonner en terme d'Equilibre Naturel ! C'est un peuple de Barbares ! Leur conscience de la Terre s'arrête aux quatres éléments naturels que leurs chamans apprennent à contrôler !

Les battements de son coeur s'accélèrent. Chat à raison. Ce ne sont que des Orcs, méprisables créatures. Il leur est infiniment supérieur, en noblesse, en amour. C'est tout juste si ils doivent connaître la sensation de l'étreinte de la chair autrement que par leurs armes la perforant.

Il s'avance. Le doute n'a plus de raisons d'être. Les gardes, en formation serrée, scrutent consciencieusement la pénombre crépusculaire. Ce ne sont pas des petits patrouilleurs comme ceux que Chiron à croisé jusque là. Il décide de les éviter, de se faufiler entre eux pour pénétrer le bâtiment et voir s'il peut atteindre la salle de Thrall.

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Il s'avance prudemment, d'un pas décidé, vers l'entrée solidement gardée. Lorsqu'il s'approche, presque immédiatement, un des gardes se tourne dans sa direction, et se met sonder les ténébres.

"Par Elune.. Ils me sentent.."

Chiron se fige, le garde semble se relaxer un bref instant. C'est le moment qu'il choisi pour sortir de sa cachette et se glisser vers eux. Très peu d'espace pour passer, il doit réussir rapidement son entrée. Pas d'erreur possible. Un garde se détache du groupe pour descendre la pente, en marmonant quelque chose aux trois autres. Il semble contempler le sable meuble. Il se retourne subitement et lance un mot guttural. Chiron est déjà dans le couloir d'entrée quand les deux gardes du fond se resserent subitement, en croisant leur gigantesques haches, tête contre le sol, à un centimètre du museau de Chiron.

Il est fait.
A l'intérieur de la salle suivante il y a foule. Il doit sortir, vite, il lui reste une petite chance.

Les deux gardes grognent à nouveau, et Chiron recule prudemment pour s'éloigner d'eux. Il va se faire voir. Il va échouer. Il recule encore jusqu'à entrer en contact avec une surface métallique, derrière lui.

Un cri lui fait comprendre que c'est le garde qu'il vient de passer.

Le temps se ralenti en une seconde, la hache du garde siffle dans l'air en direction du Félin acculé. Chiron se ramasse sur lui même en bandant ses muscles de toute sa puissance, ses griffes s'enfoncent dans le bois du sol. Au moment où la hache s'abat sur lui, il se rue entre les jambes du garde à une vitesse fulgurante. Le bois vole en éclats comme il bondit à l'extérieur. Les cris des gardes lui font comprendre qu'il ne va pas s'en tirer ainsi, mais dans son malheur, personne dans la tour ne semble inquiet. Il passe au dessus du garde qui s'était éloigné, qui éructe de le voir passer hors de portée de sa hache.

"Laissez moi fuir ou il vous en cuira" se murmure t il pour lui même.

Il change brusquement de direction pour foncer derrière la grande tour, à l'abri des regards. Il sait que si quelqu'un le surprend c'en est fini de lui. Ceux là sont trop stupides et sûrs d'eux mêmes pour être un danger pour le but de Chiron. Mais leurs haches peuvent très bien mettre un terme à l'existence du Druide sauvage.

Il pense s'éloigner assez pour se fondre à nouveau dans les ombres, mais le sifflement aigu du carreau d'arbalète ne lui permet pas de réagir assez vite. Le trait lui perfore la cuisse, lui faisant perdre l'équilibre et rouler dans la poussière latéritique. Les cris de jubilation des gardes s'intensifient.

Vingt cinq mètres.

Agir, vite !

Chiron hurle à Chat de partir. De lui laisser le contrôle.

Il se relève, se léchant les babines avec un sourire sauvage en se retournant, les yeux luisants, vers les quatres guerriers qui arrivent en chargeant.

"CHAT! BARRES TOI DE MOI! ARRETE! TU VAS NOUS FAIRE TUER!"

Chiron panique totalement. Il n'a aucune chance face à eux. Il le sait. Il a besoin d'Ours, sinon il est mort.

"Ils vont nous fervir d'apéritif, mon petit Elfe. Ne t'inquiètes paaaaas... " La voix fofottante et mielleuse qui s'est élevée dans son esprit frappe Chiron en plein coeur. Quelle assurance démoniaque.

Vingt mètres.

Il lui faut faire partir Chat. Maintenant ! Mais son esprit tangue, indécis. Le Pouvoir se fait subitement discret, au moment où il en a le plus besoin.

C'est alors que l'elfe repense à Claira. Il s'imagine qu'elle l'attende durant des semaines, sans avoir plus de nouvelles. Poursuivant peut être à travers Azeroth sa trace pour un jour déboucher ici et se rendre compte qu'il est bel et bien mort, des années après. Il ne peux pas lui faire ça.

"CHAT ! DEGAGE!"

Le feulement de désaprobation qu'il produit alors comme la Panthère reprend forme Elfique relance l'adrénaline dans les veines de Chiron. Les gardes ne sont plus qu'à quinze mètres, et accélèrent leur course en une charge éffrénée.

Il arrache la flèche de sa cuisse et commence à incanter une mélopée Elfique.

Rester calme.

La peau de son bras se recouvre d'écorce mouvante. Le garde le plus proche lève sa hache au ciel. Chiron se baisse subitement en souriant au garde, et plonge son bras dans la terre comme il aurait put le faire dans l'eau d'un lac. Il voit passer une brève hésitation dans le regard de l'Orc, qui se meut en stupeur ragante lorsque qu'un amas de racines surgit du sol devant lui et s'enroule en un instant autour de ses jambes, remontant jusqu'aux cuisses. Le garde bascule au sol, lachant sa Hache.

"Et de un."

L'Elfe a retrouvé toute sa concentration. Il regarde les trois orques se ruer vers lui sans ciller.

Il en choisi un, résigné a devoir tuer pour survivre.

Il réalise une suite de passes complexes avec ses mains, qu'il accompagne d'un sifflement mélodieux. Comme il accélère ses mouvements une énergie argentée scintillante se forme entre ses mains. Le pouvoir grandit, canalisé par sa concentration intense. Il sait précisèment ce qu'il a a faire. Son sifflement se mue peu à peu en un grondement inhumain, l'énergie envoie des décharges dans tout son système nerveux. Il est entouré de magie Naturelle.

Les trois Orques brandissent leurs haches. Ils voient déjà le cadavre de l'elfe sur le sol.


Il pousse un cri rauque et sauvage en frappant l'air de son poing droit, en direction d'un des gardes. Un bref sifflement précède le Feu Stellaire qui s'abat alors sur lui, inondant la scène d'un pilier de lumière Lunaire concentrée qui arrache un cri à l'humanoide.

Un frisson parcours le dos de Chiron. Ours se réveille. Vite.

Il tend sa main gauche en direction du même garde, et sert brusquement son poing, sourcils froncés par sa concentration. Un Eclat de Lune perfore l'oscurité et embrase le malheureux dont l'armure est déjà chauffée à blanc.

Chiron écarte alors les bras, acceuillant la charge éfrénée avec un rictus sauvage. Le long rugissement qui surgit de son ventre losqu'il lève les bras au ciel l'inonde d'une lueur verte qui referme déjà la plaie de sa cuisse.

Ses chairs éclatent alors en un instant comme tout son corps gonfle et se recouvre d'un pelage et d'un cuir sombre. La transformation semble ralentir une secondes les gardes, hébétés par les ressources de l'intrus.

La seconde de trop.

L'immense forme dressée sur ses pattes arrières rugit sinistrement lorsque les trois haches s'abbatent sur lui. Il dévie la première d'un revers de son énorme patte griffue. La deuxième le touche à l'épaule, mais il ne sent même pas la lame lui percer la chair. Le pouvoir de la Nature va guérir ses blessures pendant dix bonnes secondes. Il acceuille la troisième d'un nouveau rugissement terrifiant, et la laisse le frapper en pleine poitrine.

Chiron laisse Ours s'enrager furieusement. Il n'a pas de meilleur choix désormais.

Les trois orques resserent leur prise sur le manche de leur hache. Les choses ne se passent pas du tout comme ils le croyaient. Ils reculent légèrement, surpris de voir l'énorme Ours jubiler de rage en se gaussant de leur assaut raté.

Encore une hésitation de trop. Chiron se laisse tomber au sol, et rugissant une nouvelle fois, il en appelle à ses dons de la Voie de la Sauvagerie. La charge cloue littéralement le guerrier fumant au sol. Ses deux compagnons s'écartent au dernier moment et se mettent à ruer Chiron de coups de Hache - perçant difficilement son cuir - tandis que ce dernier plante griffes et crocs dans les interstices de l'armure de sa victime. Il affermi sa prise, puis se relève en écartelant l'orc. Les plaques d'armures se dissocient, jouant sur leurs fixations, brisant les os du malheureux et laissant sa chair offerte aux terribles griffes du Druide Ours.

Il se retourne vers les deux autres, accuse un nouveau coup de hache et sent son pouvoir guérisseur faiblir. Qu'importe. Il n'a besoin que de rage, violente et inextinguible. Qu'ils le tapent jusqu'à plus soif, qu'ils l'énervent encore. Ils n'ont rien vu de ce dont il était capable.

Il ignore complètement leur coups et se dresse a nouveau sur ses pattes arrières, se griffant le torse en rugissant sur eux. Cette fois, les deux orcs semblent vraiment intimidés. Ils les sent raffermir leur prise pour se rassurer. Le dernier, impuissant, contemple la scène en tentant d'atteindre le manche de sa hache sans succès.

Il joue de puissantes frappes, en étourdit un d'un revers particulièrement violent de sa patte griffue, puis le mutile en abbattant ses deux bras de part et d'autre de son torse. Il sent son sang couler, il ignore la douleur de la hache qui lui perfore le ventre - un coup particulièrement vicieux.

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Qu'ils le frappent encore. Qu'ils le frappent donc. Ils ne mourront que plus vite.


Le cadavre du deuxième orque s'effondre au sol, démembré. Chiron trouve que c'est le moment pour faire comprendre à celui qui reste face à lui qu'il est déjà mort. Il frappe son casque de ses deux pattes réunies, puis profite du laps de temps gagné pour reculer et laisser sa régénération frénétique faire effet. Il contracte ses muscles en éructant face au guerrier, les yeux injectés de sang et la bave aux lèvres. Toutes ses plaies se résorbent, comme l'Orque reprend ses esprits affolé. L'Ours est déjà sur lui.

Chiron hésite à le laisser fuir, mais il ne peux pas arrêter Ours comme cela. Il détourne son Oeil intérieur de la scène, et laisse faire son alter ego enragé comme il achève le valeureux guerrier.

Il retombe au sol, laissant choir la tête de l'orque, satisfait.

Il regarde le dernier - immobilisé face à une mort certaine qui s'approche, sous la forme d'un Ours en train de se muer en Panthère aux dents de sabre.

Au vu des cadavres de ses trois compagnons, il sait qu'il a raté sa chance de survivre lorsqu'il s'est mis a courser cette panthère.

C'est fièrement qu'il tente de se redresser lorsque la Panthère fond sur lui, toutes griffes dehors, et le laboure sauvagement par toutes les pores de son attirail.

Couvert de sang, Chiron ne s'attarde pas plus longtemps dehors. Les cadavres seront bientôt découverts.

Il passe furtivement le passage ainsi libéré des quatres gardes, et pénètre dans la salle attenante dont le calme n'a pas été rompu. Il se rend compte qu'il a eut beaucoup de chance. Fier de son succès, il passe en fantôme près des Trolls et Orcs afférés, et s'arrête un instant sur une table d'où il savoure sa victoire écrasante. Il sent que Thrall n'est plus très loin.

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Pourtant, si près du but, il réalise qu'il est peut être en train de se fourvoyer. Il hésite désormais a pénétrer plus avant dans le sanctuaire, incertain de la suite des choses. S'il arrive à passer encore les deux blocs de gardes, à les terrasser, a surmonter l'attaque de tous ceux qui sont à l'intérieur, quand bien même il arriverait à Thrall.. Qu'est ce qu'il compte bien pouvoir lui dire. Maintenant qu'il a repoussé Chat au fond de lui, il se rend compte que ce dernier le pousse à agir à l'encontre de ses préceptes fondamentaux, et notamment le respect de la Vie. Même si cet Orc est à la tête de sauvages qui détruisent la forêt, c'est un chef, et cette position est dure à occupper, elle nécessite des sacrifices. Chiron le sait bien. Il est chef de meute.

Il regarde l'apothicaire Troll farfouiller paisiblement dans ses potions, et ne voit pas de différence avec lui même lorsqu'il exerce les arts de l'alchimie près du laboratoire de Grisemine. Des gens, tous différents. Certains sont sans doute des sauvages, d'autres des meurtriers. mais certains sont aussi des être vivants comme lui, avec leurs peurs, leurs craintes, et leur désir de réussir, d'être respectés, aimés.

Il lèche le sang qui orne son museau et lui trouve un goût soudainement amer.

Et si le déboisement d'Ashenvale était une part du cycle de la vie? Et si la mort de ces quatre guerriers était suffisante à rembourser la dette du peuple orque, pour cette fois. Il lui suffit de le vouloir. Il devaient avoir une famille, des amis, qui les pleureront aussi.

Est ce vraiment utile de se frayer un sillage de mort jusqu'au chef de la Horde, pour finalement risquer d'échouer, et mourir loin des bras de son humaine bien aimée. La laisser seule...

Il sent Chat grogner à l'évocation de l'envie de rebrousser chemin de l'Elfe, mais trop de rage a déjà coulé en lui pour que le Félin puisse en profiter pour se substituer à sa pensée consciente.

Chiron n'arrive pas a pardonner l'avancée des tarrides, fruit de la machine de guerre Orque, en Ashenvale. Mais il se trouve dans le saint des saints de la Horde, et à sa grande surprise il éprouve de la sympathie pour eux. Il a tué quatre des leurs a quelques mètres, et ils continuent leurs affaires, insouciants du regard de prédateur qui les scrute, audacieusement juché sur la table de la salle.

Il se surprend à observer une réprouvée réaliser des potions près de l'établi.

Des potions de soin, qu'elle offre a un jeune Tauren vétu de mailles rouillées.

Il se revoit tendant un sac rempli de précieuses fioles à Claira, avant qu'elle ne parte en voyage, en espérant que cela l'aide à triompher du danger, pour qu'elle puisse lui revenir.

Il saute à bas de la table.

Il sort de la grande tour, perplexe, ignorant les couinements de Chat au fond de lui.

Il est fatigué, d'un coup. Il est Druide. Il sert la vie. Il la protège et la défend, sous toutes ses formes. Il a toujours considéré que ces ... "morts" n'étaient vivants que par maléfice. Transcender la Mort, c'est aller à l'encontre de l'Equilibre Naturel, c'est briser l'harmonie du cycle de la vie et de la Mort. Cela engendre néceissairement un déséquilibre qui doit être compensé. Il a lu sur le visage de la réprouvée ce qu'il a cru être de l'amour. Une affection tendre, sincère, lorsqu'elle parlait au tauren. Elle éprouvait quelque chose. Des sentiments.

Comment est ce possible? Il a tué des centaines de réprouvés, persuadé qu'ils étaient des pions à la solde d'une Banshee manipulée par Arthas. Il a répandu sa rage sur Moulin de Tarren tellement de fois... Et aujourd'hui il comprend que la Horde, plus que jamais, est comme l'alliance. Ils ont des chefs, mais ils existent aussi par eux mêmes, pensent, aiment et raisonnent comme Chiron. Certains sont bons... d'autres mauvais.. Qu'ils soient fait de poils ou de chair pourrie, ils n'aspirent potentiellement qu'à la même chose que l'Elfe : la paix. Le droit d'être, sans craindre de voir leur civilisation anéhantie.

Il sait qu'il ne peux apréhender tous les éléments du problème.

Mais lorsqu'il reprend sa forme d'Elfe, au vu et su de tous, face aux marches de la tour, et qu'il allume un feu pour s'allonger confortablement, en forme de Chat, face aux braises...

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... il est calme, serein.

Il est même surpris, au moins autant que la réprouvée - qu'il trouve presque charmante en regardant son visage et ses yeux qui lui rappellent les siens - lorsque celle ci sort du batiment et l'aperçoit. Elle hésite, tout d'abord, un peu effrayée de le voir ici, alors qu'elle est seule.

Chiron se relève, et la regarde, les oreilles baissées en signe de soumission. Il joue un rôle mais reste prudent, il veut en avoir le coeur net.

Elle s'approche, l'observe, jauge sa réaction.

Il se couche près d'elle, après lui avoir donné un léger coup de langue. Elle semble rire. L'étonnement a fait place à l'excitation, au frisson de l'inconnu. Il est heureux, soudain. Elle se dirige vers les cavernes, lui faisant signe de suivre. Confiant, il reste dans son sillage, discret comme une ombre, comme elle se dirige vers la fraîcheur de la grotte.

Il sourit en se disant qu'elle doit avoir chaud - au moins autant que lui.

Ils s'arrêtent au croisement d'un chemin, et elle s'assied en tailleur, proche d'un rocher. Elle regarde autour d'elle, cherchant le félin qui s'approche alors, et se couche près d'elle. Songeuse, elle touche le corps musculeux de Chiron, qui frissonne au contact des doigts délicats mais terriblements froids. Elle semble hésiter a plonger la main dans le pelage sombre. Chiron ronrone pour l'y encourager, mais rien n'y fait.

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Elle prononce alors quelques mots, comme une mise en garde. Elle désigne du doigt un groupe hétéroc lite qui s'avance dans leur direction.

Chiron disparait alors, son pelage prenant à nouveau la couleur de son environnement, mais il reste tout près de la Morte. Son coeur bat a tout rompre, de l'incongrue situation dans laquelle il se trouve.

Les gens arrivent alors, et s'installent en cercle, tous près de lui ! Il ressent le danger qui émane de l'un d'eux, un mort vivant drapé de toges blanches mais vétu d'un Casque qu'il connait bien : le Chapeau de Brume Funeste, grand présent des Démonistes.

Le réprouvé ne semble pas le remarquer, aussi il reste immobile. Il observe. il sent la main de la réprouvée partir à la rencontre de son poil, pour voir si il est toujours là. Elle sursaute brièvement en se rendant comtpe que oui. Un tauren s'est assis a côté d'elle, et lui parle.

Elle trace des symboles dans la terre, discrètement, près du visage de Chiron. Hésitantes, les courbures resemblent à du commun, mais elle semble grandement peiner à écrire ce qu'il croit être son nom.

Halita. Elle lui désigne le tauren à côté. Chiron sait immédiatement que c'est un Druide, tout comme lui. La réprouvée lui chuchotte à l'oreille pendant que le démoniste s'affaire a parler avec les deux orcs, puis pousse doucement Chiron dans sa direction. Discrètement, il s'exécute, il prend subitement confiance. Il se déplace et frôle le Tauren, qui ne sursaute même pas, mais s'appuie légèrement contre lui pour lui faire comprendre qu'il sait.

Chiron est euphorique. Peut être... peut être que eux ils pourraient ... comprendre, ou ... faire quelque chose pour la mort des arbres, pour... parler a Thrall..

Il s'installe confortablement sur les jambes du tauren, toujours invisible, et décide d'attendre et de voir. Il entend Halita glousser à côté.

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C'est alors qu'il décide de se montrer. Sans réfléchir. Trop mis en confiance par cet étonante succession d'événements. Il espère que son attitude le mettra à l'abri d'une attaque a vue des deux orcs et du démoniste.

La frêle silhouette se lève alors, doucement. Prononce quelques mots, et s'approche de lui. Il reste immobile, fixe. Halita et le tauren semblent dire quelque chose, mais le réprouvé secoue la tête. Chiron sent que quelque chose ne va pas, mais il n'a pas le temps de réagir. Le réprouvé est juste à côté de lui.

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Il pousse alors un cri terrifiant, maléfique, qui paralyse Chiron sur place. Le tauren se relève brusquement en criant a son tour. Un rire sadique s'élève dans la pénombre de la grotte, et le Maître des Démons commence à proférer un flot de malédictions comme les deux orcs se relèvent à leur tour et tirent leurs armes. Lorsque le déluge de fureur s'abat sur le félin tétanisé, la réprouvée se met à pleurer comme le tauren tape le sol avec rage, impuissant.

Chiron comprend alors qu'il n'aura pas d'autre chance de fuite.

En un éclair il reprend ses esprits, et bondit aux yeux du Démoniste pour l'aveugler d'un coup de griffes. Il entend le ricanement satanique du diablotin qui vient d'apparaitre, préparant un sort de Feu, et les deux orcs jurer comme ils tentent de faire le tour du réprouvé pour l'aider à se libérer de la Panthère. Chiron bondit alors a toute trombe, poursuivi par le sifflement de la boule de feu qui lui brûle le flanc en le projettant contre un mur. Les deux orcs sont a sa poursuite, le démoniste rit encore sadiquement de le voir détaler de la sorte.

Il est a moitié mort, mais trouve encore la force de se ruer hors de portée de leurs pataudes jambes.

Il trouve un endroit serein, où panser ses plaies et méditer.

Il veux revoir Claira. Il doit lui parler de tout cela.

Il se souvient d'un soir dans les Maleterres, où ils croisèrent un réprouvé, étrange lui aussi. Un assassin qui épargna Chiron alors qu'il voulait l'éloigner de Claira.

Peut être comme cette .. Halita. Il prend conscience que nul ne mérite d'être jugé à l'aube de partis pris, mais que même la tolérance et le respect nécessitent une grande prudence.

Ce soir, il failli mourir par deux fois. La première par excès de colère. La deuxième par excès de confiance.

Une raison de plus pour atteindre l'équilibre. Il repense à ce que Chat à fait, et dit. Il sait qu'il lui faudra combattre cet autre lui même, au risque de faire quelquechose qu'il regrettera toujours.

Il a beaucoup appris. Il se retourne et contemple la grotte qu'il va quitter, l'ambiance sereine désormais que les cris de ses poursuivants se sont tus.

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Rien ne réparera les dommages causés à la Forêt. Seul le temps.

Il sait ce qu'il doit faire : il doit passer par le Cercle de Cénarius, seuls ces Druides pourront lui permettre de communiquer sa douleur, et peut être de comprendre.

Feralas.


Feralas sera son objectif. Au camp Mojache, il trouvera un frère Tauren, un puissant Druide. Ils pourront parler, se comprendre. Ils communiqueront avec le Coeur, grâce aux rituels de la nature.

Il pourra peut être savoir pourquoi Chat essaie de se rebeller contre Chiron.

Pourquoi les taurens tolèrent de donner leur honneur à un peuple qui déforeste à outrance.

Pourquoi il est amoureux éperdumment d'une humaine qu'il risque d'abandonner sur Azeroth le jour où il devra hiberner à travers les âges, en sachant qu'il se réveillera à une époque où elle sera morte depuis longtemps. Et pourquoi il est prêt à tout risquer pour l'aimer quand même, quitte à se réveiller après des siècles d'espoir onirique....

Seul.

Sa gorge se serre. Non, il n'est pas seul, pas encore. Pas tant qu'elle est vivante. Pas tant qu'il est encore éveillé.

Il s'échappe d'Orgrimmar comme il y est entré, tel un fantôme.

"Claira.... je dois te retrouver.. j'ai besoin de toi... j'ai besoin de toi...."

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Eperdue - Claira
Claira ouvre un œil, puis l'autre, la main toujours posée sur son flanc, légère et prête à dégainer. Elle remarque immédiatement que Maijstral l'a précédée, comme souvent ; il est déjà debout, immobile, lui tournant le dos à demi. Il donne l'impression de guetter, en attente, à l'affût du moindre mouvement y compris, semble-t-il, des gestes de Claira, car il se tourne en souriant et la salue d'un hochement de tête.

Elle se trouble un instant ; elle ne se rappelle pas lui avoir indiqué son camp, la veille, ni l'avoir convié à se joindre à elle. Il a toujours un sens secret pour deviner ses gestes, avant elle, anticiper le prochain mouvement, la prochaine aventure. Pourtant, sa silhouette familière au réveil, ce matin, n'étonne pas Claira ; il est devenu incontournable, toujours dans ses parages ; indispensable, souvent, aussi. Sa stature la rassure et dissuade les aventuriers de s'approcher trop près.

Sans manières, elle se lève et s'éloigne. Elle sait qu'il la rattrapera, s'il le souhaite, en son temps. Ils sont reliés entre eux par des murmures, des rumeurs, et un goût commun pour chevaucher ensemble, rivaliser d'esprit,, éprouver leurs talents, souvent si dissemblables.
Claira se dirige vers la ville, toute proche de là où elle vient de passer la nuit. Elle attend aujourd'hui un message de Chiron, espère qu'il la rappelle à lui, s'attriste de ses réserves, parfois, et du temps passé à douter, hésiter, sans savoir dans quelle voie ils vont s'engager tous les deux.

Une fois devant la poste, sa déception est une petite morsure au cœur : pas de note, pas de signes de sa présence, les autres Loups de la Meute sont comme elle, sans nouvelles depuis de nombreuses heures. Elle sait qu'il est en vie, et n'a pas tellement d'inquiétudes. Il a toujours été capable de se faire des alliés de taille, en n'importe quel endroit ; il aime juste un peu trop, comme elle, explorer le monde en solitaire, rencontrer ses démons et les affronter seul, se perdre dans ses pensées ou dans les brumes de Feuillargent, aussi, pense-t-elle dans un soupir. « Il a dû oublier. »

A peine Claira se retourne-t-elle, qu'elle aperçoit Halaa, qui s'élance vers elle de son pas étrange, hésitant, lui sourit et désigne un point éloigné au delà des remparts. Le sourire de la jolie morte lui met du baume au cœur, et encore davantage son désir, visible, d'aller chasser ensemble. Pendant un long moment, Claira sautille à sa suite, toute à sa joie de revoir Halaa. Elles chassent les Basilics et les hyènes aux portes de la ville, font des bonds, se racontent des blagues et des histoires légères qu'elles seules semblent comprendre. Halaa lui montre une potion qui la rend, par magie, petite comme une poupée au rire grinçant, vive et malicieuse.

Et puis, arrive Maijstral, de son pas nonchalant. Il s'incline devant une Halaa miniature, encore un peu surpris de cette étrange compagne, mais déjà son regard se repose sur Claira, la détaille, lentement, avec le calme et l'assurance de celui qui sait ce qu'il veut et qui attend son heure. Il lui propose une nouvelle mission, plus reposante cette fois, écumer la crique où se cachent les corsaires de Tanaris. Claira souffle un baiser à sa nouvelle amie, et saute à cheval, à la suite du voleur.

Une fois seuls, Maijstral ralentit sa monture, accorde son pas à celui de Claira, et reprend tranquillement leurs longues conversations à peine interrompues. Il lui parle de l'amour, qu'il oppose souvent à la solitude nécessaire de leur métier, à tous deux, ou à leur nature profonde de chasseurs, de rôdeurs, qui ne peuvent, selon lui, tout à fait se mêler au reste du monde. Il sait semer le doute dans l'esprit de Claira, elle qui aime à se croire une Louve solitaire, mais qui s'attache profondément à son Clan, pourtant, et chaque jour davantage.

Il lui parle de Chiron et de ses obligations de chef ; lui dit qu'elle mérite mieux, à moitié plaisantant, et même une dévotion totale, de tous les instants, selon lui. Claira préfère souvent n'écouter qu'à moitié, aussi, et prétendre qu'il n'est jamais complètement sérieux. Mais ce soir, quelque chose a changé. Il est beaucoup plus dur, plus ironique aussi, presque sombre, et toujours empressé pour lui plaire.

A mesure qu'ils se frayent un chemin dans le camp, qu'ils ramassent les richesses des coffres et des poches ennemies, il est plus explicite, plus direct, dans ses critiques et dans ses compliments. Et puis, il s'approche par surprise, et lui vole un baiser sur la nuque, à la naissance des cheveux ; elle se retourne d'un bond, mais il a déjà disparu, à nouveau soustrait à ses yeux par son camouflage habile.

Claira grogne dans sa direction « Grr si je t'attrape. » Il a un rire moqueur, et tendre à la fois « Quand tu voudras, ma voleuse préférée » Et plus doucement « Je suis à toi, tu le sais ». Claira a brusquement rougi, de colère, de surprise, de gêne, mais aussi parce qu'il vient de rompre leur tacite entente : l'attirance l'un pour l'autre, si elle existe, ne devait jamais être évoquée, toujours laissée de côté, pour préserver entre eux ce qui pouvait s'apparenter à un respect mutuel, une amitié solide.

Et puis, il y a Chiron, auquel il a prêté serment. Auquel elle a donné son cœur, entièrement. Claira siffle son cheval, et s'enfuit au galop. Elle ne veut pas faire face à Maijstral, pas maintenant, elle se sent fatiguée jusqu'au plus profond de son âme, et ressent plus vivement encore l'absence de son hommelfe.

En esprit, elle lui envoie des messages, le presse de la voir, même s'il est occupé. Il est à l'autre bout du monde, à la Ville des nains, et n'a que peu de temps. Ce soir, il rencontre pour la première fois deux Elfes de haute lignée qui souhaitent rejoindre l'Oeil. Qu'importe, pour Claira, le voir et le toucher lui manquent terriblement. Elle se sent trompée, trahie, et traître à la fois. Elle se sent coupable d'avoir laissé parler son affection pour Maijstral, de l'avoir encouragé, sans doute, et de ne pas pouvoir le blâmer aussi fermement qu'elle le devrait.

La route est longue, très longue, pour traverser la Mer. Elle ne tient plus en place, et essaie d'éviter d'entendre les messages du voleur qui la piste, et sans aucune honte, mais une grande tendresse, lui demande de la voir, juste un moment, de lui parler encore, de laisser son cœur se convaincre. Arrivée à la Grande Forge, elle manque de tomber du gryphon, tant son angoisse est grande ; elle se change à peine, sans cesser de courir, et se précipite dans la salle où se tient le conseil. Elle tombe mal.

A peine aura-t-elle eu le temps d'échanger quelques phrases avec la belle Aliona et son compagnon Aerendil que déjà Maijstral rôde, à la porte, et la presse de sortir. Elle sait que l'entrevue est cruciale, pour Chiron, qu'elle doit tenir son rang, ou bien quitter la pièce, car les nouveaux venus méritent une attention entière. Elle s'excuse auprès d'eux, serre son hommelfe dans ses bras, fort, et enfouit sa tête au creux de son épaule.

Les battements de son cœur s'apaisent lentement, comme elle sent sur son cou le souffle de Chiron, qui la berce et lui murmure à l'oreille des mots comme autant de caresses. Il est une évidence, ses craintes sont tout à coup risibles, il est toute sa vie. Claira lentement se redresse, embrasse son compagnon sans le quitter des yeux, et décide, en son cœur, de le protéger encore. Elle ne lui dira rien, il serait trop blessé, déçu, furieux ; elle connaît trop ses rages, sa sauvagerie, pour ne pas essayer de convaincre elle même Maijstral de revenir à lui.

Elle lui dira de partir, ce soir même, sans doute, s'il insiste un peu plus.

 
Eperdue - 2 - Claira
Elle s'éloigne d'un pas vif du lieu de rendez vous. La chaleur et le vacarme de la grande Forge aggravent encore son mal de tête, le sang lui cogne aux tempes, elle est lourde d'angoisse et d'appréhension. Elle devine Maijstral caché là, dans un coin, qui la guette peut être, qui la suit, peut être. Elle préfère le devancer, cette fois, et lui envoie un message. Elle a choisi une habitation naine à l'écart de la foule où elle pourra le rencontrer et s'expliquer avec lui.

La fatigue, le malaise, lui brouillent la vue et Claira s'appuie un instant contre la roche dure des murailles, reprend un peu de souffle, puis poursuit son chemin. Dans quelques instants, elle devra lui faire faceMaijstral, toujours si beau, si sombre et si mystérieux. Maijstral, qui parle à son cœur de rôdeuse autant qu'à ses doutes de femme, elle qui se sent délaissée parfois par le chef de la Meute. Maijstral qui la fascine autant qu'elle se méfie de lui.

Elle s'engouffre dans la petite maison, et monte sur le balcon. Ici, règne un calme relatif, et les rares passants qui s'attardent en cette partie d'Ironforge ont d'autres affaires à l'esprit, ils ne prêteront, au plus, qu'une attention distraite à Claira et soninvité ?

Il apparaît soudain, comme à son habitude. Tout habillé de blanc, les cheveux dénoués, un vague sourire aux lèvres, il mesure parfaitement l'effet qu'il peut produire sur elle, comme sur toutes les femmes. Il s'incline sans la quitter des yeux et se rapproche d'elle, tout près, à entendre son souffle se précipiter. Claira se sent faiblir, comme il pose la main sur sa taille et l'attire à lui.

« Laisse moi » murmure-t-elle, presque en le suppliant.

De ses deux poings serrés, elle s'écarte de lui, et va se tenir en retrait, tout au bord du balcon. Dans son trouble, elle ne prête pas attention à l'odeur de forêt, et d'animal sauvage, qui s'élève un instant d'un recoin de façade, un sombre renfoncement juste en dessous d'elle, ni au sourd gémissement qui s'éteint en un feulement rauque

Elle croise les bras sur sa poitrine, comme pour se protéger, et lève son visage vers le voleur.
« Je veux que tu arrêtes, Maijstral, de me tourner autour, de me*elle rougit* de me parler ainsi, de courir après moi, toujours. Je ne serais pas à toi.
- Mais tu en as envie, pas vrai ? » Il s'avance à nouveau, un seul pas les sépare.

Un grognement retentit, à nouveau, dans le dos de Claira ; mais la jeune femme et Maijstral n'y prêtent pas attention, tout entiers captivés par le regard l'un de l'autre. L'espace entre eux deux s'amenuise, Claira paraît captive, prisonnière, de la volonté du Voleur, de sa calme assurance, de ses paroles à double sens. Un bref instant, elle paraît sur le point de basculer en avant, de s'évanouir, presque, sous le regard de Maijstral.

Mais elle se détourne encore, inspire, calme les battements de son cœur. Et c'est d'une voix ferme qu'elle lui rappelle alors ses serments, le respect de Chiron, son amitié pour le Nain Amistad qui les connaît tout deux et ne peut que blâmer l'insistance de Maijstral.

Elle lui dit son amour pour son Druide, à voix douce, le regard plus tranquille. Elle lui avoue qu'elle avait, longtemps, imaginé pouvoir former à eux trois la meilleure des équipes. Elle regrette leur début d'amitié, leurs longues chevauchées, leurs batailles ; elle remercie Maijstral pour ses enseignements, pour l'avoir protégée, soutenue, accompagnée.

L'elfe l'écoute à peine, et l'interrompt souvent ; pose sa main sur sa joue, attrape une mèche de cheveux, tout gestes qu'elle écarte, doucement. Il lui dit non, répète « Non, non, non, je ne te laisserai pas », sans cesser de sourire. Claira soupire encore, et se tourne vers la rue, un instant immobile.

Et puis, sans hésiter, d'un bond elle saute au bas de la petite maison, se soustrait à sa vue, se fond alors dans l'ombre. Il s'appelle, s'élance à sa suite, mais elle le décourage vivement, à voix basse, avec des mots lourds de fatigue et de colère. Ce soir elle se cachera de lui, et se dirige déjà là où il ne peut la suivre, dans son refuge secret, tout au nord d'Azeroth. Ce soir il ne la trouvera pas, mais Claira réalise, aussi, qu'elle devra le revoir.
 
Lune de l'Esprit [1]
Décade de la Chouette
Décade de la Baleine [1]
Le Rêve, le Réveil
Le réveil.

Brutal. Il a cru entendre un cri le tirer du sommeil.
Paniqué, il regarde autour de lui.

Il sent encore les restes de la colère et de la rage dans son sang.

Ses yeux parcourent la pièce dans laquelle il se trouve. Tout à l'air calme. Il se trouve dans une salle aux murs de pierre, un tapis est jeté sur le sol, près d'une table. Il est sur le tapis. Un brasero dans un coin éclaire la scène d'une lueur vacillante.

Il est.. il est Chat? Il grogne brièvement, et passe sa langue sur ses babines.

Le goût du sang. Pas le sien. Il est presque frais, quelques heures tout au plus.

Son cœur cogne sourdement. Une désagréable impression de mal aise le saisi. Quelque chose ne va pas, mais pas du tout.
Il faut qu'il sache où il est. Mais pas tout de suite. D'abord nettoyer ce sang.

Il entreprend une toilette minutieuse, puis s'arrête soudainement, frappé par une évidence.

"Mais qu'est ce que je fais? Je me prends vraiment pour un Chat?" Il sait très bien qu'en quittant l'aspect de Mère Panthère, il n'a pas a se soucier de ce genre de détails. Il laisse Chat faire à sa guise d'habitude, mais là.. Il sent que quelque chose cloche.

Reprendre sa forme d'Elfe lui demande alors un effort de concentration, qui ajoute à l'édifice de son mal aise une pierre malvenue.

"Qu'est ce qui se passe?" se dit il comme il se redresse dans sa forme bipède.

Il constate sa nudité, tout d'abord.

Puis il réalise où il se trouve.

Il est à Ironforge. Dans une maisonnée, proche de la grande Forge. Le bruit du métal frappé parvient à ses oreilles de manière étouffée.

"Mais.. "

Il tente de rassembler ses pensées et d'ordonner son esprit.. Hier..

Il s'était endormi, oui, mais... A Feralas? Il se souvient des dernières pensées qu'il aie nourri pour Claira, de l'âtre fumant doucement.. De sa plongée dans le Rêve.

Hier encore il avait choisi - avant de dormir - de continuer plus vers l'est, de passer la Titanesque Muraille de Haches Tripes et les plateaux sauvages pour atteindre le lieu où ses frères Taurens gardent la Forêt - le camp Mojache. De puissants Druides vivent là bas, et il nourrissait l'espoir de déjouer la vigilance des gardes - des brutes épaisses et sans cervelle, malgré tout le respect qu'il porte aux Taurens - affin de rencontrer l'un de ceux qui parlent la langue de la Terre et connaissent les chemins sinueux de la Voie de la Griffe.

Peut être pour apprendre plus de choses sur la réelle origine du polymorphisme druidique, peut être tout simplement pour parler à une oreille sage et savante - neutre, protégée des influences extérieures.

Pourtant, en creusant, encore, il se rend compte que quelque chose lui manque...

Un image lui revient brusquement - masquant sa perception : un combat, violent, furieux. Le bruit de l'acier, l'éclat d'une Hache qui s'abat sur lui, les cris rauques de créatures bardées de métal doré. Sa rage qui gronde et son sang qui bout. L'image est nette, et fait battre son coeur car il sait qu'elle est récente.

Etait-ce hier?

Ses doigts se crispent sur le rebord de la table, et un léger flou recouvre sa vision. Son vertige s'intensifie soudain, et comme les lueurs vacillantes du brasero flagellant les meubles se fondent chaotiquement dans sa vision troublée, une image née de ce chaos se forme dans son esprit - un visage inhumain orné de longues cornes noires, au regard pénétrant mais à l'air calme et réfléchi.

Les lèvres de l'individu se meuvent, comme en une parodie de paroles, mais aucun son ne sort de sa bouche, juste une sorte de meuglement incompréhensible ponctué d'un souffle rauque et bruyant.

Les petits yeux noirs le fixent intensément, puis se portent derrière lui, et semblent scruter le lointain un court moment. La parodie de voix reprend sa mélopée lancinante, et Chiron y perçoit une gravité inquiétante. Ce qui est en train d'être dit n'est pas le genre de chose que l'on répète, il le sait. Mais il n'arrive pas à comprendre le sens des mots. Ou bien il n'y arrive plus.

L'image se brouille encore, pour céder place à la vision d'une clairière baignée par le clair de lune. Claira se trouve à la lisière de l'espace dégagé, adossée a un arbre, les bras croisés, regardant fixement dans sa direction. Il perçoit une inquiétude mêlée d'impatience dans son visage mais elle reste impassible, immobile. Il sait pourtant qu'elle n'est pas détendue, ses mains sont proches des poignées de ses lames. Quelques mètres devant elle commence le tracé d'un large cercle irrégulier fait à même la terre meuble, orné d'arabesques étranges, qui délimite une vaste zone dont il est le centre. La forêt est irréelle, terriblement silencieuse, et les branches les plus hautes des arbres semblent se courber en une voûte inquiétante au-dessus de Chiron, comme cherchant à masquer la face argentée de la Lune - pleine et luisante - qui se trouve au zénith de l'endroit.

Une forme très haute et massive au sommet de laquelle il distingue deux cornes fait le tour du cercle, d'une démarche sautillante, rythmée mais irrégulière, et dont la respiration se matérialise en un nuage blanc dans la fraîcheur de la nuit, soufflé d'une régularité qui jure avec le déplacement chaotique de l'être. Les épaules légèrement courbées, il déploie par moment un bras puissant dans un arc de cercle autour de lui, laissant choir une fine pluie de paillettes argentées qui se déposent sur son chemin comme il continue à avancer méthodiquement.

Le souvenir s'estompe peu à peu - laissant une incertitude terrible en Chiron - et la dernière image qui lui reste est celle du visage du tauren (car c'était bien lui, il en est sûr), sourcils froncés dans sa direction, qui lui désigne le symbole d'Elune qui frappe ses gants puis la Lune brillant dans le ciel, et secoue la tête de manière résignée en esquissant un sourire.

Le visage disparaît comme Chiron retrouve la vue de son environnement. Il garde l'amère sensation que tout cela s'est produit, réellement, ce ne sont pas des hallucinations - mais le temps semblait happé dans son souvenir. Des pièces manquent, certaines choses n'ont pas ressurgi, il en est sûr.

Soudainement, une autre bribe lui revient, celle d'un long voyage, qu'il fait seul.

Pourquoi son esprit est il ainsi baigné de brume !

Il se souvient de l'odeurs des embruns, la mer..

Hier..

La voûte immense d'un arbre monumental..

Hier il était ... à Darnassus. Il se souvient désormais.

Il avait rejoint Teldrassil, dans un but bien précis. Il voulait gagner le Temple d'Elune, et méditer là bas longuement, questionner la Déesse pour qu'elle lui montre un signe, une ébauche de réponse à sa question. Ou plutôt éclaircir un passage obscur de son histoire..

Il se souvient précisément avoir voulu partir là bas pour trouver une réponse qu'il n'avait pas eut. Mais laquelle ? Que faisait il au milieu d'un cercle Druidique, en compagnie de Claira ? Et d'un Tauren ! Que s'était il passé ?

Il avait gagné la salle immense du Temple après un long trajet en Hyppogriffe depuis les Hauts de Reflet de Lune.

De Reflet de Lune

Il se masse les yeux - à travers son voile, le front plissé par la concentration.

« non.. Les arbres de la vision n'étaient pas ceux de Feralas.. Mais ceux de Reflet de Lune.. Quel sac de nœuds que tout cela, quelle misérable malchance Mais alors que s'est il passé entre Feralas et la vision Claira comment m'a t'elle rejoint ou est elle maintenant ? »

Brouillé, il est brouillé. Des réminiscences reviennent, contradictoires avec le déroulement précis des choses qui lui vient à l'esprit..

Et le mélange qui s'ensuit ne peux que le plonger dans une confusion plus profonde. Impossible de lier les jours, de se souvenir.

Sa mémoire est devenue comme un entrelac d'images et de sons, d'odeurs et de sensations qui ne se relient pas entre elles. Ou plutôt dont le lien a été modifié. Les souvenirs ressurgissent vaguement, et sont tous aussi flous - intemporels, indistincts.

Il se force à réléchir encore, peinant contre le mal de crâne qui commence à l'envahir.

Dans sa mémoire, il y a une histoire qui est déroulée, dont il perçoit les bribes. Mais quelquechose brouille cette vision, lui apporte des éléments lui prouvant qu'elle est fausse - sinon incomplète.

Pourtant il n'a pas rêvé Darnassus..

Il était allé jusqu'à la grande prêtresse, pour lui parler des raisons de sa venue, de ses interrogations quand au voile d'étoffe runique couvrant ses yeux, et surtout...

De ce qu'il y a derrière.

La Dame d'Argent n'avait pu lui consacrer plus d'une minute, mais lui avait dit que si quelqu'un pouvait lui en apprendre plus, c'était bien son ancien maître.



Celui qui l'avait recueilli lorsqu'il n'était qu'un tout petit Elfe élevé par une Ourse, terrorisé par la vue de ses semblables - lui qui n'avait même pas conscience de qui il était. Celui qui lui avait mis ce bandeau magique sur le visage pour le protéger, ou protéger les autres peut être.

Celui qui le premier eut conscience de quelque chose d'étrange en Chiron, de sa sauvagerie trop profondément ancrée, faisant de lui dès son plus jeune âge un suivant de la voie de la Griffe idéal. Trop assidu peut être, trop instinctif. Une volonté d'apprendre et de découvrir presque envahissante. Il connaissait déjà de nombreux secrets de la forêt, savait quelles plantes étaient bonnes à manger, lesquelles étaient dangereuses. Il en connaissait certaines qui aidaient les infections à guérir, ou faisaient sortir les corps étrangers de la chair.

Lorsque son Maître lui appris le premier secret de la magie de la nature, son premier pouvoir de Druide destiné à lui donner la possibilité de canaliser sa colère affin de la projeter sous forme d'énergie magique naturelle, il lui avait tout d'abord interdit de s'en servir.

Ses premiers essais étaient tellement concluants qu'il s'en était inquiété. Le petit Elfe semblait naturellement empli de colère, et le visage du Maître s'était assombri subitement en regardant le regard brûlant de Chiron lorsqu'il faisait appel au pouvoir - surtout en ayant égard à la difficulté inversement proportionnelle qu'il avait à maîtriser les subtilités de la Restauration, l'aspect guérisseur du Servant de la Griffe.

Chiron se souvient d'un soir d'entraînement où son Maître lui avait enjoint de ne pas quitter le village, et était parti d'Auberdine par le bateau - au beau milieu d'un orage naissant. Il n'était revenu que tard le lendemain, alors que la pluie n'avait cessé de tomber avec une intensité terrible. Il portait comme un trophée le morceau d'étoffe runique dans sa paume ouverte, et arborait un air satisfait que Chiron ne lui connaissait pas. Il lui avait alors passé le bandeau qu'il n'a plus quitté depuis. L'inquiétude du vieux Druide quand à la colère de Chiron semblait s'être dissipée en même temps que la rage habitant Chiron se faisait plus discrète lorsqu'il manipulait la magie naturelle. Il s'était même mis à s'intéresser aux filles de son âge, alors que tout portait à croire que la seule chose qui l'intéressait était d'apprendre plus, et de communier avec la Nature.

Mais ce Maître était mort plusieurs années auparavant - appelé vers les Forêts du Sud de Sombrivage, il n'en était jamais revenu. Il avait dit partir pour empêcher un peuple sanguinaire de déboiser la frontière de nos majestueuses terres verdoyantes, en Ashenvale. Chiron avait voulu suivre - sans succès.

C'est au bout de plusieurs jours que Chiron avait trouvé un message laissé a son attention, au cas où il ne reviendrait pas, et lui avait enjoint de se rendre à l'enseignement de l'Archidruide Fengal Staghelm pour continuer son apprentissage.

Et de ne jamais enlever son bandeau devant aucune créature pensante.



Il avait sourit, dépité, et avait expliqué à la Grande Dame qu'à moins d'une intervention d'Elune il ne pourrait de toute manière jamais reparler à son ancien Maître.

Elle lui avait conseillé de passer la nuit à méditer face à l'effigie d'Elune, de sonder son inconscient pour tenter d'en déterrer une bribe d'une quelconque utilité à ce sujet. Elle lui avait enfin dit que, parfois, certains mystères valaient mieux rester cachés, ou du moins ne devaient pas être découverts sans précautions. Elle avait posé un baiser sur son front incliné et l'avait fait se relever, le gratifiant d'un sourire doux.

« Relèves toi, Servant de la Griffe, Gardien des Kaldoreï. Va, demande à Elune de poser un rayon sur le voile de ton âme. Tu sais qu'elle te répondra par une nouvelle énigme, et d'autres questions surgiront. Ainsi est la Maîtresse des Mystères. Mais saches que je ne te le conseille pas pour autant. Si tu crois qu'elle te cache des choses, c'est que tu ne devrais certainement pas essayer de les découvrir. Le savoir est dangereux, Chiron. Il est la source de la ruine de notre peuple, de la perte de notre immortalité. Du moins, pas le savoir en lui-même, mais la poursuite inlassable de ses mystères. »

« Je suis inlassable, mais je ne poursuis pas de mystère. J'essaie juste de découvrir qui je suis, réellement. Ce n'est pas une fuite en avant, c'est un plongeon dans mes propres tréfonds. »

« Et si ton ancien Maître voulait te protéger de toi-même ? » avait elle conclu, se retournant d'un geste gracieux, clôturant par la même la conversation - signe qu'elle n'avait consacré que trop de temps déjà à Chiron.


Il avait pris congé, pour s'installer confortablement, dos à l'un des arbres poussant près du Puit de Lune, le regard plongé dans le visage figé de la Statue majestueuse trônant au centre du puit. Il s'était délesté de ses atours de Druide, pour ne laisser sur sa peau que la fine étoffe d'un Hanbok tissé par les Couturières de Reflet de Lune.

Il avait fixé ce visage, son esprit bouillonnant de questions, durant de longues heures, puis avait chu dans le sommeil.

Du moins le croyait il.


Et voilà qu'il se retrouve à Ironforge.
Avec la certitude d'avoir tué dans la Nuit. Mais quoi?

.... qui?

L'hébétement qui le gagne face aux questions qui surgissent alors le fait tituber. Il cherche d'une main hasardeuse le rebord de la table affin d'assurer son équilibre.

Il doit partir. Mais pas ainsi.

Il doit retrouver les bouts qui lui manquent pour comprendre. Mais pas tout de suite. D'abord partir.


Il retient son souffle une seconde, ferme les yeux, et se projette dans le fond de son âme, à la recherche du Pouvoir. Il le voit, le sent, s'en approche.

Puis au moment de le saisir, une hésitation le ralenti un bref instant, comme ..

Une impression qu'il balaye sur-le-champ.

Le long feulement de Mère Panthère surgit des tréfonds de son inconscient, remontant sa colonne comme il écarte les bras pour laisser la force l'envahir. Ses chairs éclatent, sa peau se fend pour laisser sortir les touffes de poils sombres. Un bref tremblement anime ses bras comme ils se rétractent, ses ongles s'allongeant et se solidifiant en griffes acérées. Quelques battements de cœur plus tard, il est à nouveau lui-même.


"Moi-même?" se dit il, surpris d'une telle pensée, totalement intuitive, sur sa situation.

"Moi même...?" se répète t il, contemplant son corps de félin musculeux. Il a de nouveau le sentiment d'être entier, vivant, invincible.

Un bref instant il hésite, se demande s'il ne devrait pas tenter de rassembler ses esprits à nouveau, puis il décide de sortir de la pièce. Aucune odeur ne lui parvient, les abords immédiats sont déserts. Il marche à pas feutrés, concentré sur son environnement comme s'il se trouvait au plein cœur de quelque donjon mortel. Il passe la porte de la pièce, observe par-dessus la rambarde l'escalier qui descend dans la salle plus bas. Dans saut leste il atterrit sur le garde fou, et descend doucement, patte après patte, comme certain de tomber dans un piège.

Il débouche dans la petite salle, une bibliothèque vétuste orne l'un des murs, l'âtre d'une cheminée aux cendres fumantes l'autre. Un fauteuil de petite taille trône face au feu.

Face à lui, la porte ouverte sur la salle gigantesque de la Grande Forge. Le bruit et l'agitation sont désormais omniprésents.


La voie est libre. Il se ramasse sur lui-même.

Et se fige.

Il sait qu'il ne devrait rien avoir a se reprocher. Il n'a pas rêvé le sang qui maculait son pelage, pourtant, et quand bien même il.. aurait tué? Cela aurait très bien pu être un animal ou quoique ce soit d'autre. Il n'aurait pas pu attaquer un bipède, c'est impossible.

De toutes façons personne n'a du voir quoique ce soit.. Il se sait un tueur redoutable. S'il a vraiment décidé de chasser hier, et qu'il est encore en vie.. C'est que sa proie est morte.

Rien a craindre donc? Pourtant, ce mal aise ne le quitte pas.

Il décide de sortir. Inconsciemment, il est perturbé par les battements de son coeur - trop affolés pour que ce soit normal - aussi, pour tenter de garder le contrôle, il se force à marcher doucement vers la sortie.

Il passe le pas de la porte, la chaleur étouffante de la forge lui saute à la gorge. La foule qui défile l'étourdit un bref instant, puis il sent une présence, toute proche. L'odeur d'un Kaldoreï, un frère de sang.

Il redresse la tête pour parcourir les alentours de son oeil acéré de chat, et fini par voir la forme agenouillée, tête en arrière - appuyée contre la colonne soutenant le balcon supérieur dans une attitude d'abattement.

La forme à l'air immobile, il n'arrive pas a discerner les traits de son visage, au travers du flou généré par le camouflage Elfique dans laquelle elle s'est réfugiée. Quel drôle d'endroit pour méditer. Il s'approche, après avoir pris une profonde inspiration. L'Odeur de l'inconnu lui dit quelque chose.

Il pense un instant à continuer sa route, puis se ravise, et se tourne vers la forme mystérieuse.

"Ifnu'ala." murmure t'il prudemment, cherchant du regard à percer la forme ombrageuse de l'Enfant des Etoiles. L'odeur est désormais plus précise, il la connait c'est une certitude.

Hasard?

C'est une voix de femme qui lui répond alors, légèrement faible ou du moins hésitante, ponctuée par un mouvement de tête dans sa direction.

"Chiron? Bonjour.. Excuse moi je ne t'avais pas vue"
"V'ai failli ne pas vous voir non plus... Eàmané."

D'un sourire, l'Elfe dissipe son camouflage, et regarde Chiron d'un air triste.

"Vous méditez? Quel drôle d'endroit pour fe faire.."
"Oui, je médite. J'essaie du moins."
"Vous femblez.. Perturbée. Quelquefose ne va pas?"

Le sourire forcé que la Kaldoreï esquisse lui fait comprendre que non, pas du tout.

Il hésite un moment, prêt à passer son chemin, puis constate que le regard de la Druide est toujours posé sur lui. Il la connaît assez peu, en fait. Très silencieuse, réservée même. Pourtant il a fait route de nombreuses fois avec elle, et sa grande amie, une Humaine du nom de Marah - une Dame étrange, légèrement mélancolique peut être, vétue de noir bien souvent et soucieuse de ce qu'elle voit du monde. Ils ont visité de nombreux lieux de pouvoirs, on accompli nombreuses glorieuses missions ensemble, du désert aride de Tanaris - sein de leur première rencontre - jusqu'aux profondeurs obscures du Temple d'Atal ' Hakkar.

Eàmané est une Druide, tout comme lui, mais une de celles qui est empreinte de sagesse et de modération. Ne parlant que lorsque nécessaire, mais toujours vive, alerte, attentive aux autres. Une alliée précieuse en toutes circonstances. Il appréciait grandement la compagnie de ces deux amies, et leur vouait une admiration réservée et respectueuse. Il connaissait bien mieux Marah qu'Eàmané, pourtant, elle plus loquace malgré son côté ténébreux, obscur, inquiétant. Elle se disait Prêtresse de l'Ombre, un terme que Chiron ne comprenait pas vraiment. Il lui avait parlé, parfois, de son idéal, de ses rêves. Ils avaient partagé quelques rires ou réflexions sur la nature des gens, sur la folie du monde. Lorsqu'ils se croisaient, les quelques paroles qu'ils échangeaient alors - ou les quelques gestes - leur suffisaient à se témoigner leur respect mutuel.

Ils discutèrent, souvent, simplement, de choses et d'autres, il parlait de son clan, de son désir d'apprendre et d'observer la Horde pour la comprendre. Elle lui racontait ses misères de Soeur du Couvent, de sa personnalité qui déplaisait à ses supérieurs, et de sa volonté de trouver son propre chemin au milieu des routes qui se croisent en Azeroth.

Pour toutes ces raisons, Chiron estime beaucoup ces deux compagnes.

Aussi il répond au sourire d'Eàmané par un feulement doux, comme il saute prestement sur le rebord avoisinant et s'installe, la tête sur les pattes avant. Il se dit aussi que cela lui permettra de vider un peu son esprit des questions qui le perturbent.



La voix douce de l'Elfe le tire de ses songes.

"Comment vas tu, toi, Chiron?"

Il ment immédiatement, par réflexe de protection. Personne ne doit savoir pour l'instant.

"Très bien, très bien. Que fe paffe t'il alors? Vous avez l'air ... "

Le visage de l'Elfe se relève vers lui.

"Chiron, tu ne trouves pas qu'il y a quelque chose d'étrange avec le Rêve d'Emeraude en ce moment?"

Les yeux ornés des marques Druidiques de la Fille des Etoiles sondent son regard avec insistance.

Chiron gronde doucement, signe qu'il réfléchit à ces mots, puis fait un signe négatif de la tête.

"Que voulez vous dire? Que fe paffe t'il?"

Eàmané se penche vers lui, nerveuse.

"Je ne sais pas, en ce moment je.. "

Elle s'arrête, comme indécise.

"Ca ne t'arrive jamais de .. Comment dire?"

Elle s'arrête à nouveau. Chiron lève un sourcil interloqué, puis constate que des larmes silencieuses commencent à couler le long des joues de la Dame.

"Dame Eàmané.. Je ne veux pas vous causer du tord, je.. ferais peut être mieux de vous laisser non?"

"Non, attends! Reste. Peut être pourra tu m'aider.. Je ne contrôle plus mon sommeil Chiron. Le Rêve d'Emeraude semble de plus en plus instable, pesant.. "

Chiron pèse le poids de ces paroles, songeur. Y aurait il un lien entre leurs histoires?

".. il m'arrive de sombrer dans le sommeil, au milieu de nulle part, sans raison.. Je ne comprends pas ! Tu ne ressens pas cette même ... variation ? Quelque chose est étrange.."

"Non, je ne vois vraiment pas... Mais c'est terriblement inquiétant. "

« Parfois je ne me réveille qu'au bout d'un très long moment.. parfois juste après »

« Vous voulez dire que vous hibernez de manière complètement déréglée ?! »

Les yeux de l'Elfe s'embuent d'une nouvelle vague de larmes. Le mal aise envahi Chiron, face à la droite et fière Druide qu'il croyait connaître et qui semble si fragile désormais.

"Je suis donc la seule.... la seule.."

"Eàmané fe que vous dites est très important. Fi il f'avère que le Rêve d'Emeraude fubit une perturbation, alors l'Arfidruide doit être mis au courant, et fi il ne l'est pas ..il faut lui dire.. Vous devez aller a Teldraffil au plus vite. Vous ne devez furtout pas laiffer les foses empirer. Nous.. Le monde a bevoin de nous encore, les Druides ne doivent pas faillir, pas encore. "

Comme il prononce ces mots, il sait qu'il y a quelque chose de très grave derrière ce que dit la Druide. Il a entendu l'histoire d'un Druide Ours qui était happé par le Rêve d'Emeraude, mais c'était il y a fort longtemps. Il pense aussi à son réveil, brutal. Il réalise que quelquechose ne va pas, que peut être que tout cela est lié.

"Il ne faut furtout pas que vous perdiez de temps, Dame Eàmané. Furtout pas. Ne reftez pas feule avec vos queftions. Fendral vous verfera furement fon fermont fur le peu de temps qu'il a mais ve ne penfe pas qu'il puiffe paffer outre quelquefove d'auffi grave."

Un mince sourire éclaire alors un peu les traits de l'Elfe vêtue, tout comme lui, de plumacier.

"Merci Chiron. Merci de m'avoir écoutée. Je vais me diriger vers Darnassus, alors, je voulais le faire mais manquait de courage.."

"Vous? impoffible !" dit il alors en souriant.

Elle lui rend un sourire en demi teinte, légèrement amusée.

"Marah ne comprends pas ce genre de choses.. A fortiori je ne comprends pas bien ses histoires de plan des Ombres.."

Chiron lui réplique par un clin d'oeil.

"Il faut que je me dépêche, alors.. Merci encore, Shan. De tes conseils et de ton écoute."

Elle s'approche, et dépose un délicat baiser sur le museau de Chiron.

Profondément en lui, quelque chose tressaille un bref instant, puis l'impression disparaît.

"A bientôt, Eàmané.." Il ne sait pas quoi ajouter d'autre, trop perturbé par les questions que font surgir en lui l'histoire de la Dame Elfique. Il se redresse comme elle prend l'aspect du Félin. Ils se regardent un bref instant, s'approchent l'un de l'autre. Ils échangent un amical coup de langue sur la joue, puis se séparent, chacun livré a nouveau à ses propres tourments.

Il espère qu'il pourra la revoir, et l'aider à comprendre son mal, si Elune le veut.


La ville bouillone.

Il doit regagner Teldrassil au plus vite, lui aussi. Pourvu que personne n'ai trouvé la cache ou il laissa ses atours de Druide la veille.

Il aurait l'air bien bête.

Souriant pour lui-même, il lance un regard circulaire et perçant à la Grande Forge, baignée - comme toujours - d'une cacophonie incoercible et mêlée de coups sourds assénés sur le métal, d'éclats de voix tonitruants des commerçants, larrons et autres grippe mitaines, ainsi que du lent bruit sourd des longues traînées de lave ardente perçant des déversoirs sculptés crénelant le plafond de la grotte.

Plus loin il devine déjà la grande place, et son cortège habituel de puissants héros pavanant ou commerçant, tirant profit de leurs chasses au pouvoir - ou simples âmes égarées qui, attirées par quelque destin obscur, croisent le chemin des coqs d'Azeroth.

Se fondre dans une telle foule sera aisé.

Il ne pense même pas à l'opportunité des Griffons, dont les niches se trouvent à quelques mètres de lui, ajoutant à l'ambiance sonore un concert de piaillements rauques : outre la barrière du Maître qui sera plus que suspicieux de voir un Elfe nu prendre son envol, il n'a tout simplement pas d'argent , et le froid glacial de Dun Modr viendrait à bout de lui avant qu'il aie passé les montagnes.

Le mieux qu'il puisse faire est de se trouver un endroit plus tranquille, où il puisse réunir les quelques minutes nécessaires à la préparation de son Sort de Forme Lunaire - un des premiers dons confiés aux Druides, leur permettant de regagner Reflet de Lune, la Terre Paisible des Druides, à volonté et instantanément.

Nourri de la cacophonie ambiante, son ras le bol atteint subitement un stade critique : une brusque impulsion le pousse à se projeter au-dessus de la rambarde. Il atterrit lestement, conscient d'un bref flottement dans la marée des passants qui - même habitués d'une telle présence - suspendent leur marche l'espace d'une seconde, comme soucieux de voir un prédateur dans toute sa splendeur.

Autant pour la discrétion.

Il se ramasse encore sur lui-même, et s'élance en direction des gigantesques portes de la ville, fouettant le sol de frénétiques coups de patte.

Déjà dans son esprit se trace le trajet qu'il doit suivre pour atteindre le repaire de l'Aube d'Argent, près des montagnes - là, il sera tranquille suffisamment longtemps pour faire appel à la Magie d'Elune. Comme il arrive à la statue de Nain ornant l'entrée telle un gardien, il sent son cœur battre plus vite, porté par l'arôme de pin dans la fraîcheur de l'hiver permanent de Dun Modr. C'est avec toute son énergie qu'il s'élance au dessus de la volée de marches, fendant l'air comme un trait de noirceur au dessus des badauds.

Quelques uns se retournent, d'autres s'affolent, bien plus l'ignorent.

Certains même peut être le poursuivent.

A cette pensée il accélère encore, ses pattes foulent déjà la neige du dehors en projetant un nuage poudreux dans son sillage.

Dans son regard, un but : le bord de l'immense falaise surplombant la vallée du petit peuple.

Il bondit dans le vide, suspendu au zénith de sa trajectoire pendant une seconde où ses poumons explosent, où tout son sang bout de cette liberté enivrante et pourtant si futile.

Puis la chute commence, il la connaît bien : par de rapides mouvements de queue il stabilise son corps ballotté par le vent, ses pattes avant légèrement repliées pour s'orienter dans le sens de la pente. Il passe plusieurs dizaines de mètres de rochers de la sorte, puis comme il arrive au niveau de la descente neigeuse précédant un nouveau précipice, il détend brusquement tout son corps.

Ses quatre membres frappent le sol et le propulsent tel un ressort vers un nouveau plateau situé plus bas.

Le vent ne cesse de siffler de plus en plus fort et sa gueule ouverte d'exaltation se remplit de neige.

Dans une succession de puissantes envolées il termine finalement sa longue chute au pied des falaises. La tension de ses muscles est douloureuse, mais il se rue vers le paysage blanc sans attendre la nuée de pierres et de neige qui arrive a sa suite dans un vacarme inquiétant. Il entendrait presque le fracas des fusils des Montagnards d'Ironforge patrouillant les abords de la forteresse.

Il gagne un surplomb longeant la route qui mène à la passe du Nord et observe rapidement les alentours sans ralentir sa course.

Au contraire. Malgré la grande célérité de Chat, ce dernier manque d'endurance, et Chiron sait qu'il va s'épuiser à courir dans la neige de la sorte. Arrivé en haut d'un surplomb, il jaillit au dessus d'une source naissante et appelle l'esprit du Guépard pour s'incarner en lui. La métamorphose est rapide, subite. Taillé pour la course, les muscles durcis de Guépard remplacent ceux de Chat, comme le noir de son pelage s'éclaircit jusqu'à n'être plus que des tâches sur un poil clair. La forme profilée de son crâne s'allonge légèrement, et lorsque ses puissantes pattes avant touchent la neige fine du sol, Chiron salue d'un rugissement la puissance qui l'arrache à nouveau à la gravité, tel un ressort, comme sa course se transforme en une cavale éperdue au travers des arbres - il exulte, le vent sifflant dans ses oreilles a toute vitesse comme il accélère encore, muant la neige qu'il soulève en un long nuage poudreux, éclair perçant l'immaculée blancheur de l'endroit.

Il avale les kilomètres en jubilant, perforant les amas de branchages et slalomant entre les arbres épars, cherchant toujours à accélérer encore plus, jusqu'à la limite du formidable coureur qu'est Guépard.

Quand il arrive en vue du repaire encaissé dans la montagne, il se rue à l'intérieur, regagnant immédiatement sa forme d'Elfe - Guépard n'acceptant de s'incarner dans les Druides qu'à ciel ouvert.

Il claque la porte derrière lui et s'appuie contre elle, un sourire aux lèvres, et le souffle court.

« Faisons vite » se dit il à lui même.

Il se positionne au centre de la pièce, puis commence à entamer une douce mélopée en Elfique en brassant l'air de mouvements rituels.

Une douce lumière argentée commence à prendre forme entre ses mains, longeant le bout de ses doigts pour crépiter et s'amasser telle deux boules luisantes à la place de ses mains.

Il continue lentement sa mélopée, malaxant l'énergie comme si elle prenait substance, regardant fixement par l'entrebaillement du volet du chalet affin d'y projeter son corps une fois sa forme Lunaire atteinte.

Il sent l'énergie envahir le reste de son corps, après s'être accumulée lentement dans ses membres supérieurs. Il la laisse se frayer un chemin dans tout son être, jusqu'à son cœur.

Il peaufine le sortilège en visualisant dans son esprit la surface miroitante du Lac Elune'Erah, sertissant la baie de Reflet de Lune tel un joyaux, comme destination de son voyage.

Il relâche subitement sa concentration et laisse l'énergie faire le reste en lui imprimant un élan mental subit.

« BLAM ! »

Il se dématérialise à l'instant même ou la porte du chalet vole en éclats, abattue par un monumental coup de pied qui la fait voler en tournoyant dans sa direction.

« Par »

Mais sa silhouette est déjà effacée et la porte se fracasse contre le mur derrière l'endroit où il se tenait une seconde auparavant.

Il n'a pas le temps d'en voir plus, la Magie l'entraîne déjà hors du chalet, a une vitesse fulgurante, percuter dans le ciel la face cachée de la lune et rebondir vers Azeroth, loin au Nord de Kalimdor, au milieu du cercle de montagnes infranchissables qui entourent le siège de la communauté des Druides, où il reprend, une seconde plus tard, sa forme tangible.

« Elune ! » termine t il dans un souffle.

« Il s'en est fallu de peu.. Alors ce n'était pas qu'une impression.. On me poursuis bien »

Chiron se fond subitement dans les Ombres, faisant appel à son don Elfique, pour se donner le temps de réfléchir.

« J'ai des ennuis, là, je crois que je vais avoir besoin d'aide. Plus que jamais. Mais qui ? Et contre quoi ?»
 
Décade du Lapin
Troisième Ère [3]
Lune de la Force
Décade du Panda
Décade du Gorille
Décade de l'Ours
Lune d'Agilité [2]
Décade du Tigre
Décade du Singe
Décade du Faucon [2]
Allongée sur le sol - 1 - Claira
Elle n'arrive pas à sortir de l'étrange torpeur.
Peu à peu, des sensations lui viennent.
Le froid de la pierre sur ses hanches nues, des reflets mouvants, bleutés, qui dansent derrière ses paupières closes, une... plume, contre sa joue, un bandeau qui lui enserre le front, son ventre dur comme un poing fermé, une odeur de feu sur sa peau.

Des images lui arrivent sans ordre, sans logique, inexplicables encore.
Le Loch. Un druide blanc, qui lui sourit et pose ses mains sur son ventre.
Des bribes de paroles.
« N'ayez pas peur, Claira, ce ne peut être un mal »
« Je vous aiderai, je vous porterai sur mes épaules, s'il le faut »
« Il faudra nous revoir très vite »

Une vague d'angoisse la submerge, et reflue, aussi vite qu'elle était apparue.

Une soirée dans la neige, autour d'un feu de camp, ses deux frères qui la regardent parler, sans mot dire, et leurs gestes bienveillants. Friganix qui passe ses bras autour de ses épaules, Cylass qui, pour une fois, se tait et la contemple avec douceur et compassion.

Un nain en robe blanche qui l'aide à marcher.
Qui la bénit, d'un geste de la main, et lui dit son soutien. Ses yeux tristes et inquiets. Son sourire.

Une demi dragonne en tenue de cuir rouge.
Du feu.
Ses propres mains dans le feu.
Serrée dans les bras de la femme, elle gémit sourdement et se laisse happer par les flammes.
Une lumière qui la brûle.
Des paroles étranges, dans une langue rauque, mi humaine mi bête.

Tout ce sang.
Ce froid de pierre après le rituel.
Timhor qui lui tend un flacon, et lui caresse la joue. « Tu vas tout oublier, tu es libre de choisir ce que tu veux garder ».
La mer souterraine.
Le silence.
Son ventre qui la brûle et la vie qui s'échappe.

Elle gémit, et s'enfonce à nouveau dans l'oubli.
 
Allongée sur le sol - 2 - Claira
Elle a prié, crié, pleuré, pour que les Dieux l'entendent, au moins une fois, juste cette fois.
Si vous ne me le donnez pas, au moins laissez moi l'oublier.
Ses prières sont restées sans réponse.
Elle garde dans sa bouche le goût de ces nuits là, leur infinie douceur, l'espoir qui revient et qui tremble avec elle.
Et puis elle se souvient.
Le silence. Son silence. Il hausse les épaules, les mains vides, paumes ouvertes vers le ciel. Il sourit sans rien dire. Il s'échappe. Elle devient transparente et s'effondre sur elle-même, comme un château de sable.

Feralas, des semaines plus tôt.
Leurs peaux à tous les trois qui se reflètent et se fondent. La vie qui coule en elle, puissante, et la remplit de peur et de tendresse mêlées.

Le Rivage.
Les larmes de l'Humaine, ses pieds nus et sa fuite. Leurs cœurs qui se brisent alors qu'elle a choisi de se rester fidèle, à elle-même, avant tout.

Le Lac.
Ses bras à lui qu'il a passés autour d'elle, qui la tiennent serrée. L'odeur de sa peau. L'espoir, miracle. En silence, à nouveau. Les morceaux de leurs cœurs qu'elle ne suffira plus à tous rassembler. Impuissante, les yeux tournés vers lui qui ne sait plus la voir, qui cherche autre chose, derrière elle. Et l'amour qui n'est plus un refuge mais une malédiction, sa gorge qui se serre et retient malgré elle les paroles nécessaires.
Le chemin vers la Lune, et retour
Leurs espoirs qui sonnent comme des suppliques, et comme des prières résonnent dans le vide.

Le Lac, par une journée de mort.
Ils sont venus pleurer tous les deux, côte à côte, la perte de leurs amis, leurs craintes de l'avenir. Et soudain le Druide Blanc qui se tourne vers elle et l'interroge du regard. Elle ne peut se soustraire à ses yeux, à son instinct de vie qui voit clair en elle. Elle lui dit sa terreur d'avoir été maudite, d'être promise à la mort car elle a trop voulu, trop prié, trop cru en ses pauvres forces, naïve.
Cette Chose me dévore, Zargoareth, doucement, et me tuera sûrement
L'elfe lui raconte une histoire, celle de Iaorana et de ses deux enfants, mi-elfes, qui ont réussi à survivre sans pour autant tuer celle qui les a portés. Il la console et la berce, lui dit de croire en elle, de poursuivre son propre chemin, d'accepter d'être seule. Il lui interdit de mourir, lui promet de l'aider à trouver un remède qui la rassurera, affirme que cette route est possible.
Elle aurait bien voulu croire
Elle a mis toute sa foi en de nombreuses promesses, mais se tient là, debout, sur une colline de cendres.

Le jour, la nuit.
L'angoisse lancinante, la douleur qui s'obstine et la mord, son ventre qui se durcit et se ferme comme un poing.
La solitude, immense, assourdissante.

Grim Batol.
Les yeux noirs qui la scrutent, la peau blanche de Mystina qui se tient devant elle. Et un pacte, plus qu'une autre promesse.
Si tu m'aides à libérer Sithis et lui trouver un corps, je te donnerai ce que tu me demandes sans le dire
Claira baisse les yeux, acquiesce.
Je dois me préparer, alors
- Prends tout le temps dont tu auras besoin, sois prête, nous n'aurons qu'une seule chance, sinon tu en mourras

Elles s'observent un moment, et échangent leurs sangs.
Tu es liée à Sithis. Réfléchis bien encore, essaie de lui parler, tout reste encore possible.
Claira détourne le regard.
Je trouverai un moment. Je ne veux pas mourir. Et le prix que Sithis demande est... bien trop élevé

Les jours passent.
Ses forces s'amenuisent, la douleur s'aggrave, elle ne peut plus marcher, parfois, elle est prise de vertiges.
Certains l'épaulent, de loin.
Assourdissante

Debout aux portes de la Ville.
Elle est arrivée tout au bout de ses forces. Elle a plongé ses deux mains dans le Feu, elle a réuni les plumes qui protègeront son esprit. Elle a fini de se préparer.
L'espoir est revenu, pourtant, mais sous une autre forme.
Timhor, qui retrouve la mémoire, et reste à ses côtés. Timhor, qui lui a proposé une autre solution, l'Oubli.
Claira s'éloigne un peu, avance jusqu'au ravin, s'assied.
Dans sa tête s'élève la voix de Sithis, qui réclame sa part.
Entre ses mains glacées, la dague à la froide lumière, et une fiole pleine.
Tu vas tout oublier, tu es libre de choisir ce que tu veux garder.
Ses yeux qui la supplient.
Tout est encore possible, laisse moi t'accompagner.
Elle relève son visage vers le ciel.
Vide.
Assourdissante

Le flacon roule entre ses doigts, presque machinalement.
Je ne veux pas mourir, je préfère l'oublier
Chiron
 
Lune de l'Esprit [1]
Décade de la Chouette
Décade de la Baleine [1]
Allongé sur le dos
Cela faisait des jours que nous nous parlions a peine.

L'air était lourd, et j'avais l'esprit occuppé, soucieux. Trop souvent sur le front des batailles, pour guérir et protéger ceux qui affrontent la Mort, ceux qui tentent de faire vaincre la Vie.

Trop plongé dans les questions lancées a Elune, aussi, pour voir ce qu'il se passait autour de moi.

Trop déçu, aussi, pour être souriant, pour penser a autre chose que le combat, le repos, le combat..

Trop habité par les fantômes, si frais à ma mémoire, malgré les jours et les nuits écoulées.

J'essaie de revoir ces jours mornes, qui ont succédé aux jours de lumière, a la joie d'antan - un passé pas si lointain, mais ils sont flous et incomplets, brouillés par la douleur et les larmes, et la folie qui pousse a s'oublier dans la fureur du combat.

Souvent nous nous croisions, nous frôlions.. des caresses du regard, ou des sourires génés.

La marque dans son esprit de ce jour a Feralas, je la voyais, présente, la rongeant.

Elle, moi.. et Lyndrielle.. Le ciel et la Forêt en écrin de nos membres mélés..

Les coeurs qui battent, apeurés, indécis, dérangés. Et les mains qui se tendent, qui frôlent encore, et les corps qui s'approchent, apprenent a se parler, lentement, discrètement.

Les esprits brouillés par des souvenirs qui nous mentent, tous trois enlacés, et nous font perdre pied sur qui nous sommes.

Elle hésitante, comme.. résolue a tout pour goûter encore au fruit perdu..

Elle, délicate, la poussant, l'accompagnant jusqu'à mes bras.

La fille a la peau d'albâtre qui prends ses mains et les passe autour de mon cou, la serre contre moi, et nous regarde plonger dans notre regard.. Y Lire les merveilles, celles qui sont parties, celles qu'on croit perdues. Celles qui frémissent encore, mais plus seules au monde.

Les trois bouches qui se mélangent, et le sang qui cogne, sourd, lourd.

J'étais dans un état second, le temps qui passait m'avait éloigné de Claira, m'avait rapproché de Lyndrielle.

Et ce jour tout s'était mélangé, tout avait pris fin, ou commencé...


Les images qui reviennent de ce jour a Feralas sont encore mouvantes, indécises.. cela aurait pu etre un rêve, cela aurait put.. Mais cela avait été plus.


Et je sentais combien dans son Coeur la douleur était forte.

Partager ce qui avait été exclusif..

Quelque part, pour moi, tout revenait a sa place, en souvenir de ce Maijstral qui avait failli .. qui avait failli la saisir et la porter a ses lèvres, lors que je m'interdisais de porter regard sur la plus belle des Elfes, car mon coeur était a Claira.

Ce jour la, je n'avais pas du choisir. Pour la première fois depuis des siècles, je prenais ce qui m'était offert, sans réfléchir, sans avoir peur. Mon sang battait et le leur aussi, l'instinct...

L'instinct était maitre alors. Et j'en étais heureux. Je repensais a ce soir , près des berges du Lac Elune 'era, et ma longue discution avec cette Elfe qui marche dans l'Ombre.. Le récit de nos douleurs respectives, de nos craintes.. Et notre promesse mutuelle, lorsque le jour pointa ses rayons a travers les branchages, de nous fier désormais a notre instinct, quoiqu'il advienne.

Une résolution, une promesse, commune, solution a deux problèmes distincts, de deux êtres qui se connaissent a peine, mais savent qu'ils vivent des choses similaires.


L'instinct, oui, je l'avais suivi. Il m'interdisait de choisir, il m'ordonnait de prendre ces deux femmes qui m'étaient offertes, sans réfléchir, car tout disait qu'il le fallait. Elles y compris.

Mais c'était les lèvres de Claira que je redécouvrais, et sa douceur, et le parfum de sa peau fruitée, tendue par ses muscles taillés dans la bataille, féline et caline... ronronnante et aimante.

Et lorsque le sommeil nous pris, enlacés tous trois, l'esprit avait été rangé au plus profond de nos âmes. Le silence pour seul compagnon, et nos souffles réguliers.

L'inertie.


Des jours avant... et depuis peu de choses.. le combat, les débats, la Meute..



Et ce soir là, à la grande forge..

Son odeur qui avait changé. Elle semblait.. sombre, quelque peu, mais surtout.. Autre.

Son regard... vide..

M'apercevoir qu'elle semble regarder un inconnu.


Au fond de moi, la rage, bien sur, mais surtout la peur..

Et ses yeux qui clignent, elle secoue la tête, et lève les yeux sur moi

"Chiron..?"

Ses mots, confus, sa paleur qui m'inquiétait.. le bandeau posé sur son front, comme collé a ses cheveux.

Et elle qui se crispe, porte les mains a son ventre, et gémit de douleur.


Ma peur, subite, alarmante. Ma colère, lorsqu'elle parle de Mystina, d'un rituel... de souvenirs flous..

Et son regard a nouveau vide qui se lève vers moi, interrogeant un inconnu du regard.

Un pacte. Un échange.


Son souhait de ... tout oublier.

Et la vision de notre passé qui s'efface de sa mémoire, la détresse m'avait frappé en plein coeur.

"A t elle tant besoin de moi.... qu'elle en vienne a effacer tout souvenir pour pouvoir vivre encore.. Sans?"

Son air géné, en détresse, mes tentatives pour enlever ce bandeau puant la magie profane.

Mylea, vétue de sa robe de Devôt, approchant de nous pour voir de quoi il retourne. Affollée par le bandeau, par les mots de Claira. Prononcant des mots qui guérissent, qui apaisent. Qui m'aide a rompre ce bandeau malsain, que Claira n'a tellement plus envie d'enlever qu'elle en dort avec.. Sa bénédiction de Lumière, issue du coeur pur d'une servante de la Vie..


Et la voix qui sort des Ombres.. Celle de l'Elfe qui marche au milieu d'elles. Les mots Elfiques, s'adressant a moi, me demandant si c est de Claira qu'il s'agit, d'elle dont nous avions parlé cette nuit a reflet de Lune.

Les questions sur Mystina, et Claira qui fouille les ombres du regard, tentant d'apercevoir en vain quelqu'un qui n'est visible que lorsqu'il le désire vraiment.

L'Elfe cachée qui s'inquiète de Sithis, qui me confirme que Mystina était étrange..

Et dont la présence s'évapore alors, me laissant seul, avec Claira, agenouillée, nauséeuse.

Le bandeau magique rompu, sur le sol.

Mylea qui s'écarte, prudemment, nous couvant d'un regard protecteur.


Mon désir subit de m'assurer que.. quel que soit ce qu'il se passe, que Claira soit en sécurité.

L'appel a Chat, sa force qui m'ennivre. Claira qui s'accroche a mon cou, a moitié évanouie par la fatigue, et se laisse porter.

Moi partant en trombe, a travers la cité des Nains, jusqu'au tramway. Déposer la belle humaine sur le sol du wagon, en grognant au voyageurs tentant d'approcher.

La porter encore, jusqu'a ce ponton, sur les quais de Stormwind, et la déposer sur la barque ammarée.

Face a la Lune, dans le calme.

Et ses yeux qui s'ouvrent, lentement, se tournent vers moi. M'observent comme un étranger.

Mes sens qui l'analysent, et comprennent, peu a peu. Son corps qui reconnait le language du mien, sa peau qui frémit lorsque je prends ses mains, pour lui parler.

Mais son esprit ... Différent. Comme altéré.

"je.. Chiron, j'ai l'impression que.. nous nous connaissons bien, non?"

L'abime qui s'ouvre sous mes pieds, dans mon âme : elle se souvient de moi, mais pas de ce que nous avons vécu.

Mon visage qui se dresse vers Elune, les larmes coulant dans mon coeur, mais sans pouvoir sortir.

Et sa douleur, encore, étouffée, comme elle se plie en deux, les mains sur son ventre.

Je la presse de questions, j'essaie de savoir , de comprendre, mais...


... elle est différente.

Elle souffre encore, sans savoir, alors je décide finalement - contre mes principes - d'utiliser la Magie Naturelle pour sonder son corps, connaitre la source de son mal.

Mon incantation, lente, mesurée, le pouvoir qui se charge dans mes mains, comme elle s'effraie un peu que je la touche.

Outrepasser la douleur d'être un inconnu. Penser a elle, juste a elle.. Juste penser a quel point je l'aime, je l'aimais, et la guérir, même si elle n'aura plus aucun souvenir de nous, de nos étreintes, de nos promesses, mais aussi de nos douleurs et de nos malheurs..

Ne pas l'envier d'être libérée de notre douleur. Me rappeller le premier de mes enseignements Druidiques : que les choses suivent leur cycle, qu'il ne faut pas briser les décrets de la Nature. Qu'il faut utiliser notre douleur pour progresser, tirer de chaque échec, chaque réussite, de quoi avancer dans une direction meilleure. Me convaincre qu'il me vaux mieux vivre avec cette douleur, que l'oublier comme si de rien n'était.


Se concentrer, et .. poser mes mains sur son ventre, laisser l'énergie perler goutte a goutte a travers son corps. L'innerver de la puissance de Mère Nature, afin qu'elle même découvre ce qui est en elle. Remettre a neuf ses énergies.

Ses membres qui se tendent, et les étoiles qui brillent.

Ma main dans son dos, canalisant son essence le long de sa colonne, guidant les tourbillons le long de son système nerveux. L'aider a analyser ses sensations, a comprendre ce qui est en elle, d'ou vient la douleur.

Et ses yeux qui s'éclairent, alors, ses mains qui se crispent sur les miennes, son cri étouffé.


Son visage inondé de larmes, qui semble me reconnaitre, qui semble se souvenir.

"Chiron... Chiron..."

Elle m'explique son choix, sa douleur. Son voeu de continuer a vivre. De nous oublier... Le rituel, le présent de Sithis, l'échec, enfin, de la Vie qui était en elle et devait être donnée à la part sombre de Mystina.

Le clapotis des vagues venant lécher la barque..


Le temps que je comprenne ce qu'elle a fait, pourquoi.. Les larmes qui coulent, aussi sur mon visage..

Et tout ce que j'ai oublié..

Puis .. les yeux perdus dans la voute étoilée, ses questions, les miennes..

Ses questions, sur moi, sur Lyndrielle.. Sur elle..

Et mes mots qui s'élévent, doucement, comme je plonge en mon âme pour la laisser parler d'elle même, pour lui conter mon histoire, celle que mon coeur a vécue...




"Je suis un voyageur échoué, Claira, un marin voguant sur une mer incertaine depuis aussi longtemps que je me souvienne...

Un errant, la tête perdue dans les étoiles, a la poursuite d'un passé, d'une gloire perdue.. La déchéance de mon peuple.

Durant mes voyages, j'ai toujours erré en me laissant porter par les vents, sans savoir où j'allais.

Le marin, seul en mer, qui contemple le ciel, y voit des étoiles, apprends a les connaitre, a leur parler..

Se sont nos compagnes de voyage, dans notre solitude.

Dans le ciel de mon existence... Trois étoiles ont brillé.

J'ai vogué longtemps porté par les deux premières.

Mais la troisième, lorsque je l'ai découverte, brillait tellement fort qu'elle en a éteint les deux autres dans le ciel.


-Lyndrielle....?

... Non, pas Lyndrielle. C est toi, Claira, cette étoile...

Une telle lueur, une telle intensité, que toutes les étoiles du ciel étaient pâles en comparaison.

J'ai oublié les deux premières, je les ai abandonné. La clarté.. ta clarté les a obscurcies.. Et une étoile qui s'osbcurcit.. est une étoile mourrante.

J'ai changé de cap, fasciné par les merveilles de ce troisième astre, plus brillant et plus beau que tout ce que j'avais pu voir auparavant : la mer titanesque rongée par les tempetes, le disque solaire s'écrasant sur une mer d'huile.. J'ai tout abandonné pour cet Astre incandescant.

Seul comptait pour moi le fait de voguer dans sa direction ,elle qui éclairait mes Nuits et me donnait un but vers lequel faire voile, promettant mille découvertes sur le chemin..

Je l'ai suivie, alors, sans relache, passionné, j'avais dit adieu aux deux autres, et leur avait tourné le dos.


J'ai vogué longtemps, le front haut, dressé vers le ciel, souriant à cette lumière rassurante, et mystérieuse, et délicieuse.. ne sachant point trop où cela me ménerait, mais convaincu du fond du coeur qu'une telle clarté ne pouvait qu'augurer monts et merveilles.. Peut être me mener à une île perdue, secrète, à un atol de paix sur cette mer de violence, de doutes, de tristesse..

Mais vint un temps... où la mer s'agita, et la tempête gronda, ma barque cahotait, et je n'y voyais goutte. Les vents s'étaient levés, et soufflaient, forts, bruts...


Parfois on se retrouve porté par des flots trop violents pour tenter d'y faire quelque chose, alors..

.. alors on se repère a ce qu'on a, a ce qu'on peux, et on tente de survivre a la tempête..

Les yeux fixés sur cette étoile, la main sur la barre, pour ne pas la perdre de vue.

Et les flots tumultueux m'ont secoué, balloté..

J'avais toute foi en cette étoile, elle qui brillait pour moi et moi seul... Elle qui était si belle, si limpide, que rien ne suggérait la méfiance ou la prudence.. Elle était ma raison de naviguer, d'avancer encore.

Mon but, mon essence..



Mais les dieux sont joueurs, surement, et il ne leur plait guère qu'on survive aux éléments déchainés, alors..

Peut être que la lueur de l'étoile était trompeuse..

Peut être que j'avais pris le mauvais chemin pour la suivre..


Je n'en sais rien.
Toujours est il que je me suis vu m'échouer sur des récifs.
Et que j'ai... fait demi tour ?
Non
Ou que j'ai tenté debref

Les métaphores ont leurs limites


- Mais


J'ai cessé de croire en cette étoile, pour cela... en fait j'y croyais toujours, bien sûr
Mais j'avais bien cru mourir
Alors la peur... parfois
Et... et puis à force de la regarder, seule dans ce cielbrillant, quoiqu'il arrive, et que je ne voyais qu'elle... et là j'ai voguélongtemps, longtemps
Ne sachant plus
Avant, je me fiais au ciel je n'avais pas besoin de cette étoile
Et puis, au moment de m'en détourner et bien il était devenu dur de se repérer sans elle
Et de nombreuses tempêtes ont grondé encore
Un jour
J'ai faibli, vraiment
J'ai voulu me laisser choir dans la mer
Et couler
Je l'ai fait.
Et
J'avais tout abandonné, même l'espoir, de revoir une terre, un jour
Ou une étoile
Tout oublié aussi mais sans avoir à vivre encore
C'est alors que je me suis réveillé sur une plagequelqu'un m'avait sorti de l'eau, avait plongé m'avait ramenéet ranimé
Je n'ai pas trop compris

-C'était elle ? Lyn?

Elle m'a offert tout ce que j'avais perdu, sanssans rien me demandersans poser aucune questionelle a dit qu'elle suivait mon bateau depuis toujoursnageant derrière, au cas où je tombepour ne pas que je meure.
Oui, c'était elle
Etet je n'ai pas ?
Je lui ai dit de me laisser
Je lui ai dit qu'aucune étoile ne brillerait plus
« C'est toute ma vie, de souffrir à la place des autres Prends mes lèvres, prends mon cœur, je ne te demande rien en retour. Si cela peut te sauver »
Elle a dit
Pour moi, il était impossible d'aimer encore.
Mais elle a préféré, dans le doute, me donner au risque que je vole le peu de choses qu'elle avait, sur sa maigre île, plutôt que de me voir mourir après m'avoir recueilli.
J'ai reçu cela, tout cela, et me suis reconstruit, un peu
J'ai repris goût à regarder le large.
Maisquand je regardais le large, je ne me sentais pas chez moi sur cette île.
Et quand je me tournais vers l'îleje ne voulais pas prendre le risque de regarder le large.
Alors je suis parti.
A quoi bon rester quelque part où l'on sait avoir peur de se rendre compte qu'on a peur d'en partir ?
C'est une image, encore
Car je l'aiamenée avec moi
Si rassurante
Et je l'aimais, quelque part, ouije l'aimais
Maiscomment te dire
Quand je regarde le visage d'Elune, tout mon corps s'innerve de force, toute mon âme baigne de joie
Comme avec ces étoiles
On regarde le ciel, et on l'admire pour sa beauté
Mais certains préfèrent telle ou telle constellation, et celles-ci sont tout ce qui donne envie de regarder le ciel pouvoir retrouver ces assemblages d'étoiles, les revoir
Celle qui était là se tenait à mes côtés, pour m'aider à naviguer
Et commecomme je voguais sans but
Elle
Elle me poussait à suivre, regarder, revoir cette étoile
Je partais en sens inverse et elle m'obligeait à modifier le cap
Je ne voulais pas retrouver cette étoile
Je ne voulais pas
Mais elle a tout fait pour
Et puis
Un jour j'ai fini par le faire, regarder le ciel, et cette étoile, et lui sourire, et voguer c'était étrange, car je n'étais plus seul
Elle la suivait et la regardait avec moi
Et elle me disait qu'elle voulait que je la rejoigne dans le ciel... que je quitte mon bateau, et qu'elle puisse nous voir tous deux briller pour l'éternité
Que tout ce qui comptait pour elle, c'était que je reprenne confiance, et suive cette étoile

- Mais

Et qu'elle glisserait hors de la barque lorsqu'elle saurait que je ne changerai plus de cap

- Mais

Elle a finalement sauté du bord en poussant le bateau toujours vers l'avant vers l'étoile

Les flots l'ont engloutie...

Malgré tout, le bateau a vogué vers là où elle l'a poussé la force d'un sacrifice, peut être

Et j'ai fini par lâcher la barre

A m'allonger
A laisser la mer et les vents pousser mon bateau
En regardant le ciel
Plus trop de force

Mais encore de la vie suffisamment pour regarder le ciel ...


...Allongé sur le dos...


- Et aujourd'hui ?

Le bateau vogue.
Je me suis reposé.
Parfois relevé sur un coude, voir au dessus de la rambarde
Et lorsque je me tiens, plus ou moins chancelant, et que je regarde le large, appuyé au mât je vois l'étoile, toujours là, mais elle brille d'une lueur de détresse. Je ne l'ai pas oubliée je sais qu'elle ne m'a pas oublié
Enfin, je sais
Je sais qu'elle sait que je ne veux plus la regarder, mais je sais qu'elle ne sait pas pourquoi.

-Pourquoi, alors ?

Car la peur, lointaine, de l'ancien écueil et de tout ce qu'elle est devenue, aussi, en ce temps, long, que sont les voyages en mer

-Est-ce la même lueur ? Que vois tu, maintenant qu'elle est là, à portée de ta main ?

Le marin qui lève la main pour toucher la Lune croit la prendre dans son poing mais la mouette sait oh combien il en est loin.

-Et maintenant, quelle sera notre route ? Puisque cette route est commune, quelle que soit la direction à prendre ?


*Chiron prend délicatement une main de Claira, et la pose sur son torse, au niveau de son cœur, et pose sa propre main sur celui de Claira*

La direction, Claira, a prendre maintenant, est celle du marin qui a longtemps vogué : celle du repos.


"


Il reste tant de questions sur ses lèvres, dans son regard.. Elle a recouvré une partie de sa mémoire, de nos souvenirs.. Les larmes séchées sur nos visages que nous essuyons tendrement, nos bras engourdis de nous serrer l'un contre l'autre..

La Lune qui sourit en nous regardant.

Et nos yeux qui se ferment, lovés l'un contre l'autre. La fatigue qui nous gagne, mais le bruit de son coeur qui bat, contre le mien, et résonne dans mon âme... L'espoir qui renait, comme sa mémoire semble revenir, comme tout ce qu'il reste et qu'on ne peut pas oublier.. ce qui est inscrit dans notre ventre, dans notre coeur.

L'Essence même de la vie..

L'Amour.
 
Décade du Lapin